Fahën

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  Syrah sauta sur ses pieds, elle manqua de trébucher sur une racine et bouscula Zaïra et Vagha au passage. Le contraste entre son enveloppe astrale si légère et son corps actuel plus dense lui donna quelques secondes le tournis. Elle s'appuya sur le tronc pour reprendre ses esprits. Le contact rêche de l'écorce l'aida à se reconnecter avec la réalité. Elle s'élança à travers les bois.

Ses anim'âmes la suivirent après un instant d'incompréhension, ne sentant aucun danger à l'horizon, il ne saisissait pas la précipitation de leur sœur d'âme.

À aucun moment, Syrah ne douta de la véracité de sa vision, elle avançait rapidement, le parcours lumineux encore imprimé sur sa rétine.

Non loin de là, un jeune homme dans une cage pendait piteusement au bout d'une chaîne.

La clairière s'ouvrit bientôt devant eux.
En découvrant l'incongruité de la scène, Zaïra et Vagha marquèrent un temps d'arrêt.
L'anim'âme renard, quant à lui, devint complètement hystérique à la vue du gigantesque tigre sibérien.
Son compagnon d'âme releva sa tête crasseuse de ses genoux et eut la même réaction de panique. Il croisa les mains dans une position de protection parfaitement dérisoire, il s'écria :

– Je suis vraiment désolé. Je ne le referais plus jamais de ma vie. Je le jure. Ne me faites pas de mal, je vous en prie. J'avais simplement besoin d'un peu d'argent. Je vous en supplie, soyez clémente, maîtresse prédatrice. Je vous en conjure.

Syrah se retourna d'un coup, prête à devoir affronter un des limiers de Lord Voluris. Elle constata bien vite qu'elle était seule dans la clairière avec le garçon et leva un sourcil interrogatif dans sa direction.
Le malheureux lui jetait un regard implorant.

Elle comprit alors qu'il ne s'adressait à nul autre qu'elle-même. Ayant aperçu Vagha, il en avait conclu qu'elle était une prédatrice et, d'après son plaidoyer, elle supposa qu'il avait déplu à certains seigneurs, ce qui expliquait sa position pour le moins inconfortable.

La méprise était concevable, mais elle ne put s'empêcher de se sentir offensée : mis à part son anim'âme, tout criait pourtant en elle qu'elle était une herbivore, sa tenue rapiécée maintes fois, ses cheveux emmêlés...

Elle soupira d'exaspération et fit craquer ses doigts :

– Je ne suis pas venue te tuer, je suis ici pour te libérer. Et je ne suis pas une prédatrice. Maintenant si tu veux bien arrêter de bouger dans tous les sens, tu blesses l'arbre.

Le garçon stoppa ses gesticulations et l'observa, interdit.
Syrah choisit de l'ignorer pour se concentrer sur sa prison :
Les lourds maillons de métal rouillé se terminaient par une corde solidement attachée autour du chêne. Elle entreprit de la desserrer.

Le jeune homme la regardait faire, plein d'espoir :

– Qui êtes-vous donc alors, noble dame ? Une guerrière errante ? Une prêtresse ?

Le chanvre tressé écorchait les doigts de Syrah et le lien ne semblait pas décidé à céder la moindre parcelle de terrain. La voix déformée par l'effort, elle répondit les dents serrées :

– Rien de tout cela. Et je ne suis certainement pas non plus une noble dame.

Une goutte de sueur perla sur son front, la corde était tellement tendue qu'elle ne bougeait pas d'un pouce et dans l'émotion de son départ, elle n'avait rien pris de coupant dans son sac.

– Et bien, voilà donc une bien mystérieuse rencontre. Je suis Fahën Zan Elsten. Apprenti couturier de la glorieuse cité de Lord Voluris, déclara, plein d'emphase, le jeune rouquin, qui se fendit d'une courbette.

Symbiose - La porteuse d'âmesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant