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Une heure après, la note est réglée et la voiture chargée. Lisbeth, assise à côté de moi, est silencieuse comme à son habitude.
Je pose ma main sur son genou, et elle me regarde.

- C'est parti, ticoeur ! Laisse-toi aller, fais- moi confiance.

- Je ne sais pas faire cela, Dylan.

- Je vais t'apprendre.

- Il y a combien de kilomètres ?

- 600 km à peu près. Mais on va s'arrêter dormir quelque part sur la route. Je ne peux pas le faire d'une traite, trop fatiguant.

- Ok. Je peux mettre de la musique ? Tu aimes quoi ?

- Ça dépend beaucoup de mon humeur. Alors vas-y, fais toi plaisir.

- Moi je ne suis pas difficile, je me contente en général de ce qu' il y a à la radio ? Et comme je l'ai cassée ....

- Pourquoi tu ne l'as pas dit ? Je t'aurai offert un MP3 ?

- Et je le charge comment sur la route ?

- Pour l'instant, tu n'y es pas ! Sur la route. Enfin, si. Mais à l'hôtel, tu peux le charger, non ?

- Oui, mais ce n'est pas une raison.

-Est-ce que je peux te poser une question ? Si tu ne veux pas répondre je ne râlerais pas, promis !

- Tu feras juste une grimace, ou tu lèveras les yeux au ciel. Pose-la !

- Où tu dors quand tu es sur la route ?

- Auberges de jeunesse, foyers, dehors. Je ne suis pas au top dans mes choix, comme tu as pu remarquer.

- Tout le monde ne s'appelle pas Judy.

- Sur la route, la confiance, on ne la donne pas souvent.

- Pourtant tu faisais du stop ?

- Oui, quand je n'ai pas le choix, mais je n'aime pas. Trop de risque, surtout pour une fille. Tu es d'accord, non ? Se moque-t-elle.

- Bien sûr. Quoi que je suis content que tu en es fait. Je crois que je serai intervenu au bar quand même. Ils étaient vraiment trop malsains.

- Tu sauves souvent des demoiselles en détresse ?

- Tu n' étais pas franchement en détresse ! J'ai dû t'embarquer de force sur mon épaule, je te rappelle. Je suis juste vigilant. Je n'aime pas les mecs qui se comportent mal avec les filles.

- Tu es un drôle de mec. Comment tu es avec les femmes, Dylan ?

- Je dis la vérité. Toujours.

- Développe !

- Je suis comme les autres, ticoeur. Quand je repère une nana qui me plaît, j'y mets beaucoup de temps et d'énergie.

- Genre gros lourd qui insiste ?

- Ah Ah ! Non, souvent avec un verre, ou un repas. Et quand je la sens prête à craquer, je lui dis la vérité, que ce sera juste pour un soir.

- Et si elle ne veut pas ?

- Je n'ai JAMAIS forcé qui que ce soit. Tu entends ? Jamais !!

J'ai parlé fort. En fait, je crois même que j'ai crié. Mais, même si cela peut paraître dingue, je respecte les femmes. Jamais je pourrais forcer une femme ou profiter d'elle si elle a bu. Je ne peux pas. Je ne veux en aucun cas lui ressembler.

- Excuse moi ticoeur. Je ne voulais pas te faire peur. Depuis quand on parle de ce genre de sujet, toi et moi ?

- Peut-être depuis qu' on a décidé de faire un bout de chemin ensemble. De se connaître un peu.

- Ouais. J'aime bien discuter avec toi, d'ailleurs. Et toi, ticoeur, tu fais comment avec les mecs ?

- Je ne fais pas. Fin de la conversation.

- Ok. De quoi tu veux parler ? Comment fais-tu pour vivre sur la route, Lisbeth ?

- Je me débrouille. Des petits boulots au black, bien sûr. Des fois je vole aussi, mais c'est trop dangereux.

- Je ne veux plus que tu voles, ticoeur. Tu pourrais te faire arrêter et ...

- Je ne vole plus, Dylan. Depuis que je me suis procurée des papiers. Oh merde !

- Mégane Stone ? Je les ai vu, l'autre jour. Je ne veux rien savoir, si tu veux pas me le dire. Mais je ne veux pas te mentir.

- J'en avais besoin pour pouvoir travailler, sinon c'était cuit. Je ne peux pas te le dire , il me faut plus de temps...

- Pour me faire confiance. Je comprends, ticoeur. Tu veux qu'on s'arrête un peu ? L'Océan ne va pas disparaître, tu sais.

- Comme tu veux, c'est toi qui conduit.

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Pourquoi est-il si gentil avec moi ? Je viens de lui dire que je vole, et il ne réagit pas.
Comment puis-je faire autrement ? Mes papiers m'ont coûté cher, très cher. 800 euros. Pour les obtenir, Tyler m'avait proposer quelques jeux sexuels. En voyant l'état de mon dos, il a changé d'avis et juste exigé certains vols. Quand il a décidé que j'avais payé, il m'a proposer de rester. J'ai refusé.
Il s'est mis en colère. Il a bu comme un trou, il a hurlé. Puis j'ai repris la route.

Alors, montrer mon corps à Dylan, non.
Je ne pourrais pas. J'attendrais. Et quand " on" me dira qu' il est de nouveau à mes trousses, je me libérerai définitivement.

Pour la première fois de ma vie, je me sens bien avec quelqu'un. Je compte profiter de cette période, sans complexe. Et pour cela, je dois lui cacher mon passé.
Je vais devoir être vigilante, il est très malin. Il a déjà réussi à faire tomber plein de mes barrières.
Il est patient, drôle et sa façon d'être avec l'argent m'énerve et me plaît en même temps. Il ne cherche pas à me rabaisser. Jamais.
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- Je dois prendre de l'essence. On pourrait boire un truc ?

- Bonne idée. Et aller au toilettes.

- Éventuellement. Tu pouvais le demander si tu avais besoin, tu sais ?

- Ouais. Ce n'était pas le cas. Je sais que je peux te demander de t'arrêter, Dylan. J'en avais pas besoin.

- Cool. On se retrouve à la pompe.

Elle était dans ses pensées, encore. Notre relation est meilleure, mais j'ai toujours l'impression que cela peut déraper. A tout moment. Mais on a déjà tellement progressé ....

Je suis juste stressé, on va sur l'Océan Atlantique.
Elle pense faire comment pour son dos ? Se baigner en combinaison ? Ou me donner une explication. Et comment vais-je réagir ?

Alors, je fais ce que je fais le mieux, je retarde ce moment.

LÂCHE !

LibreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant