Salwa - Bouteille à la mer

54

Après quatre mois d'absence, j'avais enfin pris la décision de reprendre ma vie en main et de sortir de mon lit.

Durant ces quatre mois, je n'avais reçu aucune nouvelle de Mehdi. Rien. J'avais même tenté de lui envoyer un message, mais en vain.

J'ai décidé d'accepter mon sort et de tourner la page. Et pour cela, rien de mieux que d'occuper mon esprit. Quoi de plus efficace que de se consacrer au travail ?

Je fis mon retour telle la véritable bad bitch que je pense être.

Je portais un short en jean bleu déchiré et un top kaki, laissant mes épaules nues. Mes cheveux, parfaitement bouclés grâce à un brushing méticuleux, étaient éclaircis par un subtil balayage miel qui adoucissait mon allure. Mon maquillage, élaboré avec soin, soulignait les traits de mon visage. Il était impératif de leur montrer la meilleure version de moi-même.

Je devais me résoudre à exceller dans ce que je maîtrisais le mieux : faire semblant.

Cependant, en franchissant la porte d'entrée, la première scène qui frappa mon regard fut celle de ma chauffeuse et livreuse, harcelée sans relâche par les autres membres du personnel.

La grosse, vous vous souvenez ? La scène était d'une cruauté.

Chauffeuse - Arrête tout de suite ce que tu fais, sinon...

Serveur - TU VAS FAIRE QUOI ?! ME MANGER ?

Chauffeuse - JE VAIS TOUT DIRE A MONSIEUR RYAD

Serveur - en rigolant Mais bichette, t'as oublié que c'est toi qui mange nos glaces au cookie ! A cause de toi, on a plus de stock et on se fait touuuuus punir juste parce que TU n'arrives pas à contrôler tes pulsions

Chauffeuse - en ayant les larmes aux yeux PARCE QUE J'AI MANGÉ UNE GLACE UNE FOIS, ON CROIT TOUT DE SUITE QUE J'AI VIDÉ LES STOCKS ?!

Ryad - en arrivant dans la scène ET CA SUFFIT MAINTENANT, ON ARRÊTE DE CRIER. ON EST AU TRAVAIL, PAS AU ZOO ALORS VOUS ALLEZ NIQ... Salwa ?!

Avec un grand sourire, montrant que je ne comprenais pas ce qui se passait, je les ai tous regardés. Ils se sont immédiatement calmés et se sont rangés en ligne, l'un à côté de l'autre. On aurait dit une scène tout droit sortie de la Corée du Nord.

Ryad - en leur faisant signe Aller dégagez d'ici. Chacun reprend son poste et le premier que j'entends broncher sera viré

Tout le monde quitta les lieux, nous laissant, Ryad et moi, seuls dans cette grande pièce au décor futuriste et épuré, baignée par la lumière tamisée des lampes design.

Il restait silencieux, fixant obstinément le sol, et évitait de me regarder. Ses bras croisés sur sa poitrine, serrés comme une barrière, exprimaient clairement qu'il n'était pas ouvert à la discussion.

Je me souvenais de notre dernière rencontre, marquée par une dispute intense. Il avait claqué la porte en partant, déterminé à démissionner.

Mais la nuit où Amir m'a gravement blessée, j'avais envoyé un message de détresse à Ryad. Il ne l'avait pas bien compris au départ, pensant à une exagération. Mais lorsque mes réponses cessèrent, il s'inquiéta et accourut chez moi.

Là, mon père, le visage grave, lui expliqua toute la situation. Ryad prit alors la décision de reprendre la gestion du Concept Store pendant mon absence.

Durant ces quatre derniers mois, il avait tout géré à la perfection. Les stocks étaient toujours remplis, les clients satisfaits, les employés motivés. Les affaires prospéraient et l'argent affluait sur mon compte sans le moindre accroc.