Mira
J'ai passé la journée dans un état second, comme un zombie. Ce n'est qu'en toute fin d'après-midi que j'ai pu prendre quelques heures de repos tandis que l'Impérial accostait en Italie pour sa première escale. Quand je finis par émerger après une petite sieste je tombe sur Cynthia qui est en train de se préparer pour sortir.
— Hey ! Tu te réveilles pile au bon moment ! On va profiter de l'escale pour manger en ville et faire la fête, tu veux venir ?
J'hésite quelques secondes tout en me frottant les yeux, soit je sors pour moi profiter du périple du navire, soit je passe la soirée la soirée seule à bord... La seconde option est tentante mais j'ai pas envie de finir par broyer du noir, puis je me sens enfin en forme autant en profiter.
— Avec plaisir ! Tu me laisses quelques minutes pour me préparer ?
— Bien sûr, on t'attend sur le pont.
Je hoche la tête et me lève pour fouiller dans mes affaires, il faut que je trouve quelque chose à me mettre. Après avoir passé en revue mes maigres possessions je fini par opter pour une longue robe noire tout ce qu'il y a de plus classique avec une paire de baskets histoire de pouvoir danser toute la nuit. Je jette un coup d'œil à l'heure et décide de prendre quelques minutes pour me maquiller légèrement. Ce n'est qu'une fois que j'ai attrapé ma veste et mon sac que mon regard croise mon reflet dans le miroir.
Je ne dirais pas que je suis belle mais quand même. La robe met en valeur ma grande taille ainsi que mes formes, même si j'ai du mal à les assumer. Les ondulations naturelles de mes long cheveux blond leur donnent de nombreux reflets tandis que mes yeux bruns me fixent d'un œil critique. Je finis tout de même par m'adresser un sourire en guise d'encouragement avant de filer rejoindre les autres.
Après avoir passé un agréable début de soirée dans un petit restaurant traditionnel j'ai suivi Cynthia, Sam et Lise dans un club. J'avoue ne pas être super emballée à l'idée de me retrouver potentiellement coincée en boîte dans une ville inconnue surtout qu'ils m'ont laissée seule hier... Du coup pour éviter de faire une nouvelle nuit blanche et risquer de rater le départ du bateau je décide de ne pas abuser sur l'alcool, tant pis si je passe pour une fille chiante.
Un peu comme hier après un premier verre je fini par perdre de vue mes acolytes tandis que je me déhanche sur la piste de danse. Je les cherche du regard parmi la foule mais en vain, je ne suis déjà pas physionomiste de base mais avec la pénombre présente c'est peine perdue. J'hésite quelques secondes avant de sortir mon portable pour consulter l'heure et me fixer une limite. Si je les retrouve avant tant mieux sinon tant pis puisque je n'ai pas de moyen de les joindre, j'espère juste qu'ils ne s'inquiétons pas pour moi. Et il faut absolument que je pense à prendre leurs numéros.
Les heures passent rapidement et la fatigue se fait de plus en présente, je finis donc par me résigner à l'idée de rentrer. À force de danser et repousser quelques avances je suis en nage si bien que je décide de passer me rafraîchir. Les sanitaires sont un grand espace mixte où des lavabos surmontés de miroirs font face aux différentes cabines. La musique n'est plus qu'un lointain écho et je semble seule. Après avoir passé un peu d'eau sur mon visage un bruit attire mon attention, on dirait un gémissement étouffé. Je scrute le miroir pour savoir si quelque chose se trouve dans mon dos mais je ne vois rien et le bruit persiste. Le lieu me semble soudainement glauque et un mauvais pressentiment me fait frissonner. Timidement je demande :
— Il y a quelqu'un ?
C'est affligeant de stupidité et en plus ça n'a rien fait. Tellement stupide que j'ai crié ça en français, ne maîtrisant pas l'italien je retente en anglais mais avec aussi peu de résultat. J'hésite plusieurs secondes mais la curiosité finit par l'emporter sur ma crainte si bien que j'ouvre les portes qui étaient jusqu'alors entrouvertes. Je finis par tomber sur une jeune fille recroquevillée sur elle-même. Elle semble ailleurs et alors que je m'approche deux choses me frappent. Elle semble tellement jeune que je doute qu'elle soit majeure et elle semble souffrir. Je lui parle doucement puis avec plus conviction pour essayer de la faire revenir à elle mais en vain. Je me recule d'un pas et la détaille plus attentivement, elle n'a pas l'air blessée ni d'avoir été agressée, son état me fait plus penser à un bad trip. C'est pas une super idée mais les sanitaires sont trop isolés pour qu'on puisse m'entendre si j'appelle à l'aide, je devrais pouvoir la laisser seule quelques minutes le temps de trouver de l'aide.
J'avise le videur le plus proche et après un échange un peu confus il finit tout de même par me suivre. Je ne peux pas lui reprocher son hésitation, suivre une cliente dans les toilettes c'est plutôt étrange et s'il ne maîtrise pas l'anglais il n'a sans doute pas tout compris. Quand on rejoint la jeune fille, elle n'a pas bougé et son état ne semble pas s'être aggravé. Immédiatement l'employé comprend le problème et passe différents appels avant de me faire comprendre que je dois rester là. Le sentiment d'impuissance face à la situation me frustre profondément et mon inquiétude se calme seulement lorsque les secours arrivent.
Des flics les rejoignent rapidement et après s'être entretenu avec les pompiers et le videur ils se tournent vers moi. La situation me rend un peu anxieuse entre le stress de la situation et la différence de langue... L'une des membres de la patrouille me rassure cependant en me disant que j'ai bien agit et que la jeune fille devrait s'en sortir. Elle se contente ensuite de prendre mes coordonnées ainsi qu'une rapide déposition. Quand j'explique que je travaille à bord de l'Impérial, elle me propose de me raccompagner. Un peu sonnée par la fin de ma soirée j'accepte avec un certain soulagement, au moins je suis sûre de ne pas rater le bateau. Pendant que son collègue conduit, la policière en profite pour s'assurer de l'exactitude de mes coordonnées et vérifier mon passeport.
La voiture finit par se garer sur le port et ce n'est qu'après les avoir remerciés que je m'engage sur l'embarcadère. Le véhicule attend que je passe les contrôles me permettant d'accéder au navire avant de partir. Je ne sais pas trop s'ils ont voulu vérifier mes dires ou s'ils étaient inquiets pour moi mais la soirée se finit sur une note étrange et désagréable. La perspective d'avoir sauvegardé quelques heures pour dormir ne parvient même pas à me tirer un sourire.
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Ténèbres
AkčníDeux protagonistes qui n'auraient jamais dû se rencontrer. Mira. La vie l'a fracassé, elle a fait de mauvais choix, de très mauvais choix. Et pourtant elle s'en est miraculeusement sortie. Tout aurait pu continuer dans le meilleur des mondes mais le...