Chapitre 46

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Lui c'est l'un des dragons de la gloire d'antan. Tu as réveillé un vrai dragon. J'ai du mal à assimiler les propos de Wôeneques. Pour moi les dragons à la taille de mouton sont de vrais dragons, mais je comprends où il veut en venir. Le dragon qui se cache dans mes cheveux deviendra comme l'un de ces dragons à qui appartiennent les ossements qui nous entourent. Je regarde les os du dragon énorme à côté de moi, puis le crâne qui sort de l'eau et je lève la main vers la petite chose sur mon épaule. Il cale sa tête contre contre ma paume comme pour réclamer une caresse que je lui octroie. Je sens ses écailles qui ont l'air épaisses, mais elles sont aussi douces que du velours.

— On devrait peut-être le laisser ici, je lance à la volée.

— Oui, c'est préférable.

C'est Cléo qui vient de parler. Elle me regarde mi-terrifiée, mi-compatissante. Je hoche la tête et déloge le petit animal pour le poser au sol. Tous me regardent avec appréhension. Je sais que ce sont des bêtes dangereuses, mais je ne peux pas le descendre autrement qu'en le prenant dans les bras. Une fois sur le sol, le dragon s'assoit face à moi et m'observe. Je ne sais pas trop quoi faire, si ce n'est faire comme si je gérais la situation. Éros me regarde, il est encore dans le mouvement qu'il avait esquissé pour me rejoindre avant de voir la bête se cacher dans mes cheveux. Je lève la tête aussi haut que le ferait un membre de la famille royale... Ce qui ne saurait tarder vu mon nouveau statut d'héritière de l'Edryae.

— Bon, on continue ! On a un artefact à trouver.

Je me retourne sans avoir leurs réponses et observe les différents ossements en cherchant un objet potentiellement magique ou une porte. J'entends Ayden marmonner :

— En espérant que ça ne soit pas l'œuf qui vient d'éclore, l'artefact.

Je me retourne et lui lance un regard exaspéré.

— Rends-toi utile et dis-nous s'il y a de la magie fae ici plutôt.

Il lève les yeux au ciel en répondant :

— Je vais essayer d'omettre toutes celles que tu viens d'utiliser dans ce cas-là.

Il ferme les yeux et inspire profondément. L'un des tatouages sur son biceps gauche s'illumine légèrement et une fumée grise s'en échappe. Ses yeux argentés se rouvrent et il annonce :

— Pas dans cette pièce, mais plus bas dans la montagne je sens quelque chose vibrer. Il doit y avoir une porte avec des escaliers...

— On aurait pu nous prévenir que le chien d'Ignace savait sentir la magie fae, annonce Éros avec un regard féroce porté sur Ayden.

— Je ne suis plus seulement le chien du roi, aujourd'hui.

Ayden me regarde avant de poser les yeux à nouveau sur Éros en souriant de toutes ses dents.

— Qu'est-ce que tu sous-entends ?

— Que je pourrais te faire ravaler tes remarques insultantes à mon égard en quelques mots. Que je pourrais faire voler ton petit monde en éclat si je le souhaitais... Il fait une pause avant de poursuivre. En fait, je devrais, tu le sauras bien assez tôt.

Je sais ce qu'il veut dire et je dois l'en empêcher.. Heureusement, Eryk me devance :

— Je pense qu'au lieu de nous emporter, nous devrions poursuivre la recherche de l'artefact.

Éros n'a pas quitté Ayden du regard. Il reste aussi nonchalant que d'habitude, mais je perçois une lueur meurtrière dans son regard, il dit d'un ton égal :

— J'aimerais qu'il poursuive. Il recule et se place dans une position détendue. Ayden, tu veux divertir le prince de Nostraria avec les quelques mots censés faire voler mon petit monde en éclat ? Vas-y.

Il ne croit pas qu'Ayden puisse avoir une information si déroutante qu'elle pourrait l'anéantir. Ayden sourit.

— Tu sais quoi j'ai deux annonces à te faire. Je vais t'en donner une... Tu n'aurais jamais dû exister, la reine Aya n'était pas destinée au roi Horos... Elle est l'âme sœur d'Ignace et toute sa vie n'a été que malheur avec ton père, un homme qui ne l'aime pas et qui l'a empêché de vivre avec son âme sœur.

Éros se redresse et fait un nouveau pas en arrière, mais pas aussi confiant que précédemment. On dirait qu'il vient de prendre une flèche dans l'épaule. Il fronce les sourcils et affirme :

— Tu mens.

Je sais que sa mère est importante pour lui. Elle est la seule personne qui lui a offert de l'amour quand il était enfant. Son père était tout sauf un homme bon. Je pense qu'il s'est persuadé au fil des années que la reine Aya était heureuse malgré les signes évidents de souffrance chez elle. Son monde s'effondre. J'essaie de m'approcher de lui, mais il a déjà repris son air hautain et dit simplement :

— Trouvons ses escaliers pour aller au cœur de la montagne.

Ayden ne sourit plus, il sait qu'il a blessé Éros et même s'il le déteste, il doit quelque peu s'en vouloir. En passant à côté de moi, il chuchote :

— La prochaine fois qu'il m'exaspère ou insulte notre roi, je ne suis pas sûr de tenir ma langue sur notre secret.

La voix de Léandre m'empêche de réfléchir plus à cette annonce qui ressemble à une menace.

— Ici ! Il y a un escalier.

Mon frère est tout au fond de la salle avec Cléo. Ils se sont éclipsés quand Éros et Ayden ont commencé à s'emporter l'un contre l'autre. Je prends la direction de la voix de mon frère quand Gaspard me dit d'une voix hésitante ou pointe l'affolement :

— Hestia, derrière...

Je me retourne et remarque que le petit dragon est toujours là et qu'il me suit... Je souris intérieurement. Je ressens un lien avec l'animal que je ne saurais expliquer. J'annonce d'un air détaché :

— Qu'il nous suive s'il le souhaite. Je regarde Gaspard dans les yeux. Tu te crois capable d'empêcher un dragon de faire ce qu'il veut ?

Gaspard baisse les yeux. Je me tourne vers les marches. Un poids s'abat sur mon épaule droite, j'aperçois dans mon champ de vision le petit dragon assis nonchalamment sur celle-ci et je souris franchement cette fois.


Le Joyau de Nostraria, Tome 2 : Le secret de l'autre mondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant