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Point de vu de l'auteur

El Patron pénétra dans la maison, vêtu de vêtements froissés, les cheveux en désordre, un bleu proéminent marquant sa joue. La lumière tamisée de la pièce accentuait les ombres sur son visage, révélant une fatigue écrasante et une angoisse palpable. Mais le plus anéantissant était le regard dans ses yeux. Ses pupilles dilatées, ses sourcils froncés, il semblait implorer silencieusement pour une compréhension qu'il n'osait formuler à voix haute. Il avait l'air tout aussi choqué que ses enfants, comme s'il venait de traverser une épreuve indicible.

Salwa, sa fille, le sentit immédiatement. Leur lien était si fort qu'un simple regard suffisait à révéler les non-dits. En fixant son père dans les yeux, elle savait qu'il ne mentait pas. Pourtant, la douleur et l'inquiétude qu'elle percevait chez lui la pétrifiaient.

Fatna, se précipita vers lui, la panique se lisant sur son visage. Elle posa une main tremblante sur la joue meurtrie d'El Patron, ses yeux s'emplissant de larmes. "Qu'est-ce qui s'est passé ?" Sa voix tremblait, révélant sa peur et son désarroi. Mais El Patron resta silencieux, ses lèvres serrées, incapable de formuler une réponse qui aurait apaisé leurs craintes.

Adil se tenait à l'écart, les bras croisés et le visage fermé. Depuis longtemps, il avait cessé de considérer son père avec respect ou affection. La mort de son ex-femme et la souffrance infligée à leur mère par le divorce avaient érigé un mur infranchissable entre eux. À cet instant, en voyant son père dans cet état pitoyable, il ne ressentait rien d'autre qu'un froid mépris. Mais au fond de lui, tout au fond, une petite voix murmurait à peine quelques mots de compassion qui ont mit un temps fou à arriver à son coeur.

Said ne cachait pas son aversion. Son regard lançait des éclairs de colère et de rancœur. Depuis toujours, il avait eu l'impression d'être un second choix, l'enfant moins aimé, celui que son père avait constamment dévalorisé au profit de sa sœur, Salwa. Voir son père ainsi ne suscitait en lui qu'un sentiment de satisfaction malveillante. En fait, il était presque satisfait de le voir dans cet état. Pour lui, son père a toujours été un homme mauvais qui ne méritait que du mal. D'ailleurs, il ne comprenait même pas pourquoi Salwa avait payé ce pot de vin pour le faire sortir de prison. Il devait y souffrir.

El Patron sentait la tension, palpable et oppressante, qui pesait sur ses épaules. Le stress lui nouait l'estomac, et la peur de perdre la seule personne qui l'aimait encore – sa fille – lui serrait la gorge. Il savait que pour Adil et Said, il n'était plus qu'un souvenir amer, un homme déchu. Mais perdre la confiance de Salwa serait un coup fatal. Elle était son dernier refuge, la seule lumière dans un monde devenu froid et hostile.

Le silence lourd s'installa, entrecoupé seulement par les sanglots étouffés de Fatna. Les regards de ses fils, chargés de jugement, et celui de sa fille, empreint de tristesse et de confusion, pesaient sur lui comme un fardeau insupportable. El Patron se sentait acculé, désespéré. Sa gorge se serra, et il ferma les yeux un instant, cherchant en vain une issue à cette situation désespérante. Mais il restait impassible et froid. Il était hors de question pour lui de flancher. Il ne pouvait pas se permettre d'être faible devant ses enfants.

Pendant un très long moment de silence, il prit le temps de regarder chacun d'entre eux avec des yeux essayant de plaider son innocence malgré tout. Il vit les yeux de ses fils et il savait que pour eux, c'était peine perdue. Mais lorsqu'il regarda Salwa et qu'il vit ses beaux yeux briller de larmes, il ne put s'empêcher de ressentir un pincement au coeur.

Froidement, il s'est dirigé vers les escaliers pour monter dans sa chambre.

A la seconde où il nous a tourné le dos, Said s'est lancé.

Salwa - Bouteille à la merOù les histoires vivent. Découvrez maintenant