Doutes et indécisions ne font pas bon ménage

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Quand on pensait fortement à quelqu'un, la personne se manifestait dans l'heure. Elle n'y avait jamais cru, à ces conneries. Ces derniers jours, elle avait vu son avis prendre une direction opposée. Une rockstar célèbre qui appelait à l'agence pour pouvoir la joindre. C'était tout simplement du délire. Elle se passa de l'eau sur le visage comme pour chasser les pensées irrationnelles qu'elle sentait pulluler dans son esprit. C'était tellement illogique que cela sonnait faux. Accepter une invitation d'une personne à qui l'on ne refusait rien ? Mais que lui arrivait-il ! Où étaient passées ses belles valeurs qui lui interdisaient de faire un pas devant elle sans se méfier ? Elle frotta vigoureusement son visage dans la serviette comme si elle voulait se punir de sa bêtise. Quelle sotte ! Elle inspecta ce visage à présent rougi dans la glace. Elle refusait de faire comme toutes ces groupies illuminées qui s'imaginaient être uniques dans l'esprit d'une star. Que croyait-elle exactement ? Elle n'était pas dupe.

- Sympa ton appart, fit Ma.

Ma était sa meilleure amie. Si elle était sa meilleure amie, c'était qu'elle ne s'entendait qu'avec une seule personne lorsqu'elle était étudiante : Ma. Et elle avait gardé un contact à la fois privilégié et précieux avec elle.

- Je veux dire, pour une nana qui bosse dans une agence immobilière, c'est pas mal.

- Ca pourrait être encore mieux, marmonna-t-elle, de mauvaise humeur.

- Dis-moi ce qu'il se passe.

Ma avait cette voix apaisante et ce don agaçant pour deviner quand ça allait mal. C'était un vrai radar ambulant.

- Rien du tout, justement.

Les sourcils de Ma se transformèrent en deux arabesques tordues.

- Tu as dépassé l'âge de l'adolescence, j'attends une réponse bien plus satisfaisante que celle-ci.

Elle soupira. Ca lui faisait une belle jambe de fréquenter quelqu'un à qui rien n'échappait !

- C'est à cause de ce type...

Elle avait vaguement évoqué M.M sans révéler son identité. En plus d'avoir des sourcils incroyablement mobiles, Ma avait la langue bien pendue.

- Ah la petite célébrité, là !

- Oui... je me demande bien ce que...

- Si tu en parles, c'est que tu le sais.

Ma était parfois rassurante.

- Il cherche à être proche de moi je crois. Pour une raison que j'ignore.

- Les hommes ont toujours la même raison en tête. Sache-le.

Son amie avait insisté pour rentrer chez elle et ne pas passer la nuit dans la chambre d'amis.

Aussitôt que Ma avait passé l'encadrement de la porte d'entrée, elle s'était mise à écrire à une vitesse diabolique, même si elle tombait de fatigue. Elle avait besoin de penser à une histoire fictive pour oublier celle qui naissait dans sa tête à chaque fois qu'elle se mettait à penser à ... Les mots s'entortillaient au bout de ses doigts et cela empêchait son ventre de faire des bonds inutiles. Elle s'endormie quelques minutes sur son bureau- ou plutôt la table surchargée qui lui servait de table de travail -et se réveilla avec une sensation de vide. C'était toujours comme ça, quand une amie la quittait. Une sensation de solitude lancinante et un vif sentiment d'abandon. C'était idiot. Elle s'attachait trop rapidement aux gens. Alors elle avait décidé de réduire son cercle de relations parce qu'elle avait peur qu'on la laisse là, plantée au milieu de nulle part. Qu'on se rende compte qu'elle avait besoin de sa solitude comme de l'eau courante et qu'elle avait besoin d'être entourée de la même façon. Qu'on réalise qu'elle était chiante. Elle s'étendit sur son lit et resta éveillée pendant quelques heures avant de tomber dans les bras de morphé.


The unspeakable story(Marilyn Manson)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant