Épilogue 2

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PER INANIA REGNA

Dans le royaume des ombres 

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Erebor

Le soir de la Bataille des Cinq Armées

Comme le voulait la tradition, Thorin et Fíli furent enterrés le soir-même de la grande bataille dans les profondeurs de la Montagne. Bard avait déposé l'Arkenstone sur la poitrine de Thorin et avait refermé ses mains inertes dessus.

Devant les centaines de Nains qui assistaient aux funérailles, le batelier proclama :

« Que l'Arkenstone reste là jusqu'à ce que la Montagne s'écroule ! Qu'elle apporte la chance à tous ceux de son peuple qui demeureront dorénavant ici ! »

Les Nains poussèrent un cri et retrouvèrent le silence.

La cérémonie fut brève mais intense. Les Nains de la Compagnie se recueillirent un par un auprès des défunts, le visage mouillé de larmes et la poitrine secouée de sanglots. Bilbo était avec eux, ravagé et misérable. Il pleurait abondamment. Il n'arrivait pas à croire que la grande Quête de la Montagne Solitaire puisse se terminer d'une façon si affreuse. Le jeune Fíli était mort. Son précieux ami Thorin aussi. Et Ayrèn, sa chère Ayrèn... elle avait succombé à ses démons intérieurs. Les dragons avaient pris le contrôle de son corps et disparu pour le Mordor. À sa tristesse s'ajouta un sentiment de désespoir, et il pleura de plus belle pour cela.

Quand vint le moment de couronner Kíli Roi Sous la Montagne, l'émotion devint trop forte pour le Hobbit. Il ne comprenait pas comment on pouvait imposer ça à Kíli alors qu'il n'avait même pas fini d'enterrer son frère et son oncle. La loi des Nains lui paraissait trop cruelle, trop insupportable. « Le trône de la Montagne ne sera jamais vide, Erebor ne sera jamais sans monarque », avait rappelé Balin. Il ne pouvait en être autrement.

'Au diable les traditions, au diable tous ces chichis sans cœur !' songea le Hobbit. 'Je ne suis pas un Nain, et je ne saurai supporter de rester ici plus longtemps.'

Bilbo s'éclipsa de la salle du trône sans attendre la fin de la cérémonie. Il remonta lentement les marches qui menaient à la Grande Porte. Il ne croisa personne sur son chemin. Dehors, le crépuscule descendait sur la terre ; et la Montagne, figée dans une tristesse douloureuse, donnait l'impression de pleurer la mort de Thorin, de Fíli, et des Nains des Monts de Fer tombés au combat.

Après avoir gravi tous les escaliers avec une lenteur exagérée, Bilbo atteignit enfin la Grande Porte. Il y avait des gravats partout, des Nains en armure montaient la garde. Il s'en détourna et monta les quelques marches qui menaient à ce qui restait du rempart. Quand il y parvint, il s'approcha du bord et se pencha par-dessus le parapet. Il inspira à fond. L'air froid l'enveloppa mais ne lui procura aucun soulagement. Il tremblait et il était glacé, mais il avait la tête brûlante.

Et il régnait un silence de mort. Il n'y avait pas d'appels, pas un seul écho. La tristesse était répandue dans l'air.

Alors Bilbo laissa échapper un sanglot et se mit à pleurer pour de bon. Ses amis étaient morts. Ses amis étaient morts, et Ayrèn n'était plus là pour le réconforter. Il aurait donné n'importe quoi pour être avec elle, même son précieux Cul-de-sac.

Il pleura longtemps, à en avoir les yeux rouges et la voix enrouée.

Il pleurait encore quand, soudain, il entendit quelqu'un l'interpeler :

Dracà-cwellere, la Tueuse de dragonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant