Révélations

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Syrah fendit la foule des villageois comme dans un rêve.

Vaporeuse, il lui semblait qu'elle flottait à quelques centimètres au-dessus du sol plutôt qu'elle ne marchait.

Ses mains, une sur l'encolure de Zaïra l'autre sur la tête de son nouvel anim'âme, s'imprégnaient avec délectation de leur chaleur bestiale.

Elle suivit Touaraïa vers la forêt, accompagnée par le concert de murmures de ses voisins et amis.

Dans son état normal, elle aurait certainement remarqué que les anim'âmes du village s'étaient, eux aussi, rassemblés pour assister à cet avènement.

Bien plus intuitifs que leurs frères et sœurs d'âmes, ils avaient ressenti l'émergence d'une force nouvelle et puissante.

À son passage, Ils s'étaient écartés avec déférence. Un cerf aux bois immenses s'était même incliné.

Cependant, Syrah ne vit rien de tout cela.

Peu lui importait le bruissement des conversations, le froissement des sabots sur le lit de feuilles pourpres ou les hommages des cervidés. Son corps entier vibrait d'une joie intense, presque animale. Son âme chantait à l'unisson d'un chœur composé de ses deux âmes sœurs.

Tout lui semblait irréel.

Elle n'aurait su dire combien de temps avait duré sa marche. Il lui paraissait tout à la fois qu'une éternité s'était écoulée depuis ce matin et que seul le temps d'un battement de cœur la séparait de sa rencontre avec Vaghadeva.

Devant le temple, Touaraïa pressa avec douceur son épaule. Ce simple effleurement lui fit l'effet d'une décharge sur l'épiderme. À vrai dire, un flot de sensations contradictoire lui parvenait. Elle ressentait la moindre fibre de son corps alors même qu'elle se sentait étrangère à son être, et ce tourbillon la plongeait dans une euphorie fiévreuse.

Syrah regarda autour d'elle : les rayons du soleil diffractaient la plus infime particule de poussière qui scintillait dans l'atmosphère comme une pierre précieuse. Comment avait-elle pu manquer la beauté de ce spectacle ?

Elle inspira à pleins poumons et l'odeur de l'humus l'envahit tout entière, l'air était si épais qu'il avait un goût. Une saveur d'herbes et de terre. Jamais elle n'avait même imaginé le goût de l'air... Et tous ses sons... Elle s'appuya sur ses anim'âmes, étourdie de tant d'informations sensorielles. Il lui fallut plusieurs minutes pour s'apercevoir qu'elle se trouvait à présent devant la porte du sanctuaire.

Touaraïa lui faisait maintenant face, les mains dans le dos et la tête légèrement penchée sur le côté. Syrah voyait sur le visage de la prêtresse courir des centaines de ridules : chaque instant passé, chacun de ses rires et chacune de ses peines avaient creusé un sillon sur sa peau parcheminée. Une sorte de lumière diaphane émanait de l'ensemble de son être. Avait-elle toujours été là ?

– Que ressens-tu, mon enfant ? L'interrogea Touaraïa.

Syrah tourbillonna sur elle-même, Exaltée :

– Je me sens libre ! Enfin complète ! Je comprends mieux ce que disaient les autres. Quelle sensation merveilleuse !

La vieille femme sourit, en secouant légèrement ses longs cheveux blancs. Syrah entendit leur crissement dans l'air comme un bruit d'insecte.

– C'est à la fois exactement cela... Et tellement plus, Syrah. Tu ressens à présent la Symbiose.

Syrah stoppa sa folle danse.

– La symbiose ? Non... ce n'est pas ça. Nous vivons tous en symbiose avec Gaïa depuis la grande Vengeance. Mais, prêtresse Touaraïa, c'est tellement plus fort, tellement plus extraordinaire que tout ce que j'ai connu ! C'est... C'est...

Symbiose - La porteuse d'âmesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant