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Mira

C'est un putain de cauchemar et je vais me réveiller. Genre ça ne peut pas être autre chose, pas moyen. Pourtant le cliquetis métallique et la morsure des menottes me prouvent que non. Quand Ezéchiel est parti et qu'il ne s'est rien passé pendant plusieurs minutes j'ai cru qu'il bluffait, que ça allait aller. Puis cette foutue lumière s'est allumée. Mes pensées s'entrechoquent entre elles, par moment je suis persuadée qu'il est préférable que je ferme les yeux et ne sache rien mais je crois que l'ignorance me terrifie encore plus.

Les derniers mots d'Ezéchiel s'ajoute en plus à tout ce bordel, est-ce que c'est vrai ? J'ai du mal à croire que John puisse être le coupable de tout ça, pourtant je ne vois aucune raison qui justifierait un mensonge. L'agitation dans la pièce d'à côté me sort cependant de mes pensées, le second gars s'est rapproché d'Ezéchiel pour lui montrer ce stupide bout de papier. Il hoche la tête avec un air satisfait tandis que l'autre homme quitte la pièce.

À nouveau il ne se passe rien pendant plusieurs minutes et je reste avec mon angoisse qui me broie le ventre. Alors que je me retrouve à songer au fait qu'il y a peut-être un papier offrant une issue l'homme revient en poussant un petit chariot contenant du matériel médical. C'est à ce moment-là qu'Ezéchiel se rapproche de la fille tout en expliquant sans doute pour moi :

— Tu as eu de la chance, Hank a eu la main heureuse car croit moi il y a des choses bien pires. Est-ce que tu as une préférence ?

La fille secoue à nouveau la tête, comme si elle était incapable de faire face à l'horreur de sa situation. J'imagine que son déni la protégera sans doute, avec un peu de chance sa mémoire rangera tout ça aux oubliettes. J'ai terriblement envie de fermer les yeux mais impossible sans savoir ce qui va lui arriver. Et je suis quasiment certaine qu'Ezéchiel fait bien attention à ne rien dire pour me forcer à assister à ça. Quel connard putain.

Après plusieurs secondes de flottement où il semble examiner le contenu du chariot il enfile une paire de gants et se saisit d'une seringue qu'il plante à plusieurs reprises au niveau de la main de la Kathleen. La distance m'empêche de voir plus précisément mais visiblement ça doit être sa main gauche ou peut-être un doigt. C'est à ce moment-là que mon esprit abandonne et que je ferme les yeux.

Le silence est troublé uniquement par les reniflements de la fille ainsi que par quelques bruits métalliques et le temps commence à se faire long. Et s'il ne se passait rien ? Ou alors est-ce que c'est déjà fini ? Je n'arrive pas à avoir le moindre repère temporel, au bout d'un long moment je parviens à calmer mes pensées désordonnées et je décide de compter, à cinq cents je réouvre les yeux et advienne que pourra.

Alors que j'allais chuchoter trois cents quatre-vingt-dix-huit la voix d'Ezéchiel trouble le silence :

— J'ai terminé, Hank s'assurera que ça guérisse bien. J'espère que ton index ne te manquera pas trop.

Je réouvre timidement les yeux tandis que la porte du bureau où j'étais s'ouvre sur Ezéchiel. Sans un mot il libère mes mains et me fait signe de le suivre, trop sonnée par la situation je m'exécute tout amenant mes mains à mon visage pour contempler mes doigts. Je crois que ça va, enfin ça pourrait être pire donc. Brusquement l'angoisse qui me tordait le ventre se transforme en une nausée que je n'arrive pas à contrôler. Quand j'ai terminé de rendre le faible contenu de mon estomac je croise le regard d'Ezéchiel. Et je découvre avec surprise une lueur de tristesse dans ses yeux. Il fouille dans l'une de ses poches pour en sortir un paquet de mouchoir qu'il me tend.

— Viens j'ai de l'eau dans la voiture et il fait plus frais en bas, ça va te faire du bien.

Je songe un instant au fait qu'il faudrait que je nettoie mais le sol mais ça n'a pas l'air de préoccuper Ezéchiel qui s'est remis à marcher. Perdue je lui emboîte le pas tout en sortant un mouchoir pour essuyer mes lèvres. La descente des escaliers se fait de la manière la plus hasardeuse possible, la structure tanguait déjà lors de la montée mais là c'est encore pire et je suis réellement soulagée lorsque je découvre la portière passagère du véhicule ouverte. Je m'assois tout en laissant mes jambes ressortir pour profiter du courant d'air tandis qu'Ezéchiel fouille dans la boîte à gant pour me tendre une bouteille d'eau dont j'avale plusieurs gorgées avec empressement. Ce n'est qu'au bout de quelques minutes que j'arrive à pleinement intégrer ce qu'il vient se passer. Comme s'il avait attendu ce moment précisément Ezéchiel me fait signe de rentrer mes jambes avant de s'installer à son tour.

TénèbresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant