Chapitre 18 - Ayden

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Je ne pensais pas trouver quelqu'un en entrant ici. Je suis surpris d'y voir Hestia, surtout qu'elle n'était jamais venue auparavant... Enfin pas à ma connaissance. J'observe la bouteille de vin rouge à moitié pleine et son verre. Elle me regarde avec l'œil brillant. A-t-elle seulement l'habitude de boire de l'alcool ? Ses cheveux sont lâchés, elle me sourit légèrement comme pour balayer ses pensées précédentes. Quand je suis entré, elle paraissait tellement seule à boire son verre dans le noir. Pourquoi reste-t-elle dans le noir d'ailleurs ?

— Je peux allumer les lumières ?

Je m'apprête à y aller quand elle m'attrape le bras et me dit :

— Non, je suis bien comme ça.

Je regarde sa main posée sur mon avant-bras et ce contact chauffe ma peau sous ma veste. Elle la retire lentement et j'essaie d'ignorer l'empreinte qu'elle a laissée. Je retire ma veste et la jette sur un tabouret. En remontant les manches de ma chemise, je passe derrière le bar pour me servir un whisky.

— Ça te dérange si je t'accompagne ?

Elle secoue la tête à la négative. Je m'accoude au bar devant elle, nos têtes sont à quelques centimètres et je lui demande :

— Pourquoi est-ce que tu bois seule ?

Elle rougit et détourne le regard. Elle a l'air étrangement timide par rapport à la version téméraire que je connais. Je ne peux m'empêcher de vouloir la toucher, pourtant je me retiens. Ses yeux se posent sur sa bouteille entamée, alors que les miens restent fixés à son visage. J'observe son nez parfait, ses lèvres légèrement charnues et ses quelques taches de rousseur à peine discernables. Sait-elle à quel point elle est belle ? La lumière de la lune se reflète sur sa peau, on pourrait croire à une illusion. Quand cette pensée effleure mon esprit, je recule finalement pour prendre une grande gorgée de liquide ambré, le feu descendant dans mon œsophage m'aide à me ressaisir. Elle décide enfin de me répondre :

— Je ne sais pas. Je... suis arrivée ici par hasard.

Elle est hésitante et gênée. C'est donc à cause d'Éros... J'aurais dû m'en douter. Quand j'ai vu leurs réactions là-bas, j'ai su. Elle est son âme sœur. Quand je l'ai compris je n'y ai pas cru, premièrement parce qu'elle n'a pas l'air au courant et deuxièmement par qu'à force de la côtoyer j'ai eu l'impression qu'elle était faite pour moi. Savoir qu'elle est amoureuse de lui me rend fou. J'ai déjà eu envie de lui révéler plusieurs fois ce que je ressens quand je la vois, mais ce n'est jamais le bon moment. Et ce soir est le pire moment que l'on puisse envisager.

Son regard dérive vers mes tatouages. Je les observe à mon tour. Sous la lueur de la pleine lune, ils paraissent incrustés de milliers de minuscules pierres de lunes. Elle avance deux doigts pour toucher le plus proche d'elle, celui sur mon avant-bras droit. Je retiens inconsciemment ma respiration en voyant ses doigts s'approcher de plus en plus. J'anticipe le contact et le plaisir que je ressentirais. Elle me touche finalement et je crois que ma respiration a un raté. Comment peut-elle me faire ressentir de telles sensations alors qu'elle est l'âme sœur d'un autre ? C'est insensé. Je m'en veux, je ne suis pas fleur bleue et encore moins romantique. Quand je suis avec elle, je ne me reconnais pas, je suis maladroit et hésitant, je feins l'assurance. D'habitude, je n'ai pas à feinter, je respire la confiance en moi, je suis un fonceur né comme dirait Alex. J'en viens à imaginer une vie calme avec elle, pourtant ce n'est pas le destin que je souhaite, enfin ce que je souhaitais. Et malgré toutes ces incohérences, je n'arrive pas à m'éloigner d'elle, je ne peux m'empêcher d'aller la voir, de l'observer quand elle s'entraîne avec Cali.

Ses doigts suivent les traits du dessin sur ma peau. Elle me demande :

— Pourquoi ils brillent comme ça ?

Je lui réponds d'une voix qui me paraît affreusement grave lié aux plaisirs que je ressens, mais que j'essaie de cacher.

— La lune.

Je n'arrive pas à prononcer une phrase construite correctement. Elle fronce les sourcils et retire sa main pour porter son verre de vin à ses lèvres. Je respire mieux maintenant que le contact est coupé, je finis mon whisky d'une traite et me retourne pour me resservir. Je peux enfin répondre correctement.

— Je t'ai déjà dit qu'il fallait respecter plusieurs conditions pour que le sort et le tatouage soient bien faits. La pleine lune fait partie d'une de ces conditions... C'est pourquoi ils réagissent aux rayons qu'elle émet.

Je la regarde dans le miroir. Elle détaille mon dos, mes épaules, mes bras et demande :

— Tu en as beaucoup d'autres ?

— Plusieurs, oui.

— Où ça ?

Je me retourne vers elle un demi-sourire s'étend sur mon visage et d'une voix suave je lui réponds :

— Je ne pense pas que tu veuilles connaître tous les emplacements.

Ma remarque a l'effet escompté parce qu'elle devient cramoisie, ce qui me fait sourire encore plus.

— Oh.

Elle cherche son verre et prend une gorgée pour cacher sa gêne. Elle commence à reprendre des couleurs normales, c'est alors que je déboutonne ma chemise. Elle rougit à nouveau et s'étrangle.

— Mais qu'est-ce que tu fais ?

Je la regarde droit dans les yeux, en réponse elle soutient mon regard donc je lui dis d'une voix innocente :

— Tu voulais en voir une partie d'après ce que j'ai compris.

— Oui, mais je ne pensais pas que tu te déshabillerais.

— Je retire uniquement ma chemise, pas de panique.

Je m'exécute, elle comptait répondre, mais je la stoppe en posant la chemise blanche sur le bar. Elle observe d'abord le tissu avant de remonter mon bras et sa bouche s'entrouvre quand elle voit mon torse marqué de nombreux traits noirs. Ce sont pour la plupart des sigils de taille et formes différentes, mais le plus impressionnant c'est celui qui longe mes clavicules et qui représente les 4 phases les plus importantes de la lune. Celui qui me permet de décupler mes aptitudes lors de la pleine lune et qui me permet de recharger tous les sigils que je porte. Le regard d'Hestia s'attarde sur celui-là. Je me déplace et passe de l'autre côté du bar pour me retrouver à côté d'elle. Elle suit tous mes mouvements du regard. Je me mets dos à elle pour qu'elle voie l'étendue des dessins. Je suis surpris quand je sens ses doigts passer sur mon biceps, juste en dessous de la cicatrice toute récente qui s'y trouve. Je me tourne à nouveau vers elle et elle demande :

— Tu t'es fait ça quand ?

Je serre les lèvres avant de répondre :

— Tout à l'heure ton frère nous a rattrapés, il sait utiliser une épée...

Ses yeux s'écarquillent de compréhension. Elle hoche la tête, son regard se voile et paraît plus lointain. Je la laisse tergiverser quelques secondes avant de poser ma main sur la sienne. Elle revient et m'observe en fronçant les sourcils.

— Mon frère doit m'en vouloir. Je l'ai d'abord laissé seul là-bas et maintenant je change de camp...

Je vois qu'elle s'en veut. Je voudrais pouvoir la réconforter, mais je suis nul, je ne sais pas comment faire ça, je suis un homme d'action. Alors j'attrape ma chemise, prends ses deux mains et lui dis :

— Aller, lève-toi, on va t'offrir ton premier tatouage si tu veux.

Je lis de l'incompréhension dans son regard puis de la joie. Elle me sourit et hoche la tête. Je la guide vers la sortie en laissant nos verres, la bouteille de vin et toutes les émotions négatives que l'alcool a pu réveiller.


Le Joyau de Nostraria, Tome 2 : Le secret de l'autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant