Plus que l'amour lui-même

64. L'attaque finale

       Mon corps est tendu tandis que j'essaie de rassembler tous les héritages de sorcière. Je ne sais pas comment je vais m'y prendre pour réveiller l'âme des femmes emprisonnées depuis si longtemps... Je suis cependant certaine que je m'épuiserai bien plus en le faisant un par un. Il faut que je fasse tout un coup, quitte à ne plus pouvoir me battre après... ou pire.

       Mes paumes fouillent en tremblant les pages des différents ouvrages. J'ai réussi à établir un contact avec ma mère en posant mes mains sur les lettres qu'elle a écrites. Je ne pourrai pas le faire avec ceux-là, puisque je n'ai tout simplement pas assez de mains pour poser mes mains sur tous ces livres en même temps, mais j'espère que les placer au-dessus suffira. Je commence à me faire à l'idée que je ne me réveillerai peut-être pas après cela. Je ne suis pas habituée à faire une telle prestation magique, et je ne suis pas prête non plus. Me voilà entrain de prévoir ma mort alors que je lisais tranquillement de la théorie sur le perron de l'ancien coven des Osborne à peine une heure avant.

       Je n'ai même pas eu beaucoup de temps avec ma mère. Elle m'a simplement raconté l'histoire de ma vie, une histoire que je vais devoir apprendre à accepter, si j'ai la chance de pouvoir le faire. Ma survie n'est même pas garantie. Il faut que je garde ça en tête.

       Je ferme fortement mes yeux, essayant de chasser toutes les idées sombres qui occupent mes pensées en ce moment. Il faut que je me concentre. Depuis quand suis-je aussi défaitiste ? Si je continue comme ça, en effet je ne vais pas m'en sortir, et personne d'ailleurs. Inspire. Expire. Ella, tout va bien. Tu dois te concentrer. Ce n'est pas le moment.

       Je prends une profonde inspiration avant de souffler tout l'air que contenaient mes poumons. Ce n'est qu'à ce moment que mes oreilles semblent porter attention aux bruits environnants. Ma mère est presque collée à moi, les bras tendus devant elle. Elle sert les dents tout en gémissant un peu de douleur. Une épaisse bulle transparente nous entourant. Il y a beaucoup de mouvements autour, et elle se resserre petit à petit. On dirait que quelque chose l'attaque, l'écrase.

       Tout un coup, comme un ralenti, je me rends compte que les mouvements sont en réalité Viktor Bartholy. Il est tellement rapide que l'on ne pouvait même pas réussir à voir une forme, et encore moins humanoïde. Il se déplace extrêmement rapidement autour de la bulle. Littéralement. Il passe au-dessus de nous tranquillement et pendant une seconde je me demande comme il fait. Bien sûr, c'est un vampire.

       Je secoue la tête, essayant désespérément de me concentrer. Si on meurt simplement parce que j'étais trop distraite...

       Je me lève, me collant dos à dos à ma mère. Perdue dans mes pensées, j'ai tout de même réussi à ouvrir tous les héritages. La bulle de protection tremble un peu, comme si elle se désintégrait avant de se reconstruire. Je ne peux même pas imaginer à quel point ça doit être épuisant, surtout pour une... morte.

   - Allez Ella, tu peux le faire, je me murmure à moi-même.

       Mes mains sont placées devant moi, au-dessus des livres. Nous sommes dans la même position, ma mère et moi. Je remarque que les livres vont bientôt sortir de la bulle, si elle continue de rapetisser à cette vitesse. Cela doit être le plan de Viktor, m'enlever les héritages pour rendre l'attaque finale moins puissante. Il faut que j'agisse. Maintenant.

Apprends à aimer cette Ella autant que moi, je l'aime.

       Je ferme les yeux. Mes mains tremblent légèrement et j'essaie de me concentrer sur tout qui n'est pas le vampire surpuissant voulant ma mort. Drogo vient hanter mes pensées, comme d'habitude. C'est comme s'il était avec moi, même maintenant, quand il ne peut pas réellement l'être. Si tu ne le fais pas pour toi, fais le pour lui.