Chapitre 5

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- Ha, mais c'est dégueu...

J'ouvre les yeux, nous sommes toujours dans la voiture, mais elle est à l'arrêt et je ne sais pas depuis combien de temps. Je me redresse, j'ai la gorge sèche.

- Quoi ?

- Tu m'as bavé dessus...

Je tourne la tête et je reconnais le bas de mon immeuble. Aussi, je prends mon sac et vais pour partir en remerciant le chauffeur, mais en titubant. Je suis sur le trottoir quand Frédéric sort du véhicule en disant :

- Tu me dois un paquet de cigarettes !

- Ha non, mais quel rat ! Bon, monte, j'ai une cartouche en haut !

Il me suit en se tenant à tous les pans de mur qu'il rencontre puis nous pénétrons dans l'ascenseur et finissons par débarquer péniblement dans mon appartement. À cet instant, si j'avais été sobre, j'aurais immédiatement pensé à un mauvais canular... ou un piège d'une télé-réalité !

Frédéric trouve le canapé et tombe littéralement dedans.

- Je crois qu'on n'aurait pas dû boire autant !

- Tu crois ? Moi je dois mettre mon réveil matin !

- Quel est le rapport ?

- Aucun, mais je dois mettre le réveil matin !

Il me regarde avec des yeux complètement vitreux et la bouche béante. J'éclate de rire.

- Malheur, tu as une sale tronche...

- Comment ça, je n'ai plus une gueule d'ange ?

- Clairement là, tu fais peur, tu as une gueule indéfinissable ! Tiens.

Je lui lance deux paquets, il sort une cigarette et l'allume.

- Merci de demander si l'on peut fumer dans mon appartement...

- Pardon, on peut fumer ?

Dit-il en recrachant un épais nuage de tabac brulé dans ma direction.

- Et merde !

Puis je tire une cloque et fais de même, tout en me vautrant à sa gauche dans les coussins. On fixe le vide un temps en tentant de rester éveillés puis il me parle en voyant ma pile de jeux de société :

- Et si l'on faisait un Monopoly ?

- Maintenant ?

- Ouais, ça fait longtemps que je n'en ai pas fait...

Je hausse les épaules et vais chercher la boite. Nous nous mettons sur la moquette et nous commençons à jouer, au bout d'un certain nombre de tours ça dégénère. Il me crierait presque dessus...

- Tu vas me vendre la rue de la paix !

- Non !

- Et pourquoi ?

- Parce que tu es bien assez riche comme ça !

- Tu parles au sens propre ou au figuré ?

- Les deux mon neveu ! Je garde la rue de la Paix, mais toi tu me donnes Paradis, je le vaux bien !

- Hey, coquine ! Tu as raison, faire monter les filles aux paradis ça me connait.

- Mais tu es un méga prétentieux en plus ! Donne-moi cette carte !

Et je m'avance pour lui subtiliser d'un coup, je la saisis et me relève pour lui montrer mon rapt en sautillant comme une folle hystérique.

- Rends-moi ça immédiatement !

Il est debout et commence à me courir après autour de la table basse. On va finir par tout casser, si ça continue !

- Je suis trop rapide pour toi ! Tu ne l'auras pas ! Le mauvais acteur est un mauvais coureur... bah !

- Ne me provoque pas ! Même bourré, je suis capable de tenir un cent mètres !

J'éclate de rire et lui tire la langue.

- Tu parles ! Tu es trop lourd, trop grand, trop... pré...ten...tieux ! Coureur oui, mais seulement de jupons !

Il plisse ses yeux et d'un coup, il se jette sur moi. Je l'évite de justesse avant qu'il ne tombe par terre, je l'enjambe habilement, mais au même instant et il me saisit la cheville. Je chute la tête la première et il me tire rapidement pour me faire basculer sous lui. Il bloque mes poignets de chaque côté de ma tête tout en étant à califourchon sur moi. Là, je commence à ne plus m'amuser du tout et je me rends compte de la situation. Il me maintient au sol et affiche un sourire mutin de victoire. Mais au bout de quelques secondes, bien trop longues à mon gout, il s'aperçoit enfin que notre position est loin d'être banale. Nos respirations s'accélèrent et je deviens rouge comme une tomate. Aussi, il desserre doucement les mains et j'en profite pour me libérer et me remettre debout. Un long, très long silence s'installe et nous nous observons sans savoir trop comment réagir. Puis nerveusement, je me dirige vers la cuisine et me sers un grand verre d'eau. Je n'ose plus le regarder dans les yeux, j'aurais presque l'impression d'avoir dégrisé quand je fixe l'horloge en face de moi en manquant de m'étouffer.

- Ho Putain !

Il sursaute, lui aussi semble réveillé d'un coup.

- Quoi ?

- Tu as vu l'heure ?

- Oui et alors ?

- Demain, j'ai rendez-vous à 10h avec Daniel !

- Daniel ? C'est qui ?

Tout en prenant les paquets de cigarettes et en lui mettant dans ses mains, je le fais reculer vers mon entrée, j'ouvre la porte et le pousse dehors avant de la lui claquer au nez. Merde ! J'ai oublié un léger détail ! J'ouvre une nouvelle fois et le trouve planté dans la même position, il parait désorienté.

- Bon, garde la caisse, mais viens me chercher à 9h !

Il écarquille les yeux, lève un doigt pour allier le geste à la parole, mais je referme aussitôt sans savoir ce qu'il vient de me dire.

MB MORGANE - Incontrôlables [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant