Chapitre 5

247 12 2
                                    

Je me suis promis de faire taire mon cœur une bonne fois pour toutes. Je sais que cela risque d'être compliqué, même très compliqué, mais comme je l'ai déjà dit, rien n'est impossible.

Pour le supprimer de mon cœur, je dois d'abord l'enlever de mes pensées. Pour ce faire, je vais travailler, travailler, je vais travailler comme une force née. Si je n'ai pas de temps pour réfléchir, je ne penserai plus à lui. Vous pouvez me croire, je vais non seulement le sortir de mon cur, mais je vais aussi fermer ce stupide cur à double tour, puis je me ferai une joie de perdre la clé.

Est-ce cela l'amour ? Si oui, alors non merci, je n'en veux plus, je préfère largement être une femme froide, une de celles que l'on voit dans les films et séries. C'est nettement mieux. Dans cet état d'esprit, je me suis levée de bonne heure afin de me rendre au travail. Il faut avouer que je n'ai pas trop dormi.

Haut les cours Ivy ! D'ici peu, rien ne pourra plus t'atteindre.

Il y a juste une chose que je n'avais pas prévue. Je devais bien me douter que je ne trouverais pas les locaux ouverts à 6 h 30 du matin. Certes, j'ai les clés de mon bureau, comme tous les employés, par contre ceux du bâtiment sont sous la responsabilité du service de sécurité. Alors j'ai décidé de faire un tour dans notre chantier avant de revenir. Il s'agit d'un Centre commercial : le chantier EVERMOR.

Une seule construction ne me tiendra pas assez occupé, surtout que le chantier a déjà pas mal avancé, alors je vais démarrer un de nos projets en attente. La tour SEÏTON ? Pourquoi pas ? Relever un tel défi me fait envie.

Et si je me battais afin d'avoir un marché plutôt ? Ne serait-ce pas plus amusant ? Matérialiser une idée que j'aurai défendue.

De retour au bureau, je convoque une réunion d'à peine une heure afin d'informer mes collègues de ma décision de présenter ma candidature pour le projet du pont : un pont flottant qui relie les villes de Seattle et de Southworth. Le Southworth Bridge. Il s'agira d'obtenir le contrat dans un premier temps. Eux seront toujours en charge du Chantier EVERMOR, quant à moi je m'occuperai de celui-ci en plus toute seule. Une fois mes propositions de plan achevées, je leur en ferai part. Ainsi décidée, je me mets au travail sans tarder. Je m'attelle à constituer mon dossier, à déposer ma candidature, à rencontrer les clients dans l'optique d'écouter leurs attentes. Je n'ai donc pas le temps de prendre une pause, c'était un peu l'idée en fait.

Il est 16 h, je dois dire que je m'en sors plutôt bien, je n'ai pas pensé à Dylan une seule fois et dites-moi que ce n'est pas vrai !! Je ne viens pas de bon sang. Rien que de penser à son nom me fait dériver. L'effet boule de neige, vous connaissez ? C'est ce qui se passe à l'instant même. J'entends sa voix qui résonne dans ma tête, je vois son visage, ce magnifique rictus qu'il a lorsqu'il est amusé que personne ne remarque.

J'en ai le cœur qui se serre. Une profonde joie m'anime, ou peut-être est-ce de la tristesse ou de la solitude. Je ne sais plus trop. Je suis perdue. Je ne parviens plus à distinguer ce que je ressens exactement. Je crois que mon cœur vient de se planter comme une vieille machine des années 90. C'est plutôt une bonne nouvelle. Théoriquement, une machine ne fonctionne plus lorsqu'elle se plante. Cela veut donc dire que je ne ressentirai plus la moindre émotion n'est-ce pas ? Ni peine ni colère. Génial !

Me voilà à présent dans une boucle sans fin jusqu'à tard dans la nuit, passant d'un état de concentration extrême à un état de distraction absolu et vice versa. J'ai espoir d'y arriver, après tout, Rome ne s'est pas faite en un jour. Petit à petit, j'y parviendrai.

Il est 23 heures passé lorsque je quitte le travail. La route est déserte, les voitures se font rares et le silence y règne en maître. Mais cela ne me dit rien. Je ne suis nullement inquiète. J'ai l'habitude des sorties tard dans la nuit. Avec Ariana comme amie je me suis habituée à certaines situations peu communes. Comme être très calme et rassurée sur une route déserte tard dans la nuit, ou même laisser le serveur décider de la boisson que l'on va boire lors de nos sorties en boîte soi-disant parce que c'est plus intéressant, plus fun.

—Surprenez-nous, disait-elle à ces pauvres serveurs qui, certaines fois, ne savaient pas si elle était sérieuse ou pas.

Cette époque me manque tellement si vous saviez. Pensant à tout et à rien j'arrive à la maison après 40 minutes de route.

Je n'ai pas vraiment envie de dîner, je prends donc ma douche et me plonge dans la réalisation d'esquisses de plan.

J'ai l'intention d'en faire une dizaine et d'en choisir les meilleurs.

Lorsque je me réveille le lendemain, je suis dans mon lit, et mes documents sont classés. Je ne me souviens pas avoir fait cela.

—Comment vas-tu ? me demande Callie assise au pied de mon lit.

—Je ne l'avais même pas remarqué.

—Oui, je vais bien. Qu'est-ce que oh mon Dieu ! quelle heure est-il ?

—Calme-toi Ivy, il n'est que 8 h 30.

—D'accord, il n'est que 8 h 30, hein ? 8 h 30 ?!? Je suis en retard.

Je me lève avec précipitation dans le but de prendre une douche, mais Callie m'en empêche. Elle m'attrape par les épaules et me fait rasseoir.

—Ivy, hier je ne t'ai pas vu de toute la journée, et lorsque je suis venue dans ta chambre hier nuit, tu dormais, des papiers éparpillés sur le lit. Surette, ton visage endormi laissait paraître une grande fatigue. Je ne t'ai jamais vu ainsi.

—Mais non, tu te fais des idées. J'ai juste beaucoup de travail. Parlant de cela, je dois vraiment y aller.

—Non ! tu n'iras pas au travail aujourd'hui.

—Comment ...  ?

********
Elle est vraiment décidée à l'oublier, peut-être qu'elle va y arriver en fin de compte.
Mais je ne crois pas que s'immerger dans le travail soit la solution.

Par-delà sa cruautéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant