Hannah, tome 3 ~ Les tourments de nos âmes

Visite du père de Katlyn

Soudain, quelqu'un toqua violemment à la porte. Ils sursautèrent, échangèrent un regard, puis Katlyn se leva et se dirigea vers la porte. Inquiet, Rahim la suivit silencieusement laissant en plan son assiette remplie.

- Non !... souffla sa sœur avant de se laisser glisser au sol, pâle comme un linge.

- Kat ! Qu'est-ce qu'il se passe ?! chuchota-t-il en s'accroupissant à côté d'elle.

Elle tourna vers lui un regard apeuré, vacillant, rempli de larmes.

- C'est papa... lâcha-t-elle dans un murmure.

Ce fut à son tour de blêmir. Il savait que leur géniteur était là pour lui, parce qu'il avait fugué pour retrouver sa sœur. Et il savait aussi que quoi qu'il dirait, la faute retomberait sur Katlyn.

Les coups reprirent, encore plus forts, plus violents. Tremblants, ils se serrèrent l'un contre l'autre, refusant d'accepter la réalité. C'était la première fois qu'ils s'avouaient ainsi leur peur tout en se soutenant.

Bientôt, ce ne furent plus seulement des coups mais aussi des cris. Leur père ordonnait à Katlyn d'ouvrir, affirmant savoir qu'elle était là. Puis, constatant que cela n'avait pas plus d'effets, il se mit à la menacer de tout ce qu'il lui passait par la tête.

Au bout de quelques instants, Katlyn se redressa, échappant à l'emprise de son petit frère, et se rapprocha de la porte.

- Kat, non ! la supplia Rahim à voix basse.

- Il ne partira pas avant de t'avoir retrouvé, qu'est-ce que tu veux que je fasse ?! chuchota-t-elle furieusement, les larmes aux yeux.

- Mais si on ne lui répond pas, il finira bien par partir !

- Ram, j'ai des voisins qui ne méritent certainement pas d'avoir leur nuit gâchée par ce fou furieux !

- Donc tu préfères préserver tes voisins plutôt que ton petit frère ?

Désespéré, Rahim tentait sa dernière carte. Il ne voulait pas repartir avec son père. Celui-ci avait beau l'adorer et bien le traiter, il ne le voyait que comme une carte de plus pour son succès, un trophée à exhiber.

Katlyn le fixa longuement, sans plus se préoccuper du vacarme provoqué par leur géniteur. Elle avait conscience de ce que vivait Rahim, sans réellement le comprendre. Elle n'avait jamais été le trophée, plutôt la tâche qui le ternissait. Mais elle comprenait ce désir de fuir. C'était grâce à lui qu'elle s'était sortie de cet enfer.

- Je te préfère au monde entier petit frère, murmura-t-elle.

Puis elle ouvrit la porte. Pris par son élan pour frapper la porte une énième fois, son père ne put – ou ne voulut ! – pas s'arrêter. Son poing rencontra la joue de sa fille, la faisant reculer de quelques pas. Loin de s'en émouvoir, il en profita pour entrer et refermer derrière lui.

- Je vois que tu ne connais toujours pas la politesse, sale rat, cracha-t-il à Katlyn.

La tête baissée, ses cheveux recouvrant son visage, celle-ci ne bougea ni ne répondit. Sa joue la tiraillait furieusement, et ce malgré ses tentatives de l'apaiser avec sa main.

- Ah, et voici donc là où tu te caches depuis deux mois ! Un taudis, je n'en aurais pas attendu plus de toi.

Elle serra le poing, se contint. Elle avait envie d'éclater en sanglots, de lui hurler à la figure qu'il n'avait rien à lui dire, qu'elle en était là uniquement à cause de lui. Mais elle ne pouvait pas. Elle n'avait jamais pu se rebeller.

- Ah, Rahim ! s'exclama son père en apercevant son frère assis par terre. Qu'est-ce que tu fais là, voyons ? Lève-toi mon grand !

Se sentant douloureusement trahi par sa sœur, assommé par la scène à laquelle il venait d'assister, il ne bougea pas. S'il avait l'habitude de voir Katlyn se faire rabaisser, c'était la première fois qu'il la voyait se faire frapper. Tout son corps tremblait, non seulement de peur mais aussi de colère.