Chapitre 48 : Découverte de soi

58 7 18
                                    

Calliope

Réveillée depuis déjà une bonne heure, je reste figée dans mon lit, les yeux rivés sur mon plafond éclairé par la faible lueur de ma lampe. Ma tête est lourde et douloureuse, mais les tourments qui tourbillonnent dans mon esprit me font oublier la souffrance de mes tempes. Même mes aigreurs d'estomac ne sont rien à côté de ce qui se trame dans mon cerveau paralysé par trois petits mots. « Je t'aime ».

Je t'aime. Je t'aime. Je t'aime.

Nous étions tous un peu trop bourrés hier soir. Il a sûrement dit cela dans l'euphorie de l'instant. Je ne parviens pas à l'imaginer réellement tomber amoureux de moi.

Je relève mon buste et m'assois dans mon lit en ramenant mes jambes près de ma poitrine. Ma tête enfouie au creux de mes genoux, je laisse mon esprit torturé divaguer. Le visage de Newton est la seule image que j'y vois. Tout ce qui gravite autour de lui me revient en pleine face. Je sens encore son odeur dans mes sinus, ses doigts sur ma peau, ses lèvres sur les miennes et ses paroles murmurées au creux de mon oreille.

Je t'aime.

J'agrippe mon oreiller et hurle un cri étouffé à l'intérieur pour espérer calmer les soubresauts qui supplicient mon abdomen à chaque fois que je repense à ses mots. Il faut que j'appelle Josh. J'espère qu'il a émergé après cette soirée arrosée, car j'ai besoin de ses précieux conseils. Mon téléphone en main et ma lippe inférieure bloquée entre mes dents, je lance un appel vers mon ami en seulement quelques clics. La sonnerie résonne plusieurs fois dans mon oreille avant de se couper et de laisser filtrer un grognement en guise de réponse.

— Josh, j'ai besoin de toi, soupiré-je.

J'entends son lit grincer et un bruit sourd me vriller le tympan.

— Bordel. Il est quelle heure ? demande-t-il d'un timbre éraillé.

— Dix heures, dis-je en regardant l'horloge.

Il s'éclaircit la gorge en grommelant des paroles incompréhensibles.

— Josh, il m'a dit « Je t'aime », annoncé-je subitement, n'en pouvant plus d'attendre qu'il soit suffisamment réveillé pour m'écouter.

— Quoi ? Qui ça ?

Je lève les yeux au ciel.

— D'après toi ?! Newton, chuchoté-je.

Soudain, Josh étouffe un cri et je l'entends se redresser brusquement dans son lit.

— Il te l'a dit ?! Genre, vraiment ?

— Hm. Enfin, je crois. Franchement, ça me paraît absurde.

Je pose ma joue contre mes genoux remontés et exhale un souffle épuisé en me massant le front. Ces mots lourds de sens ne m'ont été destinés que peu souvent. Joshua est l'une des rares personnes à proclamer son amour à mon égard de manière récurrente. Mamie Elisabeth le fait elle aussi. Hormis ces deux-là, on ne m'a jamais dit « Je t'aime ». D'aussi loin que je me souvienne, je ne me rappelle pas avoir entendu l'un de mes parents déclarer une telle chose. Ou alors, j'ai fini par l'oublier tant ce genre de parole s'est raréfié avec le temps.

— Et toi ?

Je ferme les yeux en me pinçant l'arête du nez.

— Je n'ai rien dit. Je ne savais pas quoi dire. Josh, je suis nulle pour ça.

— Est-ce que tu l'aimes ?

Ce que je ressens pour Newton est si intense, si inédit, si grisant, que je ne parviens pas à mettre de mots dessus. Je n'ai jamais aimé de cette façon. J'aime Josh, j'aime ma grand-mère, mais ils sont ma famille. Newton est... différent.

Face à faceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant