-Année 7 après LP – (Saison des pluies)
Les vitraux des appartements royaux dégoulinaient sinistrement. Ils n'offraient qu'une vue austère de Sora, un territoire ne se contrastant que dans les multiples variantes de gris que proposait la saison des pluies. Sar Ier était accoudé à sa fenêtre, ses pensées s'envolaient au-delà des murs du royaume tandis que son regard scrutait l'horizon avec espoir.
Athèlme et Malvina étaient déjà partis depuis des jours et il n'avait aucun moyen de communiquer avec eux ... Il ne savait même pas précisément l'itinéraire qu'ils étaient amenés à suivre. Non, tout ce qu'il savait c'est que la proximité du Pic de la Destinée avec Ninetïa n'avait rien pour le rassurer. Jamais les nains n'avaient fait ne serait-ce que l'esquisse d'un geste politique pour le continent. Sar ne se rappelait que trop bien le jour où le Traité de Paix avait été signé et avec lui, le Contrat des six Royaumes. Rib'Eman n'avait montré aucun signe de soutien au projet du nouveau roi de Sora. Unir les nations entre elles, cesser toute forme de guérilla, autrefois encouragée par le règne tyrannique de feu Sar III et permettre une prospérité durable entre les peuples n'avait semblé que provoquer la colère et le mépris chez le souverain des nains. Afin de préserver son peuple, il avait toutefois accepté de signer le long parchemin étendu sur la table de marbre, comme l'avaient fait avec plaisir tous les autres dirigeants de Brazla. Tous avaient applaudi, sauf Rib'Eman. Tous avaient festoyé aussi et dansé en l'honneur de cette nouvelle ère propice aux échanges et au partage multiculturelles du continent. Sauf Rib'Eman. A peine la plume reposée sur le traité, il avait disparu par la grande porte de la Salle des Rencontres et plus personne ne l'avait jamais revu. Aucun royaume n'allait bénéficier des forges naines, ni du savoir-faire des ouvriers de Ninetïa pour l'architecture des grands monuments. Les nains s'étaient dès lors volatilisés dans leur montagne, reclus depuis des décennies derrière les murs minéraux de Ninetïa.
Sar soupira et observa le petit nuage de buée qu'il venait de faire naître sur sa vitre. Déjà, le flou disparaissait et laissait réapparaître la pluie maussade au-travers.
— Si seulement tout pouvait s'évanouir comme un souffle, grommela le roi, taciturne.
Il prolongea sa contemplation des terres jusqu'à ce que quelqu'un frappe à sa porte. Le bois massif résonna comme un gong dans la pièce silencieuse et toute la quiétude du lieu se dissipa avec le bruit sourd.
— Entrez donc ! Marmonna Sar Ier juste assez fort pour que sa voix traverse le lourd pan de bois.
Un entrebâillement laissa apparaître le visage doux de Moïe qui questionna silencieusement son roi avant de franchir le seuil. Face à l'absence de refus, il se décida finalement à entrer et referma délicatement la porte derrière lui. La vision de son roi ainsi affalé sur son siège, les yeux vides de toute vitalité, n'était pas sans lui rappeler la triste période d'une maladie qui faillit lui coûter la vie.
— Sire, vous m'avez fait demander, se présenta Moïe dans une légère révérence.
Les cheveux du demi-elfe étaient tressés en une longue natte posée sur son épaule et qui descendait jusqu'au bas de ses côtes. Son oreille dépassait de la masse ébène à la façon des elfes de Flendïa, mais l'arrondi de son cartilage ne laissait aucun doute quant aux origines du mage. Il se releva délicatement et posa ses yeux de cristal sur son roi avec une tendresse infinie.
— Moïe, as-tu des nouvelles de nos enfants ? Ont-ils déjà passé le Gouffre des Glaces ?
— Je suis malheureusement dans l'incapacité de vous répondre, sire. Mais j'ai toute confiance en eux. Il est encore un peu tôt selon moi pour présumer leur arrivée au Gouffre mais dois-je vous rappeler que j'ai cédé la Pierre d'Imalt au Général Athèlme. Il n'y a rien que le Général ne saurait contrer en possession d'un tel artefact, croyez-moi, lui répondit posément Moïe d'un air rassurant.
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Les Reliques du Damné - T.I Trahison
FantasyLe temps de la prospérité est révolu. Le continent Brazla doit à nouveau essuyer une menace destructrice. Les dieux sont formels, les peuples doivent s'unir et se préparer au pire. Deux pouvoirs unique devront s'allier afin de défaire les noirs des...