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Point de vue de Mehdi

À peine arrivée dans mon second restaurant, que ma manageuse m'a pris la tête.

Farida - Et vous avez un rendez-vous dans 5 minutes aussi. Faut pas oublier qu'on retape les murs aujourd'hui...

Mehdi - en la coupant Me prend pas la tête, c'est bon. Je monte 10 minutes, me dérangez pas.

Farida - Et votre rendez-vous ?!

Mehdi - en souriant Tu l'occupes. La dernière fois que j'ai été à l'heure pour un rendez-vous de ce genre, j'ai rencontré la chienne qui a gâché ma vie

Farida - Votre femme ?!

Mehdi - Elle aurait dû l'être

Elle me regardait le regard vide, sans comprendre que je parlais de Salwa.

Je suis montée à l'étage, chaque marche un exutoire à la colère qui bouillonnait en moi.

Sur la terrasse, j'ai refermé la porte d'un coup sec, le claquement résonnant comme un couperet, tranchant le silence de la nuit.

Je me suis effondrée sur le fauteuil la petite table noire, les bras croisés, la respiration saccadée. Mon regard s'est perdu un instant dans l'obscurité environnante, mais l'agitation intérieure m'a vite rattrapée.

D'une main fébrile, j'ai fouillé dans ma poche, en sortant un paquet de cigarettes. Le carton était froissé, comme moi, abîmé par une journée trop longue.

Un briquet en est tombé, et sans réfléchir, j'ai porté une cigarette à mes lèvres.

Moi, qui n'avais jamais touché à ça, le feu a crépité et, dans un geste automatique, j'ai pris une bouffée.

La fumée âcre a brûlé ma gorge, mais c'était exactement ce qu'il me fallait, une morsure pour étouffer la tempête qui grondait en moi.

Je voyais le soleil briller, j'entendais les oiseaux chanter et j'avais cette bague autour de mon doigts qui liait mon avenir à celui d'une femme qui m'aime et me comprend.

Mais ma frustration et mes nerfs ne pouvait pas tromper les autres et faire croire que j'étais heureux.

Ca me rendait fou de voir que Salwa était de retour, affichant un sourire radieux et profitant pleinement de la vie comme si de rien n'était. Elle semblait épanouie, entourée de ses amis, partageant des moments de bonheur que j'avais pu voir sur les réseaux sociaux sans la moindre trace de remords. Pendant ce temps, je me consumais de l'intérieur, hanté par les souvenirs de notre passé commun.

Elle n'avait pas l'air de se soucier du monstre qu'elle avait façonné. Son indifférence m'énervait, me rappelant à chaque instant que ma souffrance ne signifiait rien pour elle.

J'ai bien pris mes 15 minutes de pause, savourant chaque seconde avec une pointe de satisfaction malicieuse. J'aimais l'idée d'embêter Farida, cette collègue qui semblait toujours avoir quelque chose à redire, et de faire attendre mon rendez-vous aussi. Je savais que ce petit contretemps les agacerait tous les deux, et cela me faisait sourire.

Après avoir terminé mon café, je me suis levé, jetant un dernier regard à l'horloge pour m'assurer que ma petite vengeance avait bien duré. Puis, j'ai pris une profonde inspiration et commencé à descendre lentement les escaliers, un pas à la fois, profitant de chaque instant supplémentaire de suspense.

Alors que je m'approchais du bas de l'escalier, mon cœur battait plus fort, l'anticipation grandissant. Les escaliers en colimaçon offraient une vue limitée, et ce n'est qu'après avoir descendu quelques marches de plus que j'ai enfin pu voir la personne qui m'attendait.

Salwa - Bouteille à la merOù les histoires vivent. Découvrez maintenant