Pryham

6.3K 717 48
                                    

L'humeur enjouée de Fahën ne semblait pas pouvoir s'obscurcir plus de quelques instants, aussi était-il déjà dans l'optique de reprendre leur repas où ils l'avaient laissé.

Syrah, quant à elle, observait la hampe d'une des flèches. On pouvait y voir un dessin compliqué qui représentait quatre pièces de puzzle imbriquées au sein d'un cercle lui-même entouré de flammes stylisées.
Ce motif était comme marqué au fer rouge, si petit que de loin, on pouvait le confondre avec un nœud dans le bois.

– Tu connais cet ornement ? Demanda-t-elle brusquement à Fahën en se retournant vers lui.

Le jeune rouquin interrompit son monologue et s'approcha du décor.

– Je pense effectivement avoir déjà vu une peinture semblable. C'était il y a longtemps, il était sur le mur d'une maison d'un bourgeois qui avait été assassiné. Il frissonna à l'évocation de ce mauvais souvenir. Je ne crois pas que cela soit un bon présage, noble dame.

Syrah fit une moue dubitative :

– Pourtant, qui que soit ce mystérieux archer, il nous a sauvé la vie...

– Ou peut-être est-ce un piètre tireur et étions-nous visés ? Suggéra Fahën, plus pessimiste.

– Je n'ai pas eu cette impression... Mais après tout, tu as raison, nous ignorons tout des intentions de cette personne. Mieux vaut se montrer prudents.

Elle scruta de nouveau la végétation, à la recherche d'un indice, mais la forêt était silencieuse et rien ne transparaissait à travers l'épais feuillage.
Zaïra et Vagha avaient exploré les environs sans plus de succès. Ils étaient revenus vers Syrah avec forces de jappements et de feulements, mais Syrah n'avait pas compris où ils voulaient en venir. Elle avait bien perçu un genre de pression sur son esprit, mais malgré sa concentration elle n'avait pas réussi à ouvrir les vannes de ses sensations animales, à peine avait-elle cru sentir une odeur étrange, mais sans conviction. Les portes de la Symbiose étaient demeurées obstinément closes et Syrah comme ses anim'âmes avait renoncé à communiquer.

Ne pas pouvoir maîtriser ses nouvelles facultés irritait la jeune femme au plus haut point. Bien que Touaraïa l'ait prévenu que leur apprentissage serait long, elle avait secrètement espéré être dotée d'un don naturel. Ce n'était évidemment pas le cas et elle s'en sentait un peu vexée.

– Bien, ne restons pas ici. Ils pourraient revenir...

Elle récupéra son sac et reprit sa route.

– Et notre repas ? S'inquiéta Fahën.

– Nous nous arrêterons plus loin.

Fahën observa avec envie la poignée de fruits qu'il avait récoltée et Syrah constata qu'il avait soigneusement évité les baies empoisonnées pour se rabattre des mûres beaucoup plus inoffensives.

- Tu les mangeras en route.

Syrah l'entendit bougonner, mais elle occulta sa voix pour se concentrer sur les bruits environnants.
Cependant, aucun son ne vint perturber la mélodie de la forêt et ses anim'âmes ne revinrent pas l'alerter.

*

Après une courte marche et devant les protestations de plus en plus vigoureuses< de son estomac, Syrah, prudente, s'était portée volontaire pour chercher de quoi se nourrir.
À son grand regret, Fahën avait insisté pour l'accompagner en arguant qu'il devait apprendre. Et malheureusement pour elle, il était d'humeur à discuter. Syrah se demandait d'ailleurs s'il possédait un autre état d'esprit.

– Le prince Pryham est le benjamin de Lord Voluris, si vous saviez quel scandale sa venue au monde a provoqué ! Rendez-vous-en compte, un félin dans la lignée lupine des Voluris ! Je n'étais moi-même pas né bien sûr, mais on m'a raconté. Ça ne s'était jamais vu ! Évidemment, on a pas mal jasé, toute la cité murmurait que Lady Voluris avait fauté. Elle a disparu quelque temps après ; on prétend qu'elle est morte. D'ailleurs, tout le monde pensait que le Lord se séparerait aussi du petit bâtard.
Mais non, il l'a gardé et il est devenu le plus fin limier de la province de l'émeraude ! Mais il ne le reconnaîtra jamais comme un de ses enfants. Il faut dire qu'il a déjà quatre beaux héritiers ! Enfin trois. L'aînée, la princesse Demeria, ne pourra pas prétendre au trône, car c'est une femme. Ce qui n'est pas dommage, elle est plus cruelle que son père et ses trois frères réunis. Les jumeaux sont deux brutes également, et Crhonos...

Symbiose - La porteuse d'âmesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant