49-Sur les traces

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-10 Décembre 2061-

L'air hivernal m'accueille à bras ouverts et me gifle le visage, seule partie découverte de mon corps. Je tends une main vers la surface et une autre l'attrape. Mon corps s'extirpe de ce tuyau et trois autres uniforme noir referment la bouche d'égout pour la celer avec une poubelle remplie de détritus malodorants.

Les jambes sciées, je me laisse aller sur la fine couverture de neige. Les flocons illuminent le ciel assombrit par les nuages. Soulagé d'être à la surface -et je ne suis pas le seul- mon corps écarte ses membres pour former une étoile de mer. Un rire inaudible perce mes lèvres tirés vers mes joues.

Nos souffles saccadés se mélangent, le mien, plus sonore lutte contre la gène de l'asthme.

Des cheveux verts viennent se mélanger à ce fond gris, je me redresse, comme les autres, Léni a retiré sur casque. Sibylle se baigne dans les flocons, les paupières closent.

Rappelé à l'ordre, je saisis la main de mon ami asiatique pour me redresser.

Mes jambes endolories me portent dans un supplice interminable. Ma bouche s'ouvre pour laisser passer un bâillement qui est repris par tous mes camarades, sauf Ackim, le regard tourné vers la rue. Les habitants circulent de maisons en maisons et s'échangent des paniers garnis.

- On a réussit, se réjouie Sibylle.

Elle enserre Arthur dans ces bras.

- On est en vie. On est en vie !, reprend-t-elle plus fort.

Des visages se tournent dans notre direction, mais, la chance est avec nous, car d'autres poubelles nous camouflent.

- Chut, la réprime Ackim.

Il revient vers nous et entame de se déshabiller.

- Oh la, le striptease on en veut pas ici, rigole Sibylle, une main devant ses yeux pour cacher ses muscles.

Ackim l'ignore totalement, sous sa combi, il était déjà près, un tee-shirt, un pantalon ...

- Eh, rigole un peu c'est pas comme si on venait de tuer le président.

Son excitation se transforme en une euphorie qui me ramène à la dure réalité. Ici, au sein des Rejetés, je me sens libéré, heureux et loin des tracas du quotidien. Mais la vérité, nous guette tous, elle vient de se rappeller à moi avec force.

Est-ce-que je regrette mon geste ? Oui. Non. Je n'en sais rien.

Je me retrouve devant une nouvelle impasse. La deuxième. Prendre la parole au 9 a été dure, tuer l'est encore plus. Je me relève, mes gants sont couverts par la fine pellicule de neige qui fond à cause de ma chaleur corporelle.

Il faut que je m'écarte des autres pour que le temps tasse la tempête qui naît en moi. J'ai envie de pleurer, de vider se mélange sentimental qui me tue.

Je pousse les poubelles, toujours dans mon ensemble renforcé noir, et apparaît à la vue de tous, sans casque. Des femmes, des enfants me pointent du doigt et murmurent le reste d'une discussion à l'oreille de leurs congénères.

Je parcours la route suivit de près par des pas qui se rapproche.

- Trouvons un abris.

Je crache ces mots, aphone. Ma gorge, sèche, s'éraille sur chaque sonorité.

- Viens, Léni nous conduit à une maison pas très loin, il dit que nous y seront en sécurité.

J'accompagne Ackim, vêtu d'un ensemble kaki, vers une direction opposée. Un ou deux kilomètres plus loin -je ne les compte plus-, nous frappons à la porte d'une grande battisse. L'ancien bar-restaurant se distingue par une rangée de baies vitrés et des tables dépoussiérés sur le côté Sud. Cet endroit donne l'impression d'être encore en état de marche, même si ça m'étonnerait.

Implosion [TERMINEE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant