Chapitre 1

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Douze ans plus tard

Jordan

C'est l'anniversaire de mon père, Henry, aujourd'hui. Il n'est pas au courant que je suis venu d'Espagne exprès pour lui faire la surprise le jour de ses soixante-deux ans. Je sonne à la porte, à la fois excité et nerveux. Je sais qu'il sera content de me voir et j'espère que le cadeau que je lui réserve lui plaira.

J'entends des voix qui se rapprochent derrière la porte d'entrée. Je me redresse et affiche mon plus beau sourire. La clé tourne dans la serrure et le battant en bois s'ouvre sur un homme aux cheveux gris et au visage marqué par les années. Il m'examine de la tête aux pieds avec ses petits yeux marrons cachés derrière des lunettes carrées, sans vraiment réaliser que je suis bien devant lui en chair et en os.

- Joyeux anniversaire papa, je m'écris en écartant les bras.

- Jordan ! s'étonne-t-il.

Il reste interdit quelques secondes avant de venir me prendre dans ses bras. Je le domine d'une bonne quinzaine de centimètres, avec mon mètre quatre-vingt-cinq et pourtant à cet instant, je redeviens un petit garçon. Je l'enlace à mon tour, heureux de retrouver la chaleur et l'amour paternel. Je remarque qu'il a beaucoup maigri et il parait si fragile. Je suis désormais certain d'avoir pris la bonne décision en faisant ce voyage.

Les effusions passées, il m'invite à entrer.

La maison n'a pas changé. C'est comme si le temps c'était figé. Je retrouve l'ambiance familière, rassurante et chaleureuse de mon enfance. Les meubles n'ont pas bougé de place comme s'ils étaient ancrés dans le sol et que rien ne pourrait les en déloger. La décoration est restée exactement la même depuis qu'ils ont emménagé dans ce pavillon il y a plus de trente ans. Elle n'est plus du tout à la mode, mais le principal c'est que ça leur plaise et qu'ils se sentent bien. J'hume avec bonheur cette odeur familière et unique. Un mélange de cire d'abeille dont maman se sert pour entretenir les meubles en bois massif, de bons petits plats qui mijotent et de lilas, le parfum préféré de maman. Que c'est bon de revenir ici. Je me rends compte à quel point cette maison m'a manqué.

- Mathilde ! appelle-t-il en me conduisant vers le salon, Mathilde, Jordan est là.

Ma mère, un mètre cinquante-cinq, rondelette, aux cheveux gris et aux yeux verts comme les miens, sort presque en courant de la cuisine en s'essuyant les mains avec un torchon. Je ne lui ai rien dit pour ne pas gâcher la surprise. Elle ne sait pas garder un secret, c'est plus fort qu'elle, elle fait une gaffe à chaque fois et gâche tout.

- Ooooooh ! Mon chéri, dit-elle en me serrant dans ses bras avec les larmes aux yeux. Comme je suis contente de te voir. Tu aurais dû nous prévenir, je t'aurais préparé ta chambre et...

- Je voulais vous faire la surprise et ne t'en fais pas pour les détails, on verra ça en temps voulu, pas de panique, je la coupe.

- Oui tu as raison, dit-elle encore surexcitée en m'enlaçant à nouveau.

- Tu restes combien de temps ? me demande papa.

- On en parlera tout à l'heure, pour l'instant je boirais bien un petit verre, c'est ton anniversaire après tout, je propose guilleret.

Je veux ménager mon père qui a des soucis cardiaques. Trop d'émotion d'un seul coup, ça n'est pas bon pour lui. Je lui dévoilerais ma surprise au dessert. L'euphorie des retrouvailles sera passée et il pourra mieux encaisser ce que j'ai à lui annoncer. J'espère que ça va lui plaire. J'appréhende tout de même un peu.

On s'installe au salon et maman nous apporte de quoi grignoter tandis que papa nous sert un apéritif : un verre de vin cuit pour maman, un ricard pour lui et un whisky coca pour moi. On trinque et l'interrogatoire commence. Qu'est-ce que tu fais en ce moment ? As-tu rencontré quelqu'un ? Quand comptes-tu te fixer et te marier ? Ces questions me font rires et m'agacent en même temps car ça fait des années que je les entends à chaque fois que je viens déjeuner chez eux. Ils s'inquiètent pour moi, c'est normal, je suis leur fils unique. Ils ne veulent que mon bonheur, mais jusqu'à présent, ma conception du bonheur c'était de voyager et profiter de la vie.

CHLOÉ, JE TE VEUX A MES COTÉS (version finale)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant