28-Décodage

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-26 Septembre 2061-

Je grave cette semaine de sérénité dans les profondeurs de mes souvenirs. Cloitrés entre quatre murs, sa peau contre la mienne, Vi me fait découvrir son quotidien. En sept jours, nos deux corps se collent à jamais.

Assis au pied de la fenêtre, j'attends qu'elle revienne avec notre repas. Nous tâchons à rester à l'écart des sympathisants et évitons la "cafétéria". Rare sont nos moments en duo.

Dehors, la pluie tombe en une légère brume qui rafraichit l'atmosphère. Les oiseaux chantent et se passent la parole à tour de rôle. Ils tentent de nouvelles figures et rivalisent avec les meilleurs voltigeurs mondiaux. Mes cordes vocales vibrent sur les tonalités d'une ancienne chanson entendue lors de mon séjour dans l'Enceinte. Ses sonorités latinos tourbillonnaient dans nos têtes.

Je reproche aux Rejetés d'avoir un nombre très restreint d'activités. Les musées sont inexistants, les cinémas fantomatiques et les concerts muets. Au contraire, l'Enceinte proposait chaque soir du divertissement. Après une dure journée de travail, je partais pour le secteur 1 avec des collègues pour profiter d'un concert. Anciennes et nouvelles personnalités mélangeaient leur charisme et offraient un spectacle à couper le souffle.

- Qu'est-ce-que tu chantes ?

Viviane pose le plateau à mes pieds. Je le ramasse et réajuste mon assise. Mes fesses hurlent de douleur mais je les ignore. 

- Rien du tout.

- Nous aussi on écoutait de la musique, pas souvent mais ça arrivait. Le soir, après avoir cultivé les champs, je partais avec ma guitare sur le dos. J'accompagnais un ami. Sa voix sortait du commun. Elle se brisait au moment propice et tenait les notes les plus dures. J'espère qu'il est encore en vie et qu'il réalise son rêve.

- C'était quoi ?

- Chanter pour aiguiller les gens. Loïs portait sur lui un carnet où il y inscrivait des paroles. La nuit, il retravaillait son imagination et donnait naissance à de magnifiques chansons. En une heure, il t'en pondait une. Son répertoire rivalisait ceux des plus grands.

- Il faudra que je te retrouve une guitare alors. Je veux entendre tes doigts pincer les cordes.

Je prends son menton entre mes doigts et dépose mes lèvres sur les siennes. Nous plongeons l'un dans l'autre dans un monde que nous connaissons bien depuis sept jours. Je goute à son souffle chaud, à ses doigts moites et à ces cheveux d'une senteur incomparable. Mon pouce caresse sa joue, douce. 

- On ferait mieux de manger, coupe-t-elle notre échange.

- Pourquoi ? Je pourrais faire ça toute la journée, m'exclaffé-je

Je l'embrasse à nouveau, d'une passion dévorante. Mon ventre se peuple de sensations diverses et incompréhensibles. Un million de papillons brassent mon estomac.

- Moi aussi mais le fourgon risque d'arriver d'un moment à l'autre et je n'aimerais pas qu'ils nous découvrent lors d'un moment intime.

Nous nous empressons de déguster notre savoureux riz trop cuit, nature. Ce style de nourriture sans artifice m'avait manqué. L'Enceinte est doué pour mélanger les saveurs les plus extrêmes. J'adorais par-dessous tout le poulet à l'ananas servit avec un accompagnement au curie.

Un fois nos assiettes vides, je pars les ramener. Je pousse à l'aide de mon dos la porte arrière du Hangar pour donner la vaisselle à l'asiatique aux cheveux verts.

- Connor sait où en sont les hommes ?, demandé-je.

- Il ne devrait pas tarder. Pourquoi ?

Implosion [TERMINEE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant