Chapitre 53

1.5K 132 21
                                    

Ça fait deux semaines qu'Éros est mort. Je ressens douloureusement son absence.

Deux semaines que nous avons quitté la montagne du dragon.

Deux semaines que le petit groupe se remet de ses blessures physiques ou psychologiques. J'ai laissé le choix à chacun de rejoindre le camp qu'il souhaitait. Logiquement Ayden et Eryk ont décidé de rentrer en Edryae avec moi, Mélya n'a pas hésité une seconde pour nous suivre. Gaspard m'a assuré que son allégeance allait à Éros et qu'après sa disparition il décidait de se mettre au service de l'âme sœur du prince, c'est-à-dire moi. Léandre a eu l'air tiraillé, il était encore bouleversé par la trahison de Cléo, c'est pourquoi il a choisi de venir en Edryae malgré ses réticences. J'ai dû lui spécifier qu'il aurait interdiction de porter des armes et d'émettre des propos négatifs envers la couronne d'Edryae, ce qu'il a accepté. Après ceci je me suis tournée vers Wôeneques, je lui ai proposé de venir en terre édryenne avec moi, il a décliné mon offre. Je me remémore notre dernière conversation.

— Tu es sûr de vouloir rester ici ?

— Cette forêt est ma terre et je connais le chemin pour rentrer chez moi.

J'avais retiré l'un des trois poignards de ma ceinture et lui avait tendu en disant :

— Tu seras seul, alors prends-le, c'est un cadeau pour te remercier de ton aide durant ce périple.

Il avait ri en acceptant mon offrande avant de retrouver son sérieux et de me prendre les mains.

Almarëatári, sache qu'à ce jour toi et ton pays pouvez compter sur moi ainsi que sur mon peuple si tu as besoin d'aide.

— Je ne suis pas sûre que tu sois en mesure de créer une alliance avec l'Edryae.

Il avait gardé son sérieux et son port de tête haut avant de continuer avec un regard malicieux.

— Au contraire, j'en suis plus que capable.

— C'est-à-dire ?

— Tu sais ce que signifie mon nom dans ta langue. C'est parce que je suis le fils d'une rumeur. Je suis le fils du roi fae unseelie.

— Quoi ? Tu es un prince ?

— Je l'étais, il y a bien des années, mais depuis la mort de mon père je suis le roi du peuple des Faes unseelies.

Cette information aurait dû me choquer, mais ça n'avait pas été le cas. Je me souviens m'être dit que ce rôle lui convenait parfaitement. Je me souviens aussi que pour pallier la douleur ressentie suite à la mort d'Éros j'avais mis mes émotions en sourdine. Peut-être que quand je m'autoriserai à ressentir à nouveau quelque chose cette révélation me semblera insensée. Finalement, Wôeneques m'avait juré de me rendre mon poignard la prochaine fois qu'on se verrait et nous avions créé une alliance entre le peuple des faes unseelie et l'Edryae. Quand Ignace l'a appris, il n'en revenait pas, les unseelies n'ont jamais créé d'alliance avec quiconque. Cette action politique l'a convaincu que j'étais faite pour régner.



Je suis assise sur les marches du château, l'hiver arrive. Il fait froid, je ne peux plus mettre le nez dehors sans un manteau. Le ciel est gris. Il reflète mon état actuel. Je me sens triste. J'observe Fëanáro, il joue dans les feuilles mortes. Depuis que je me suis écroulée après la bataille en bas de la montagne, il me suit comme mon ombre. Après que je me sois allongée pour intégrer une réalité dans laquelle Éros n'existe pas, il s'était allongé à côté de mon bras et depuis, il ne m'a plus lâché.

Le Joyau de Nostraria, Tome 2 : Le secret de l'autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant