Dylan

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SMITH est mort, ainsi va la vie. Cela ne me fait ni chaud ni froid. Bien sûr que ce n'est pas un suicide, c'est un meurtre. Je me sens un peu coupable, humm Peut-être pas en fin de compte. Je n'ai pas le temps d'essayer de déchiffrer mes putains de sentiments que j'entends le bruit d'un verre qui se heurte au carrelage. Alors je me tourne et vois une Ivy en plein tourment. Ses yeux sont remplis d'une telle détresse, elle est d'une pâleur cadavérique, je la vois chanceler, marmonner des mots que je peine à comprendre.

Que lui arrive-t-elle ? Elle... elle parle seule !?

Euh... on dirait bien que oui, bizarre.

Elle a peur, je peux le voir. Elle paraît même terrorisée. Lui a-t-on fait du mal ? Qui !??

Je m'approche d'elle afin de comprendre la raison de son désarroi, ne me demander pas pourquoi, même moi j'ignore la raison de cet élan de gentillesse, je la vois reculer. Juste comme ça. Je réalise donc, je prends conscience, que je suis celui qui lui fout la frousse. Elle a peur de moi. Pourquoi ? Question stupide, tout le monde a peur de moi. Excepté Hayden.

Elle me fuit et je la suis jusqu'à ce qu'elle se retrouve coincée.

Et là, je la sens trembler. Alors je lui pose la question à dix millions. Mais elle se refuse à m'expliquer, elle me fuit même du regard. J'aimerais comprendre. Dites-moi ! Expliquez-moi ! Si elle a si peur de moi, pourquoi n'annule-t-elle pas les fiançailles bordel de merde !!?? Je sens une colère sans nom se rependre en moi. Je sens que mon calme me glisse entre les doigts. L'orage se répand dangereusement.

Une fissure, puis deux, et la barrière cède. Elle déborde et je la laisse se déchaîner sur elle. Je laisse tout sortir, je convertis toutes mes sombres pensées en paroles, blessantes, tranchantes. Il n'y a que la vérité qui puisse être magnifiquement cruelle. Ce que je n'avais pas prévu c'est qu'elle serait elle aussi méchamment honnête à mon sujet.

Oui, elle a tout vrai, je suis lâche et même très lâche.

Ce que je n'étais pas préparé à entendre. Mais alors, pas du tout se résume en quelques mots : je t'aime.

L'amour, ce sentiment d'une telle stupidité n'a pas de place dans ma vie, il n'y a pas pire sentiment au monde, destructeur, plus addictif que les cracks et l'herbe. Je n'y crois pas, comment aimer quelqu'un qui nous fout la trouille ? Se rend-elle compte qu'elle se contredit ? Peu importe. Moi, je ne l'aime pas. Je n'ai jamais aimé. Je ne sais pas aimer. Pas que je ne veux pas. Je ne peux juste pas. Je n'ai même pas confiance en l'être humain. Je ne m'attarde donc pas sur le sujet et lui demande qu'elle me pose la question qui me semble lui trotter dans la caboche depuis un moment. Seulement, je n'aurais pas dû.

Sa question était claire, sans détour.

— As-tu tué SMITH ? m'a-t-elle demandé.

Je me sens alors refroidir, mes muscles se crispent. Sans lui répondre, je demande ce qu'elle en pense. Et là, je vois du dégoût dans ses yeux, de l'horreur. Elle n'a pas besoin de mettre des mots dessus, les yeux reflètent notre âme. Je vois ce qu'elle pense de moi. Ha, ha, ha ! Dylan JONES, le riche meurtrier de Seattle, encore. Voilà un beau titre de journal. Les infos ne se douteront jamais qu'il s'agit d'une exécution, c'est presque dommage.

Mais Ivy, elle, je ne la pardonnerais jamais.

Je me sens comme vide, c'est étrange, je me suis déjà senti ainsi, il y a longtemps, très longtemps. Après avoir confirmé ses doutes, je me saisis de mes clés et sors.

Voilà environ trente minutes que je conduis sans but précis, sans destination. Je me laisse juste guider. Je me suis arrêté à une supérette du coin pour prendre quelques paquets de clopes avant de reprendre la route. J'avais pourtant réussi à arrêter, ça fait six ans que je n'ai plus fumé et j'ai galéré pour arriver à ce résultat, trop pour replonger. Mais là, en ce moment, j'en ai besoin.

Pendant que je pèse le pour et le contre, je me gare devant une baraque. Une baraque qui m'est très familière, qui me rappelle le monstre que je suis. Avec un goût amer dans la bouche, je m'allume un clope, qui je sais, marque le début de ma fin, avant de sortir du véhicule. Je m'y adosse, porte la cigarette à mes lèvres, et rejette la fumée qui s'en va avec mon âme, tout mon être.

Pourquoi suis-je ici ? Pourquoi venir dans la piaule de SMITH ? Est-ce une coïncidence ? Forcément.

Je n'ai pas regardé où j'allais, j'aurais pu aller n'importe où ailleurs.

Toutefois, je ne me sens pas mieux pour autant, comment je le pourrais ? Je suis à l'origine de sa mort. Je ne sais pas ce que j'espérais, peut être que j'imaginais que toutes ces peines, ces frustrations et cette amertume allaient se dissiper de même que la fumée.

Impossible.

— Dylan ? Que fais-tu là ? me demande une voix qui vient de mon passé, passé que j'avais pourtant réussi à enterrer.

Est-ce seulement possible d'oublier sa famille, son enfance, de tirer un trait dessus avec les secrets qui vont avec ? J'ai essayé, j'ai même presque réussi et voilà que tout s'effondre.

— Une petite promenade nocturne, dis-je sans me donner la peine de le regarder. Et toi qu'est-ce que tu fous là, Adrian ?

— Je te trouve bien méchant avec ton cousin que tu n'as pas vu depuis des années. Tu n'es pas content de me voir ? déclare-t-il avant de s'avancer vers moi.

Je ne le conseille pas de le faire s'il veut éviter les ennuis.

Je sens une chose se remuer au fond de moi, cette même chose qui était tapie dans l'ombre depuis des années, que je parvenais à garder enchaînée. Je le sens se libérer, doucement, sûrement.

Quelque chose de froid et humide se dépose sur ma joue délicatement, puis encore, je réalise alors qu'il s'agit de la pluie.

Rapidement, la petite averse qui s'est imposée se transforme en un déluge. Je ferme les yeux un moment et respire. Je m'absente de ce monde, je me retire tout simplement, si seulement je pouvais le faire pour de bon. Hélas ! ce n'est pas possible, enfin, sans passer par la mort. Je les ouvre après quelques instants et vois Adrian m'observer.

—Qu'est-ce que t'as à me reluquer de la sorte !? Dégage !!!

—Dylan, il pleut. Tu devrais rentrer toi aussi.

—T'es sourd ou t'es stupide !!? Je t'ai dit de te barrer. Casse-toi. T'entends !!?

Sans rien ajouter, il se retourne, rejoint son véhicule et s'en va.

Ça n'a pas toujours été ainsi avec Adrian. Quand on était mômes, on était comme des frères jumeaux, jamais l'un sans l'autre. J'avais toujours voulu avoir un frère et j'avais trouvé cela en lui. Après tout, c'est tout comme, c'est l'enfant à ma tante, la sur de père. C'était parfait jusqu'à cette sinistre nuit. Tout s'est effondré. Tout a été détruit, et mon âme par la même occasion.

*****
Dylan est il vraiment le meurtrier de Smith ?
Que veut il dire par " je suis à l'origine de sa mort " ?
Qu'a t'il bien pu se passer cette fameuse nuit pour que Dylan enterre son passé ? Un passé sombre il me semble, dans lequel Adrian a joué un grand rôle.

Les réponses à nos questions se trouvent dans les chapitres qui suivent.

Par-delà sa cruauté Où les histoires vivent. Découvrez maintenant