Chapitre 41

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Mattew ~ 6 ans plus tôt ~

Je dois le faire. Je ne dois pas me dégonfler. Pas maintenant.

Ça fait bientôt deux ans et demi que je fais partie du gang. Quand j'examine de plus près ce qu'il m'est arrivé durant cette période je ne peux pas dire que ça m'a apporté quelque chose de bien. Je me suis toujours leurré sur mes émotions. Je me suis toujours trouvé des excuses pour rester avec eux. Auprès d'Ashley.

Auprès d'une fille qui m'a peut-être aimée un temps, mais qui me conduit sur le mauvais chemin. Une fille qui m'a peut-être appréciée à ma juste valeur, mais qui ne fait que se servir de mes faiblesses.

Une fille qui m'a enfoncée encore plus dans l'enfer qu'est ma vie, tandis qu'Henzo me tire désespérément vers la lumière.

Mon meilleur ami qui m'a connu souriant et fait tout pour m'arracher à la noirceur de mon âme. Mon meilleur ami qui ne sait pas tout de mon histoire et ne demande jamais à savoir le pourquoi du comment avant de m'extraire de ce qui semble être mon avenir.

Et alors qu'il me force à rester debout, Victoire écoute mes tourments pour me montrer la voie.

Cette femme qui m'a considéré comme un fils dès le premier jour, me prouvant que je peux être aimé peu importe mes actes. Cette femme qui m'a ouvert sa porte quand mon père me chassait de la maison, me montrant pour quoi je devais me battre.

Peut-être est-ce la drogue qui m'a tant aveuglée. Peut-être pas.

Aujourd'hui je suis lucide et je vais me battre pour vivre. Pour Henzo. Pour Victoire.

Pour moi.

J'enfile un simple t-shirt parce que rien ne pourra me protéger de ce qu'il m'attend. Encore moins des vêtements.

Je n'ai prévenu personne de ce que je vais faire. Mon meilleur ami aurait voulu m'accompagner. Ma professeure se torturerait l'esprit pour moi. Je n'en vaut pas la peine.

J'ai demandé le rassemblement du gang et je me doute qu'Ashley a compris pourquoi. Alors à quoi bon s'éterniser ? Je rejoins notre point de rendez-vous aussi vite que ma moto me le permet.

Une fois sur place, je la regarde une dernière fois et laisse mon casque à côté. Je rentre dans le hangar où tout le monde m'attend.

Je prends une profonde inspiration avant de me lancer. Je ne peux plus reculer.

- Je vais partir.

Un profond silence s'ensuit. Je regarde Ashley qui attend que je confirme clairement ce qu'elle sait déjà.

- Je quitte le gang, dis-je finalement.

- Tu sais ce que ça implique ?

- Oui.

- Tu seras libre de partir si tu survis, reprécise-t-elle.

Je hoche la tête. Elle sait bien que je suis au courant. J'ai moi-même était spectateur d'un départ. Du moins, si on peut appeler ça spectateur.

- Très bien. Les garçons je vous le laisse, c'est à vous de jouer.

Les concernés mettent du temps à réagir. Techniquement j'étais le second de la boss, alors ils doivent craindre des représailles. Peut-être ont-ils peur que ce ne soit un coup monté. Ils me regardent avec désarroi, notamment Otto, de qui j'étais le plus proche.

Max est le premier à m'attraper. Constatant qu'il ne lui arrive rien les autres s'emparent de moi à leur tour. Ils m'entrainent dans une ruelle éloignée de l'usine désaffectée et je me laisse faire, tel un condamné qui est dans le couloir de la mort.

Il n'y a plus de retour en arrière possible.

J'aurais beau les supplier, ils ont l'ordre de ne pas s'arrêter. Je dois simplement encaisser et ne pas mourir. Je ne serai pas plus vivant en restant parmi eux de toute façon.

On me jette soudain par terre et j'ai rapidement le souffle coupé par le premier coup qui atterri dans mon ventre.

Ils sont nombreux et ne peuvent pas tous me frapper en même temps. Ils se relayent. Tout le monde doit y passer c'est la règle. C'est une preuve de loyauté envers Kyoto.

Les coups s'enchaînent. Ils me font de plus en plus mal. Ou alors est-ce mon corps qui me fait défaut ?

Tantôt on me retire tout le souffle de mes poumons, tantôt on me brise les os. Je sens que mon visage est déjà gonflé et le goût du sang s'immisce dans ma bouche. Mais je résiste. Pour Henzo. Pour Victoire.

Pour moi.

Je ne sais combien de temps ça dure. J'ai l'impression de tenir bien plus longtemps que la plupart des gars. Est-ce ma volonté de vivre qui me pousse inconsciemment à lutter ?

Je crache le sang qui m'obstrue la trachée. Je me replie sur moi-même comme si cela pouvait me protéger. Je ne fais pas de mouvements inutiles qui pourraient créer une douleur que je ne suis pas prêt à ressentir.

Pourtant je souffre déjà. Je suis persuadé d'avoir la majorité de mes côtes brisées. Je sens que mon arcade sourcilière ainsi que ma pommette sont ouvertes. Je dois probablement avoir d'autres traumatismes dans mes membres.

Mais je réagis le moins possible. Parce que c'est tout ce que je mérite. Parce que ce ne sera jamais assez pour toutes les vies que j'ai détruites. Parce que ça me lave de mes fautes, même celles que j'ai oublié. Parce que c'est le seul moyen de changer de vie.

Je me sens sombrer petit à petit. Pourtant je ne crie toujours pas. Je me sens partir de l'autre côté. Pourtant je ne supplie pas.

J'ai l'espoir d'une vie meilleure.

Une vie où je serai quelqu'un de bien, quelqu'un de bon.

Une vie où j'aurai des amis, des vrais.

Une vie où je serai enseignant, comme j'ai toujours voulu l'être.

Une vie où j'aurai le droit à l'amour.

En attendant cette vie, c'est le noir qui m'envahit.

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J'espère que ce chapitre vous a plu ! Vous aimez les flashbacks ? N'oubliez pas de voter et commenter ! 

Apprends-moi à t'aimer [premier jet]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant