Mira
J'essaie de suivre le pas rapide d'Angelo tout en essayant de retenir le jean de toute évidence trop grand pour moi que j'ai trouvé ainsi que le chemin qu'il emprunte. Les quelques minutes de marche sont particulièrement désagréables et je ne peux m'empêcher de pousser un soupir de soulagement lorsqu'on arrive devant les lourdes portes en bois qui doivent donner sur le mess.
Angelo en tire une et me dévoile alors une petite pièce éclairée par plusieurs néons, un buffet avec différents plats est dressé dans le fond tandis que le reste de l'espace est occupé par des tables et des chaises. L'endroit est morne et le fait qu'il soit désert le rend même lugubre, malgré tout je me résigne à suivre Angelo dedans, je l'observe se diriger vers le buffet pour allumer la machine à café tandis que je m'installe sur la chaise la plus proche de moi.
La cafetière trouble le silence ainsi que mes pensées, je n'oublie pas mon objectif mais je n'arrive pas à trouver comment m'y prendre. Quand la machine se tait enfin Angelo se tourne vers moi et alors qu'il allait esquisser une phrase la porte s'ouvre à nouveau. Un jeune homme aux cheveux ébouriffé y passe sa tête, il scanne la pièce d'un coup d'œil avant de demander à Angelo de le suivre, ce qu'il fait sans un mot et sans un regard pour moi.
Le claquement de la porte me tire de mes songes et je prends conscience avec une certaine angoisse que je me retrouve seule dans un endroit que je ne connais pas, je ne suis même pas sûre de réussir à retrouver ma cabine. J'hésite un peu avant de trouver l'énergie de me lever pour m'approcher du buffet. Puisque je n'ai aucune consigne et qu'Angelo avait parlé de prendre le petit-déjeuner autant commencer par là. À mon tour je lance la machine à café tout en attrapant des gâteaux à grignoter. Une fois me repas finit j'essaie de rester assise en essayant de me rassurer, après tout quelqu'un devrait bien finir par venir me chercher non ?
Le temps semble cependant passer extrêmement lentement si bien que je n'arrive plus à rester tranquillement assise. Je me retrouve alors à faire les cent pas encore et encore dans cette pièce tout en tentant de compter les secondes qui défile. Ma patience abdique totalement quand je m'approche des cinq cents. Après tout personne ne m'a interdit de visiter le navire, on m'a même dit que je pourrais voir le pont, puis ce n'est pas comme si je pouvais aller bien loin.
Pleine de détermination je me dirige vers la porte, j'esquisse quelques pas tout en me remémorant le trajet effectué avec Angelo. Alors que j'allais tourner dans l'un des couloirs, je heurte de plein fouet une jeune fille qui semblait pressée. Dans la bousculade mon bras cogne violement contre le mur si bien que je frotte ce dernier tout en murmurant des excuses sans oser relever la tête.
— Tu es Mira c'est ça ?
Je sens son regard curieux sur moi si bien que je finis par relever les yeux tout en hochant la tête. Je découvre alors une jolie blonde aux cheveux nattés, ses yeux vairons me regardent avec intérêt tandis que ma gêne me fait rougir stupidement. Elle ne semble cependant pas se rendre compte de mon malaise et me tends sa main tout en m'expliquant :
— Je suis Véga, la capitaine du navire.
Surprise je saisie sa main pour la serrer, j'hésite quelques secondes avant d'oser demander :
— Ce n'est pas Angelo ?
— Non, me répond-t-elle en riant, heureusement d'ailleurs, il ne sait pas même pas différencier bâbord et tribord. On a des intérêts communs parfois donc on se rend services.
Sa voix est enjouée, elle semble sincèrement gentille si bien que je reste songeuse sur leurs intérêts. Je la remercie de sa réponse et alors que j'allais prendre congé pour reprendre mon exploration du bateau Véga m'arrête en me demandant :
— Tu as besoin d'aide ? Tu allais quelque part ?
— Pas vraiment, j'hésite un peu avant de lui expliquer, Angelo a dû partir et j'ai fini par en avoir marre de l'attendre du coup je me suis dit que je pouvais explorer un peu... Enfin si je peux ?
Elle arque un sourcil et sans répondre à ma question elle me demande directement :
— Il est parti sans rien te dire ?
— Oui, quelqu'un est venu le chercher alors qu'on était dans le mess, ça doit faire une demi-heure, une heure.
Véga semble réfléchir quelques secondes avant de me demander d'attendre là. Je hoche la tête et m'adosse contre le mur pour éviter de rester stupidement plantée dans le couloir, je la regarde s'éloigner de quelques pas en sortant son portable avant de le porter à son oreille. Ne souhaitant pas la mettre mal à l'aise je me perds dans la contemplation de la peinture grisâtre qui couvre le sol et qui s'écaille en de nombreux endroits. La voix de Véga est tellement basse que je ne parviens pas à entendre le moindre détail, l'appel est cependant bref puisqu'elle revient vers moi à peine quelques minutes plus tard.
— Viens, on va le rejoindre, tu exploreras le navire après d'accord ?
— D'accord.
Ce n'est pas comme si j'avais vraiment le choix de toute façon, déçue de ne même pas être parvenue à quitter ce maudit couloir je me résigne à suivre Véga qui me ramène au mess. La scène a un goût de déjà vu, on est seules dans la pièce, je me suis à nouveau assise sur la première chaise venue tandis que Véga se prépare un café. Elle prend cependant la peine de m'en proposer un et de venir s'installer à côté de moi.
Alors que je cherchais un sujet de conversation pour rompre le silence la porte s'ouvre sur le gars de tout à l'heure. S'il ne semblait pas m'avoir remarqué la première fois il m'adresse cette fois-ci un regard mauvais qui me glace le sang. Il prend cette fois la peine de rentrer dans la pièce et se dirige vers notre table d'un pas assuré. Malgré son jeune âge sa taille et sa carrure le rende impressionnant, assez pour qu'il me fasse froid dans le dos. Il s'installe face à moi tandis que je baisse la tête tout en triturant nerveusement le bas de la veste que j'ai enfilé. Le poids de son regard sur moi me tétanise et je suis quasiment sûre qu'il le sent et qu'il en profite. Alors que le temps semble s'être arrêté, il reprend brutalement son cours quand l'homme me demande d'une voix éraillée :
— C'est toi la petite chienne de Jarod ?
La surprise ne me laisse pas le temps de réagir, ce n'est cependant pas le cas de Véga qui lui répond immédiatement :
— Fout-lui la paix Stan. Pourquoi ton pote n'est pas là ?
— Il a mieux à faire pour l'instant, tu sais ce que c'est avec les affaires non ?
Elle lève les yeux au ciel avant de lui demander :
— Et qu'est-ce qu'il fait de Mira ?
— Aucune idée, lui répond-il en haussant les épaules, j'imagine qu'on peut la laisser aller et venir comme elle veut, ce n'est pas comme si elle pouvait aller bien loin de toute façon.
Sa manière de me considérer et de parler de moi comme si j'étais absente m'exaspère assez pour que je soupire malgré moi. Instantanément leurs regards se tournent vers moi tandis que je me pétrifie sur place. Je n'ai pas le temps de dire quoique ce soit que Stan reprend :
— Si cette perspective t'ennuie, je connais un excellent moyen de passer le temps.
Son regard se perd sur le bracelet rouge qui orne toujours mon poignet avant de revenir se fixer dans le mien. Je secoue la tête pour décliner sa proposition sans réussir pour autant à articuler le moindre mot. Je suis pitoyable et je ne peux m'empêcher de détester ma faiblesse. C'est Véga qui se décide à mettre fin à mon supplice en me disant de partir faire ce que je veux, je ne me fais pas prier et quitte la pièce avec un certain empressement.
Quand je referme la porte derrière moi je pousse un long soupir de soulagement. Bordel que la semaine va être longue si je n'arrive pas à me ressaisir et à être un peu plus sûre de moi. Je fais quelques pas tout en essayant de me remettre de mes émotions.
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Ténèbres
AcciónDeux protagonistes qui n'auraient jamais dû se rencontrer. Mira. La vie l'a fracassé, elle a fait de mauvais choix, de très mauvais choix. Et pourtant elle s'en est miraculeusement sortie. Tout aurait pu continuer dans le meilleur des mondes mais le...