Chapitre 8

2.2K 184 7
                                    

Nash

La chapelle est bondée. Cela faisait longtemps que nous n'avions pas eu autant de nos frères rassemblés en même temps au QG. Si ça ne tenait qu'à moi, ça resterait comme ça, mais mon président de père ne voit pas les choses du même œil.

Là où je pense qu'il faudrait verser un peu plus dans la légalité en investissant davantage dans les bars, les clubs de strip, les salles de jeux, les combats illégaux et même les paris, mon paternel préfère les contrats plus lucratifs pour un moindre d'efforts.

Peu importe combien d'entre nous finissent en taule chaque année, la drogue et les armes ont fait des Hells ce qu'ils sont aujourd'hui et le changement n'est pas à l'ordre du jour. Je ne compte plus le nombre d'engueulades que nous avons eu sur le sujet ces derniers mois.

Je parcours la salle des yeux tout en me demandant ce que mes frères en penseraient. Lequel d'entre nous gagnerait le vote si mes idées y étaient soumises ? Ça reste à déterminer. Pour le moment, je me contente d'être satisfait des quelques yeux au beurre noir et lèvres fendues affichés après mon petit entraînement matinal.

Hawks est assis à ma droite, Mac à la sienne. Ils échangent quelques regards ravis. Rien ne vaut une bonne petite bastonnade pour vous remettre les idées en place dès le réveil. Tout ça juste avant une messe qui s'annonce électrique. J'espère seulement que ça suffira pour éviter les échauffourées. Pas sûr si mon paternel se pointe encore avec une demi-heure de retard.

Je donnerais cher pour savoir ce qui se passe dans sa tête depuis quelque temps. C'est comme si quelque chose le préoccupait suffisamment pour l'empêcher de jouer pleinement son rôle chez les Hells. Quoi qu'il en soit, tant qu'il refusera d'en parler, personne ne pourra l'aider. Faut-il le destituer pour autant ?

Jusqu'à hier soir, j'aurais dit non sans aucune hésitation. Tout le monde a le droit d'avoir des mauvaises passes. Nous en avons tous eu. Certaines pires que d'autres, mais n'est-ce pas exactement ce qui nous rassemble au départ ? Des vies de merde sur lesquelles nous voulions reprendre le contrôle ? Oui, mais voilà... Le run d'hier a tout changé pour moi. Pour la première fois depuis qu'il a récupéré le patch de mon grand-père, je doute de la capacité de mon géniteur à remonter la pente. Notre président a perdu la tête et nous a envoyés sciemment au casse-pipe. Alors oui, notre taff est dangereux et chaque fois qu'on accepte un run, on connait les risques, mais là, c'était différent. Si encore nous savions pourquoi...

Un coup d'œil à ma montre, un autre à la grosse horloge murale de la chapelle. Rien. Je suis à deux doigts d'aller le chercher pour le ramener par la peau du cul jusqu'à son fauteuil en bout de table quand enfin le prez fait son entrée.

C'est à peine si les mecs le regardent et ça, c'est un autre problème. Si mon père perd le respect de ses gars, c'est le début de la fin. En même temps, ce qui s'est passé hier a déjà fait le tour du club et la plupart de nos frères sont très remontés contre lui.

J'observe le visage aux traits tirés par la fatigue de mon vieux et me demande s'il ne serait pas malade. Est-ce qu'il nous le dirait si c'était le cas ? Les lèvres pincées en une ligne fine, il s'assoit à ma gauche et claque le marteau sur son socle. La séance est levée.

— À l'ordre du jour, le deal avec les Mexicains qu'on a foiré hier. Le problème avec les RIP. Autre chose ?

Je lève un doigt de la table et ajoute avec nonchalance :

— La protégée de Vince.

Mon père me dévisage un long moment. Il ne sait pas du tout de qui je parle. Preuve qu'il est complètement à côté de ses pompes ces derniers temps. Il devrait être le premier au courant de ce qui se passe dans son club.

Hell WhispererOù les histoires vivent. Découvrez maintenant