- Que faisons-nous alors ?
La question avait été lancée sans destinataire particulier par une Hanae bien moins vindicative qu'à l'accoutumée.
Daria était restée en retrait pour ne pas attirer l'attention et seul Khaa avait accompagné sa sœur d'âme. Elle lissa ses écailles du bout des doigts.
- Nous ne sommes pas en nombre et au moment même où nous donnerons l'assaut, nous serons découverts. Nous ignorons combien de villages doivent être encore évacués ... Nous devons nous replier pour mieux nous préparer. Estima Svalantia.
- Nous pourrions peut-être libérer certains villageois ... murmura Syrah. Nous ouvririons les barrières pour libérer les anim'âmes puis nous prendrions les femmes et les enfants ... on ne pas simplement tourner les talons ...
Argo lui prit la main :
- Ils s'en rendraient compte. Tu imagines pour ceux qui resteraient ? les conséquences ...
Syrah baissa ses beaux yeux vairons et essuya avec rage une larme qui roulait sur sa joue. Elle pensait pouvoir s'y habituer mais chaque fois la culpabilité de voir des personnes souffrir à cause d'elle la submergeait.
C'était absurde, c'était injuste et par-dessus tout c'était intolérable.
A côté d'elle la conversation avait repris. Hanae et Svalantia partageait leur point de vue sur la meilleure manière d'opérer. Fallait-il tenter une action discrète ou l'affrontement direct ? Devaient-ils repartir ensemble ou envoyer un seul groupe aux nouvelles dans le sanctuaire ?Syrah se concentra pour faire cesser les tremblements qui agitaient ses mains et menaçaient de prendre possession de son corps tout entier. Vagha et Zaïra l'entourèrent.
La tête baissée vers le sol, elle se concentra pour maîtriser sa respiration comme Svalantia lui avait appris. Focaliser son attention sur l'air qui s'engouffre dans les narines. En sentir le parfum, la texture puis son chemin à travers les poumons, puis expirer. Le monde devait se résumer à cette simple action : respirer.
Cependant la conscience traitresse de Syrah ne l'entendait pas de cette oreille. Elle lui susurrait tout bas les souffrances de son peuple, lui donnait injonction d'agir, la nommait responsable.Syrah aurait voulu échapper à cette voix, elle aurait voulu se concentrer sur le débat passionné qui animait ces amis; pouvoir comme eux analyser avec froideur la situation.
Si seulement ce murmure ... il n'était pas plus bruyant qu'un souffle mais pourtant on ne pouvait lui échapper. Sa litanie s'insinuait par tous les pores de la peau, se mêlait aux râles des prisonniers ... Ou bien était-ce la matière même de cette voix ? Etait-elle faite de la souffrance des prisonniers ou s'en nourrissait-elle ?
L'esprit de Syrah ricochait dans cette cacophonie sans trouver d'échappatoire : le bruit du métal qu'on travaille, le souffle chaud de la fournaise, les cris des prisonniers, la petite voix ... tout se mélangeait ... tout se ... et puis soudain ce fut le silence. Un silence souverain. Seul le cœur de la jeune fille tambourinait encore à ses oreilles, mais déjà il se calmait.
Les bras d'Argo l'enserrait avec tendresse, il formait une barrière infranchissable entre le monde et Syrah, un cocon protecteur. Elle appuya sa tête contre le torse du jeune homme et se laissa aller.
- Ça me semble une bonne idée. Qu'est ce tu en penses, Syrah ? Lui demanda Hanae.
Syrah secoua légèrement la tête :
- J'étais ailleurs ... Vous pouvez répéter ?
Hanae affecta son air contrarié préféré mais Fahën intervint :
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Symbiose - La porteuse d'âmes
FantasyIl fut un temps où les hommes vivaient sur la terre comme des parasites et anéantissaient tout sur leur passage. Mais ce temps est révolu. Voilà des centaines d'années, Gaïa, excédée, décida de lier chaque âme humaine à une âme animale. Ainsi les...