Prologue

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10 ans plus tôt

Recroquevillée sur moi-même, les genoux remontés près de ma poitrine et le visage enfoui à l'intérieur de mes bras croisés, je pleure sans pouvoir retenir les larmes qui coulent et mouillent mon jean. Je suis si triste aujourd'hui, si triste d'avoir perdu le seul être qui ne m'a jamais abandonnée, pas une seule fois.

Des bruits de pas me figent. Je me redresse légèrement et aperçois des petites chaussures boueuses juste à côté de moi. Lorsque je relève le regard, je croise celui d'un garçon. Il me tend une brique de jus en me souriant. D'une main tremblante, je m'en empare, puis essuie mes joues avec la manche de mon pull.

— Pourquoi tu pleures ? demande-t-il doucement.

— Je ne pleure pas !

Je détourne le regard et pince les lèvres pour empêcher les larmes de couler.

Le garçon me contourne et replante son regard dans le mien.

— Pourtant, ce sont bien des larmes que je vois.

Il a fléchi les genoux, les paumes de ses mains plaquées au-dessus, et m'observe de ses grands yeux bleu clair magnifiques. Son sourire est si beau, il suffit presque à apaiser les battements de mon petit cœur brisé.

Je renifle bruyamment et essuie mon nez.

— Merci pour le jus, soufflé-je.

Je ne connais pas ce garçon, je ne l'ai jamais vu dans le coin, mais lui aussi semble apprécier ces briquettes souples de jus. Ce sont mes préférées, même si ma mère n'arrête pas de dire que ce sont des « horreurs sucrées et bourrées de produits chimiques ».

— Alors, tu vas me dire pourquoi tu pleures ?

— C'est mon Sky... Il... Il est mort, avoué-je d'une voix tremblante.

— Qui est Sky ?

— Mon corgi, ajouté-je en pleurant de nouveau.

— Un chien ?

Je hoche la tête en essuyant de nouvelles larmes du revers de la main.

— Je suis désolé pour toi.

Ses lèvres se tordent en une légère moue.

— Mon père m'a dit que je ne devais pas pleurer parce que ce n'était qu'un chien. Il n'a pas voulu qu'on l'enterre dans le jardin. Alors je me suis enfuie parce que j'avais envie de pleurer.

— Tu peux pleurer avec moi. Promis, je ne dirai rien. Moi aussi j'adore les chiens.

Son sourire revient étirer ses lèvres. Il a un beau sourire et de très beaux yeux. Quelques mèches de ses cheveux d'un noir intense retombent sur son front en bouclettes brillantes, comme si elles capturaient la lumière du soleil.

— Sky était mon meilleur ami, sangloté-je. Le meilleur des chiens.

Il s'agenouille près de moi et m'adresse un regard doux. Il ne me regarde pas comme tous les autres, lui n'a pas peur de moi.

— Est-ce que je peux te serrer dans mes bras ?

Je fronce les sourcils en clignant des yeux.

— Pourquoi ferais-tu une chose pareille ?

Il hausse les épaules.

— Ma maman fait ça pour me consoler.

Pour le consoler ?

Ça fait longtemps que ma maman ne m'a pas consolée.

— Je veux bien essayer.

Il m'adresse un signe de la tête, puis resserre ses bras autour de mon corps frêle. Il me serre avec force, m'empêchant ainsi de faire le moindre mouvement. Son étreinte est chaude et agréable. Il me laisse assouvir mon besoin de pleurer mon meilleur ami quand même mes parents me le refusent.

Au bout d'un temps infini dans ses bras, mes muscles ont cessé de se tendre et mon cœur opère de nouveau des battements réguliers et calmes.

L'inconnu relâche la pression de ses bras, comme s'il comprenait qu'il était parvenu à me calmer. Il m'adresse un dernier sourire avant de se lever et de s'éloigner sans dire un mot.

— Où est-ce que tu vas ?

— Il faut que je rentre, ma maman m'attend pour le dîner.

Je desserre mes bras et fronce les sourcils.

— Je m'appelle...

— Ne le dis pas, me coupe-t-il en se figeant.

— Mais, pourquoi ?

— Ce n'est pas important, demain je ne serai plus là.

— Et comment je fais si je veux te retrouver ?

— Ma maman dit toujours que si on est destiné à se retrouver, alors on se retrouvera.

Sur cette dernière phrase, il s'éloigne.

Bientôt, l'image de ce petit garçon aux cheveux noirs et aux yeux d'un bleu étincelant disparaîtra de ma vue, sans pour autant jamais quitter ma mémoire.


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Enjoy ❤️

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