The unspeakable story(Marilyn Manson)

He and She

***

Elle avait le cœur en fête. Un feu d'artifice s'insinuait dans son ventre et dans sa tête. C'était si fort qu'elle craignait d'exploser d'allégresse. Il lui disait l'aimer. Dans ses pensées, la voix tranquille et chaude de M. prononçait à l'infini ces trois petits mots. Il l'aimait. Elle l'aimait aussi. Aussi étrange que cela puisse paraitre, elle s'était attachée à ce grand être marginal au point qu'elle ressentait des sentiments d'une nature nouvelle. Des frissons dans le ventre qu'elle n'avait plus sentis depuis des années. Peut-être ne les avait-elle jamais vraiment ressentis auparavant, d'ailleurs.

Il l'avait embrassée. Encore. A ce moment-là, elle pensait qu'ils allaient le faire. Enfin. Qu'ils allaient être plus proches qu'ils ne l'avaient jamais été. Que leurs corps allaient entrer en communion. Qu'elle allait encore plus le sentir. Mais non. Ils avaient passé la fin d'après-midi à se tenir la main et elle s'était blottie contre lui comme pour se protéger du monde entier. C'était si rassurant. Un de ces moments qu'on a envie de retenir de toutes ses forces avant qu'il ne s'évanouisse à jamais. Il avait été remarquable. Il avait eu maintes fois l'occasion de se rapprocher d'elle d'une façon plus extrême mais il ne l'avait pas fait. En parfait gentleman. Comme s'il attendait. Elle ne savait quoi. Peut-être un moment encore plus qu'opportun. Elle tenta de stopper le flot de ses pensées et de retrouver ses esprits. Mais en vain. Jamais elle ne les retrouverait à nouveau. La voix de Ma retentit dans sa tête, sans qu'elle ne l'y ai invitée :

' C'est une star qui a mauvaise réputation. C'est un briseur de cœur'.

Ses entrailles dansaient la conga, mais elle n'était pas totalement heureuse. C'est ce qui avait permis à Ma d'étendre sa toile dans son esprit. Elle ne voulait pas faire d'erreur. Quelque chose manquait. Comme une touche de couleur dorée dans une toile de Vermeer. Elle y croyait sans vraiment y mettre son âme. Puis elle repensa aux paroles de M.M :

- Je veux que tu viennes avec moi. Je veux que tu sois avec moi lors de ma tournée.

Elle avait d'abord pensé à décliner l'invitation tout en brûlant d'envie de répondre par l'affirmative. Elle avait dit peut-être. Elle sourit en pensant à la réaction de son boss quand elle demanderait quelques jours de congés payés supplémentaires. Elle ne pensait plus aux paroles de Ma. Elle ne pensait qu'à lui.

- Je ne veux plus vivre loin de toi. Je veux qu'on soit tout près. Tout proches.

Peu importait ce que disait Ma. Elle restait sur ses gardes, et elle était persuadée des sentiments de M. à son égard.

Chacune des cellules de son corps chantait ses louanges. Ses veines éclataient d'adrénalines. Son cerveau était irrigué d'étincelles. Elle ne voulait pas que cela s'arrête. Comme une drogue.

***

Tout ce qu'il pensait auparavant, toutes ses prérogatives se trouvaient bouleversées. Ses à priori avaient volé en éclat. Et s'il avait vraiment trouvé une femme magnifique qui n'était pas totalement cinglée ? Cela semblait irréel, inaccessible. Il tenta de détourner ses pensées et de songer à sa tournée tardive. Sans ce retard inattendu, il n'aurait jamais fait plus ample connaissance avec la jeune femme. Il avait voulu penser à autre chose, mais c'était raté, visiblement. Il soupira et façonna le visage du manager bouledogue dans son esprit. Il l'avait appelé, ce jour-là. Cette voix qui laissait deviner des crocs acérés l'avait ulcéré. Il détestait tout ce qui pouvait le ramener à cette réalité qu'il détestait.

' Il va bien falloir que je fasse cette tournée, je suis artiste avant tout' tenta-t-il de se raisonner.

Et il fallait bien qu'il se prépare à une éventuelle déception. Elle ne pourrait peut-être pas venir pour cette tournée. Il essaya d'étouffer cette part de lui-même qui lui murmurait que ces quatre petites semaines allaient être insupportables sans elle à ses côtés.

***

Le boss sortait d'un énorme container, ses cheveux châtain clair plaqués par l'huile contenue dans les poubelles. Ses petits yeux bleu vif étaient réduits à deux fentes parfaitement symétriques. Son teint était rougeau comme s'il avait vidé d'un trait plusieurs bouteilles de liqueur. Elle ne savait pas comment le regarder dans les yeux car ses globes oculaires avaient disparus. Elle se contenta de fixer la face rouge en se demandant pourquoi il était si en colère. Certainement parce qu'il sortait d'une poubelle. D'ailleurs, qui l'y avait mis ? Elle ne se souvenait pas d'avoir jeté ça lorsqu'elle avait descendu ses ordures.

- Vous vous trompez sur toute la ligne ! Gronda le boss avec une voix qui semblait extérieure à son propre corps.

Elle le regarda sans comprendre, voulu protester, mais aucun son ne sorti de sa bouche.

- Vous vous trompez sur toute la ligne, répéta-t-il en rugissant.

Elle émit un minuscule chouinement qui ressemblait à celui d'une souris prise au piège.

- Se mettre avec ce genre de gars, enfin ! Vous n'avez pas une once de bon sens !

Elle resta silencieuse. Sa gorge à elle était en feu alors que c'état lui qui hurlait à s'enrouer la voix.

- Et en plus vouloir prolonger ses congés pour partir avec une rock star qui vous laissera tomber à la première occasion ! Vous vous comportez comme une adolescente égarée !

Le boss se mis à planer et à s'élever au-dessus des décombres de maisons, les cheveux toujours aussi huileux.

- MAIS QUE LUI TROUVEZ VOUS EXACTEMENT ?

Elle émit un autre petit couinement.

Il allongea une main dans sa direction. Il dit quelque chose dans sa barbe qu'elle ne pu entendre. Il se rapprochait terriblement. Au fur et à mesure qu'il se rapprochait, elle senti les relents d'une eau de cologne bon marché. Elle entendit enfin :

- Vous devriez être avec moi.

Elle recula d'un grand pas pour ne pas qu'il ne l'atteigne. Elle n'avait aucun contrôle de ses jambes.

- VOUS DEVRIEZ ETRE AVEC MOI ! Hurla-t-il à s'en comprimer les poumons

Elle senti son haleine faite de menthol et de cannelle avant de se réveiller en sursaut. Le lendemain, elle reverrait son boss et son ancienne vie de travailleuse immobilière