Les geôles de la cité

5.8K 678 50
                                    


La tête de Syrah heurta avec rudesse le sol de pierre et un goût ferreux envahit sa bouche.
La porte de la prison grinça dans ses gonds et le bruit métallique de la clé qui scellait sa cellule résonna dans ses oreilles.

De rage et de désespoir, elle frappa le dallage de ses poings serrés jusqu'à se faire mal. Le dos de ses mains se couvrit de coupures et elle contempla le sang qui en perlait doucement.

Elle se releva ensuite et essuya la poussière et les salissures sur son pantalon élimé.

L'odeur de putréfaction qui régnait en ses lieux la prenait à la gorge, cette puanteur mêlée à sa frustration l'empêchait de respirer profondément.
Elle ne trouva nulle part ses anim'âmes, mais elle pouvait sentir l'affolement de Zaïra et la fureur de Vagha. Ils étaient là quelque part, aussi captifs qu'elle.

Un grand abattement succéda à sa colère : son voyage s'arrêtait ici, elle ne reverrait jamais sa famille. L'image de sa jeune sœur s'imposa à elle. Elle l'imagina qui courait à travers les champs, comme elle l'avait souvent vu faire. Son visage se détachait dans la douce lumière du soir et en arrière-plan ses parents se tenaient par la taille... Syrah s'arracha à ce souvenir nostalgique. L'abattement cédait de nouveau sa place à la haine dans un cycle infernal : elle essuya rageusement une larme qui perlait au coin de son œil et explora les environs du regard.

Le maigre éclairage du couloir lui permettait d'apercevoir Fahën dans la cellule d'en face.
Elle s'approcha doucement des barreaux et voulut allonger le bras à travers, mais quand elle les frôla un vif éclair bleu sortit du métal et électrocuta la jeune femme.

Elle poussa un cri de douleur et recula de plusieurs pas.

– Noble dame ? Vous allez bien ? S'enquit Fahën qui se releva du sol où il était assis.

Syrah contempla son avant-bras gauche où s'étalait à présent une longue zébrure boursouflée. La sensation de cuisson était toujours bien présente. Maintenant qu'elle tendait l'oreille, elle percevait un léger bourdonnement qui s'échappait de la grille :

– Je crois oui... Cette...

– C'est de l'électricité, noble dame. Les lords prédateurs ont interdit son usage au peuple, mais ils s'en servent pour diverses choses, comme pour nous empêcher de nous approcher des barreaux, à priori. On dit qu'avant la vengeance de Gaïa tout le monde utilisait cette énergie et qu'elle était même la base de la technologie avec le pétrole.

– Le pétrole ? C'est ce qui fait avancer les voitures n'est-ce pas ?

– Exactement noble dame. Ça aussi les seigneurs s'en réservent l'exclusivité.

Syrah resta pensive, si elle ne pouvait même pas s'approcher de la sortie sans finir rôtie par cette satanée électricité, elle voyait mal comment elle allait s'échapper.

Elle s'assit dans un soupir :

– Tu sais Fahën, tu devrais me tutoyer maintenant. Il serait bête de mourir en me vouvoyant.

– Comment ? Périr ? Mais assurément pas ! Nous allons trouver une solution. Ou Gaïa nous en pourvoira une.

Syrah contempla un instant le jeune homme campé sur ses jambes et empli de certitude :

– Comment se fait-il que toi, le bourgeois de la cité, tu sois plus confiant dans la puissance de Gaïa que la porteuse d'âmes ?

– Parce que je l'ai vu agir, noble dame.

– Ah bon ? Et quand ça ?

– Quand vous m'avez secouru. J'ai prié la Déesse-Terre de me sortir de là et vous êtes arrivée.

Symbiose - La porteuse d'âmesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant