La cité d'Opale

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Un silence de plomb s'installa aussitôt.
Il faut dire que Pryham avait élevé la voix en fin de phrase de sorte que personne ne pouvait en ignorer le contenu explosif.

Adrast resta comme foudroyé et se tourna vers sa mère. Celle-ci avait pâli, elle détailla Pryham puis son regard se porta sur son caracal et imperceptiblement elle porta sa main à son cou. Ses yeux se remplirent de larmes :

- Ma Déesse ! Pryham ?

L'implacable prédateur au tempérament si placide fut agité d'un sanglot. La gorge nouée il ne put répondre et se contenta de hocher la tête.

La femme avança d'un pas prudent comme si le moindre mouvement risquait de faire disparaître son fils.

Le reste du groupe était figé, conscient d'être les témoins muets d'un événement majeur. Après quelques enjambées hésitantes, la femme porta sa paume sur la joue de Pryham, elle sursauta quand leurs épidermes entrèrent en contact, comme électrocutée.

- Mon tout petit ... Tu as tellement grandi ... Tu es devenu un homme !

Pryham prit la main de sa mère dans la sienne :

- Tu avais disparu ... Je t'ai cru morte. Tout le monde le croyait ... Comment ? ... Pourquoi ?

- Ton père avait découvert ... Adrast. Je l'avais caché auprès d'une nourrice mais ton père était suspicieux et il m'a suivi. Il allait le tuer. Je devais fuir.

Pryham relâcha la paume de sa mère. Il recula d'un pas. La magie était rompue. Il reprit d'un air suspicieux :

- Quel âge as-tu Adrast ?

Encore sous le choc, Adrast cligna plusieurs fois des yeux :

- Bientôt dix huit ans ...

- Impossible ...

Il se tourna vers sa mère.

- La grossesse, l'accouchement ...

- Tu étais si petit. Tu ne te rappelles probablement pas ... J'ai feint une fausse couche. Les yeux vairons ... ton père aurait tout de suite compris.

Pryham fronça les sourcils :

- Si je me souviens. On m'avait interdit de te voir. Je croyais que tu allais mourir...

Elle fit un nouveau pas vers lui mais celui-ci recula :

- Tu m'as tellement manqué ...

- Tu es parti sans moi ...

- Tu étais si petit ... Et tu étais au château. Prendre le risque de te récupérer ... Voyager avec deux enfants en bas âge ...

Le visage de Pryham se ferma :

- Tu m'as laissé avec eux ... Tu savais ce qu'ils me faisaient subir ! Tu es partie en sachant ce qu'ils me martyriseraient !

Le ton était monté, la jolie blonde recula comme giflée :

- Ton père ne t'aurait jamais fait de mal. Cela aurait été admettre qu'il ... Il aurait perdu la face !

Sans un mot Pryham retira les différentes couches qui engonçaient son buste. Sur la peau pâle de son dos musculeux une cicatrice boursouflée et blanchâtre s'étalait sur son omoplate droite. La marque d'un fer rouge, une lettre B baroque et stylisée. La lumière des torches qui éclairaient le chemin parait la cicatrice d'une couleur rougeâtre malsaine.

- Cadeau de Thoore et Louky. Ils ont demandé à Demeria de créer le motif. J'y ai eu le droit une soirée de beuverie. Ils avaient négocié une permission avec mon instructeur de la garde. J'étais si fier d'être invité à une de leur virée ... Ils ont dit qu'ainsi je n'oublierai pas qui j'étais : un bâtard. C'était pour l'anniversaire de mes douze ans. On peut dire que leur cadeau m'a marqué.

Symbiose - La porteuse d'âmesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant