Ténèbres

51.

Ezéchiel

À l'annonce du jugement un frisson apaisant parcourt mon corps, cette histoire est enfin quasiment terminée. Je jette un regard rassurant à Mira avant de glisser sur Stan qui accuse le coup silencieusement, comme s'il n'y croyait pas vraiment. Insensible à la tension qui régnait dans la pièce Emiliano reprendre d'une voix calme :

— Est-ce que tu as une dernière volonté ?

Il prend quelques secondes qui semblent durer une éternité pour réfléchir avant d'énoncer :

— Que Mira soit présente, c'est tout.

La main de John broyant mon épaule me fait ravaler mes protestations tandis que Mira est soudainement devenue pâle et me fixe à la recherche d'une aide potentielle. Je n'ai malheureusement rien à lui offrir, les règles étant ce qu'elles sont. Impassible Emiliano se contente de hocher la tête avant de conclure froidement :

— Très bien dans ce cas allons-y.

Je fais alors signe à Mira de me suivre avant de tourner les talons pour rejoindre ma voiture. Ce n'est qu'une fois à l'intérieur de celle-ci que Mira laisse éclater son inquiétude d'une voix tremblante :

— Il veut que je sois présente à quoi ? Dis-moi que ce n'est pas ce à quoi je pense Ezéchiel...

Dans le rétro son regard est suppliant si bien que je cherche mes mots avec soin avant de renoncer, c'est impossible d'adoucir ce choc. Face à mon silence c'est finalement John qui lui répond :

— Tu as parfaitement compris, il veut que tu assistes à son exécution. Et non on ne peut rien faire contre ça, devance mon ami d'une voix blanche.

— Mais pourquoi faire ça ? Quel intérêt ?

— Savoir que ça te fera souffrir est une raison suffisante je pense, dis-je.

Mira acquiesce comme si elle comprenait avant de poser une nouvelle question :

— Il va se passer quoi maintenant ?

— On va retrouver Emiliano avec Stan à la zone portuaire et on fera ce qui doit être fait.

— C'est toi qui ? Hoquette Mira.

Je lui réponds d'un signe de tête pendant qu'une pointe d'appréhension se fiche dans mon estomac. J'ai beau l'avoir déjà fait le stress est toujours le même, la présence de Mira l'amplifiant largement. Assit à l'arrière avec John il la serre doucement dans ses bras alors qu'elle sanglote en silence. Quand elle parvient à sécher ses larmes on est quasiment arrivés. C'est en descendant de la voiture que Mira me lâche :

— C'est de ta faute tout ça ! Je t'en voudrais pour toujours, jamais je ne te pardonnerais.

Ses mots me font l'effet d'une claque à laquelle je ne trouve rien à répondre. Visiblement gêné John reste silencieux et me suis d'un pas trainant. C'est la troisième fois que j'emmène Mira ici et j'espère de toute mes forces que ce sera la dernière. J'ouvre la lourde porte du hangar avant d'observer Mira faire les cents pas. J'aimerais tellement trouver quelque chose à dire, un prétexte pour me dédouaner mais c'est bien ma sanction qu'elle a choisi de demander.

L'arrivée de la voiture d'Emiliano met un terme à mes tergiversations ce qui me soulage au plus profond de mon être. Il sort de sa voiture suivi par Stan qui est encadré par deux hommes de main. Sans autre forme de procès ils le font se mettre à genoux sur le bitume tandis qu'Emiliano finit de viser le silencieux sur l'arme qu'il me tend ensuite. Je jette un œil à Mira qui est en train de se rapprocher de nous avant de lancer un regard interrogateur à Emiliano. Il me répond alors d'un hochement de tête. Comprenant que c'est la fin Stan obstinément silencieux ferme les yeux, John a pris Mira dans ses bras, malgré tout je sens son regard acéré sur moi et je ressens parfaitement sa colère. Mal à l'aise et pressé d'en finir je pointe l'arme sur Stan.