Lune pourpre

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Syrah serra contre elle le bras d'Argo qui l'entourait avec tendresse.

Les premiers rayons de soleil coloraient la chambre de reflets lactescents à travers les feuilles de riz des cloisons coulissantes.
Elle ferma les yeux et inspira profondément. Elle était décidée à voler quelques instants de plus à la course folle des événements, qui, depuis qu'elle avait découvert qui elle était, l'entraînaient comme un fétu de paille.

Déjà dehors, les bruits de la petite communauté de réfugiés se faisaient entendre.
A vrai dire toute la nuit n'avait été qu'un incessant va et vient de villageois rapatriés en catastrophe et de départ de rebelles encadrant de petits groupes vers les monts Termites.

Syrah savait qu'à l'instant où elle franchirait la porte de son sanctuaire elle serait happée vers son destin, de gré ou de force.

Argo lui caressa l'épaule du bout des doigts avant d'embrasser ses cheveux.

- Je crois que le monde nous appelle. Chuchota-t-il à son oreille alors qu'un groupe d'enfant courraient sur les planches de la terrasse dans un bruit de cavalcade peu propice au repos.

Syrah soupira et se retourna pour embrasser les lèvres de son amant :

- Qu'il repasse plus tard. Répondit-elle.

Argo rit et la fit basculer doucement sur le dos ; mais alors qu'il l'embrassait, Syrah entendit Vagha gronder. Elle tendit l'oreille et entendit le juron étouffé d'Hanae.

Si elle reconnut la voix, l'intonation, angoissée et pressante, la mit en alerte. Elle repoussa doucement Argo et passa une tête ébouriffée par l'embrasure de la porte.

Hanae tentait de forcer le barrage de Vagha et Dagueria. Elle parut soulagée de voir Syrah.

- Je ne sais pas ce qu'ils ont ces deux-là ... Syrah vient vite quelque chose d'horribles vient d'arriver.
Elle avait parlé à voix basse en regardant par-dessus son épaule en direction de la marée humaine.

Hanae n'était pas facilement impressionnable et son visage pâle et hagard laissait présager le pire. Ils s'habillèrent à la hâte.

Hanae rasait les murs mais la présence de Syrah ne passait jamais bien longtemps inaperçue. Hestia, Adrast et Pryham fendirent la foule et arrivèrent à leur hauteur au moment même où Yuraïa apparaissait au coin de la terrasse.

Hestia ralentit l'allure à la vue d'Hanae, elle murmura quand elle arriva à leur hauteur :

- Qu'est-il arrivé ?

Le visage d'Hanae passa de la panique à la fureur; quand Pryham arriva à sa hauteur, elle se redressa, prête à lui sauter à la gorge. Ses mains tremblaient, elle agrippa un coin de sa tenue et serra le tissu jusqu'à faire blanchir ses jointures. Khaa siffla, ramassé à ses pieds.

- Tu avais dit qu'ils seraient trop occupés... Tu en étais sûr, toi qui est toujours si péremptoire, si certain de tout. Et bien Lord Voluris, vous aviez tort, terriblement, injustement et définitivement tort !

Elle avait fait un effort presque surhumain pour tenter de maîtriser sa voix mais celle-ci enfla telle un orage et elle hurla presque les derniers mots.

Chez les réfugiés, plusieurs têtes se détournèrent, attirés par les éclats de voix.

Syrah fut saisit d'un horrible pressentiment :

- Amène-moi ! Pria-t-elle d'une voix blanche.

Le petit groupe progressa rapidement. Pryham n'avait même pas répliqué à l'attaque verbale d'Hanae qui était toujours dans un état second.

Symbiose - La porteuse d'âmesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant