Chp 3 - Fassa : vodka et pilmini (1)

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Pendant la semaine qui précéda mon entrevue avec lui, je me renseignai un peu plus sur Lev Haakonen. Ce qu'avait dit Maarti était exact, et vérifiable partout. Je fus très occupée par les répétitions, mais je me surpris à penser beaucoup à lui. J'avais vraiment envie d'en savoir plus sur Lev. En fait, pendant sept jours, je ne fis que penser à lui.

Lorsque le jour du rendez-vous arriva, fixé par un rapide coup de fil à sa secrétaire, je mis beaucoup de temps à décider ce que j'allais porter. Il fallait que je lui fasse manger ce contrat, je devais paraître à la fois sérieuse et jolie. Je me décidais pour un jean tout simple, une veste de tailleur rose pâle et des escarpins à petits talons. J'avais noué mes longs cheveux châtain avec un carré de soie rouge, dont les extrémités dépassaient comme des petites oreilles de lapin. J'enfilai des lunettes à verres neutres, avant de me raviser. Inutile d'en faire trop.

Je pris le métro à neuf heures pour me rendre à son bureau, qui était situé à Espoo, en périphérie de la ville. Je me sentais plutôt stressée et le trajet me parut interminable. Les bureaux principaux de Novka étaient grands et lumineux, situés dans une de ces enclaves forestières qui séparent les quartiers de la ville. Ils correspondaient tout à fait à l'image de la marque.

Étrangement, il y avait peu de gens dans le bâtiment principal. Il avait même l'air vide.

À peine entrée, je me sentis très nerveuse et jugeai qu'il était plus sage d'aller boire un café avant d'aller voir la secrétaire. Il y avait justement un distributeur, et en attendant que ma boisson coule, je me recoiffai face à la vitre. Lorsque je me retournai, ce fut pour me retrouver nez à nez avec Lev. Je restai un moment sans voix, complètement immergée dans ses immenses yeux couleur lagon.

— Ah, bonjour, bredouillai-je. Justement, j'allais vous voir.

— Je sais, répondit Lev avec un sourire fin. Mais je pensais que vous n'arriveriez pas avant dix heures, alors je comptais boire un café avant de vous attendre. Excusez ma tenue, mais je suis allé courir dans les bois à côté et je n'ai pas encore eu le temps de me changer, je comptais le faire après le café en fait.

Je jetai un œil rapide sur ses vêtements. Effectivement, il avait troqué son costume noir de la soirée contre un jogging et un sweat-shirt. Du reste, cela lui allait très bien. Il faisait patron cool en friday-wear à l'américaine, et cela achevait de donner une idée positive de sa personne. Mais son regard perçant reflétait une intelligence froide et calculatrice, très à l'opposé de ses traits et de son ton chaleureux. Il m'avait tout à fait l'air d'être du genre à faire exprès de trainer en casual-wear avant un rendez-vous pour rassurer les partenaires économiques...

Ne baisse pas ta garde. Il a beau paraître accessible, cela reste un gros patron du club Bilderberg.

— Désolé, j'arrive toujours en avance, balbutiai-je, un peu gênée. Mais ce n'est pas votre secrétaire qui vous fait votre café ?

— Ne vous excusez pas, répondit Lev en passant son bras au-dessus de moi pour insérer une pièce dans la machine. Je n'arrive jamais au bureau avant dix heures, de toute façon. Aujourd'hui, c'est exceptionnel. Quant à ma secrétaire, eh bien, elle est occupée par des choses beaucoup plus importantes que de faire le café du patron. J'ai peu d'employés ici, finalement.

Lev me tendit mon café, que je pris maladroitement, puis attendit, les mains dans les poches, que le sien finisse de couler. Pendant ce temps, il me regardait du coin de l'œil, un léger sourire aux lèvres. Je me brûlai en tentant de boire le café qui venait de sortir, et soufflai dessus sous le regard amusé de Lev.

Il doit me prendre pour une foldingue, pensai-je, contrite.

— Suivez-moi, dit-il en prenant son café dans la main gauche.

DEVILISH LIESOù les histoires vivent. Découvrez maintenant