Chapitre vingt-quatre

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Abigaëlle

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Abigaëlle

Ce sentiment de trahison que je lis dans les yeux de cette enfant me brise le coeur. Être arrachée à sa famille est terrorisant, quand bien même c'est pour sa sécurité, à son âge ce n'est pas de cette façon qu'on perçoit la situation. Je ne le sais que trop bien, cette peur, cette inquiétude, cette colère et cette injustice qu'elle ressent, ça laisse des traces indélébiles à l'âme. Ces interventions sont malheureusement devenues mon quotidien. Chaque jour, ou presque, je me vois dans l'obligation de briser une famille pour la protection des enfants, ce n'est pas simple de voir ces yeux pleins de larmes, d'entendre ces cris de détresse, de ressentir cette culpabilité au fond de soi. Je sais que c'est pour le mieux, que si je dois en arriver à cette décision, c'est pour le bien-être des enfants. Je vérifie, relis, analyse en boucle le dossier avant de retirer un membre d'une famille. Nous faisons des erreurs, parfois irrémédiables, mais nous faisons de notre mieux, chaque cas est traité avec l'importance et l'attention méritée et nécessaire. Mais ça n'empêche pas que le soir, en me couchant, chacun de ces visages innocents me reviennent en tête et remettent en question mes décisions.

Aujourd'hui fait partie de ces journées difficiles. Où l'envie de tout envoyer balader, de tout abandonner pour un quotidien plus simple. Un vendredi qui suit une semaine intense émotionnellement. Je serais d'humeur à rester cloitrée dans ma chambre avec une bonne bouteille et une série dont je connais les répliques par coeur, me soulageant l'esprit de la complexité de mon travail.

Je n'aurais peut-être pas mon verre de vin confortablement installée dans mon lit, mais je compte bien l'avoir malgré tout. En effet, ce soir nous célébrons l'enterrement de vie de jeune fille de la futur femme d'un collègue d'Harry. Enfin, il s'agit plus d'un collègue de Jules, son cousin mais si dans ce métier tout le monde se connaît et se fréquente. C'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai sympathisé avec elle, Suzana. Lorsque j'étais encore en relation avec Chris, nous étions souvent conviés à divers galas, évènements auxquels participent généralement les policiers.J'ai majoritairement passé mes soirées avec les femmes des officiers et enquêteurs plutôt qu'avec Chris, surtout vers la fin de notre histoire, quand plus rien n'allait entre nous. C'était bien plus plaisant pour moi. Toute autre personne n'appartenant pas à la gente masculine était d'une compagnie des plus agréables dans ces événements mondains.

Je suis d'accord pour dire, bien évidemment, qu'on ne met pas tout le monde dans le même sac. Je fais très rarement d'amalgames, les conclusions hâtives ce n'est pas pour moi. Cependant, je ne peux mentir en disant qu'une grande partie des hommes qui travaillent dans le milieu judiciaire ont une façon de penser assez conservatrice, je dirais. Une bande de fossiles vivants, une relique du passé qui résiste à l'évolution, érigeant une forteresse de traditions limitantes autour de leur esprit.

Quoiqu'il en soit, Suzana et son futur mari, Leo, se marient à la fin du mois et ce soir ainsi que demain, avec ses amies et sa soeur, nous célébrons comme il se doit ses derniers instants avant de porter le nom de Leo. J'ai été touchée d'être conviée à ce week-end. New-York est une grande ville, autant qu'il peut être facile de s'y faire des amis, autant que le contraire est tout aussi plausible.

My unfairness' shadowOù les histoires vivent. Découvrez maintenant