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(Benjamin)

J'ai peur, tout le temps peur. Il le sait, ça l'amuse.
Aujourd'hui, je dois tenter de résister. Ne pas trembler, ni gémir et surtout ne pas pleurer.

Sinon, il me punira.

J'ai trente ans, je suis un homme d'affaires, avec plein de diplômes prestigieux. Mais quand la porte va s'ouvrir, il me soumettra à une nouvelle épreuve.
Il a une imagination débordante.

Comment Dylan a pu supporter cela pendant toutes ces années ?
Pourquoi ai- je pris sa place ?

Le premier jour, j'ai cru mourir. Il m'a enfermé dans une pièce, sans aucune lumière, nu. Et il a libéré des rats. Ma peur des rongeurs de toutes sortes, il la connaît.
J'entendais les bruits qu'ils faisaient. Je ne sais pas combien de temps, je suis resté dans cette pièce. J'ai juste entendu ses rires que j'ai couvert par mes hurlements.

Hier, il y avait des serpents. J'ai perdu connaissance avant de hurler.
Il n'a pas dû aimer. Je ne suis pas à la hauteur de ses espérances.

La porte s'ouvre.
Ce n'est pas mon père.
C'est celui qui exécute ses ordres. Sans hésitation.

— Il n'y aura ni rats ni serpents, Benjamin. Mais tu vas les regretter. Tu seras seul avec toi même.

— Je suis comme cela tout le temps.

— Dylan a échoué. Mais vous êtes différents. Déshabille-toi, complètement. Je vais t'attacher les mains dans le dos. Te lier les pieds pour que tu ne puisses pas marcher. Les yeux bandés pour que tu sois dans le noir le plus complet.
Dylan a tenu trois jours.
Montre à ton père que tu es le meilleur, me dit-il en sortant.

Je vais te battre, Dylan.

                    ***

L'avion a atterri. Une voiture nous attendait. Avec deux mecs.
La maison était fidèle à ce que Nils avait dit. Un véritable paradis. Lisbeth ouvrait des grands yeux, impressionnée.

— Bienvenue dans la vie de Nils, Lisbeth.

— Il est riche à ce point là ?

— Plus que ça encore. Viens choisir ta chambre.

— Ma chambre ? Vraiment ?

— Comme tu veux, toi.

— La nôtre, je dors bien avec toi. Tu es toujours en colère ?

— Non. Je comprends. Mais promet-moi, ne te mets pas en danger.

— Je ne partirai pas. Mais je ne suis pas sûre de réussir à ne pas paniquer.

— Je n'en suis pas sûr non plus. Je n'aime pas perdre le contrôle.

— Je sais. Dylan, tu crois que je peux prendre une douche ?

— Bien sûr. Tu en as une à côté de la chambre. Avec tout ce qu'il faut dans le placard. Je t'emmène ton sac.

— Merci.

                  ***
(Nils)

— Oui ? Un instant, je vais à l'extérieur. Voilà.

— On ne sait pas où il est, Nils ! Aucune trace.

— Des trucs suspects ?

— Beaucoup de mouvements dans la base montagnarde. J'attends des infos.

— Tu me tiens informé. Je ne pars plus au Japon.

— Sur votre portable ?

— Oui. Ou par Mail.

Putain ! On a perdu la trace de Benjamin, le frère de Dylan. Et vu que leur père est revenu, ce n'est vraiment pas une bonne nouvelle.
Je dois faire en sorte que Dylan ne se doute de rien. Sinon, je ne pourrais pas le retenir.
Après, je m'inquiète peut être pour rien. À ma connaissance, Ben n'a jamais subi les mêmes choses que Dylan. Il a toujours été un gentil garçon, obéissant à son père.
Mais, je serai rassuré si j'avais la certitude qu'il est loin de lui et très loin de cette montagne.

— Tu tires une sacrée gueule ! Un souci, Nils ?

— Non, Dylan. Rien de grave. Disons que le gars qui est au Japon n'est pas aussi doué que je le croyais. Je vais rattraper le coup au téléphone dans deux heures.

— Si tu le dis. Tu peux encore y aller.

— Je ne changerai pas de décision. Tu as installé Lisbeth ?

— Oui. On a pris la suite parentale. Nous dormons ensemble. Et bizarrement, sans cauchemar.

— Parfait. Tu l'apprécies beaucoup, n'est-ce pas ?

— Oui. Elle est un peu comme moi. Solitaire. Sa présence ne me pèse pas. Je ne connaissais pas ce sentiment. C'est nouveau, Ben se moquerait de moi.

— Sûrement. Je vais dans le bureau, j'ai des coups de fil à passer. Ne vous occupez pas de moi.

— Tu me caches quelque chose ?

— Non. Pourquoi dis-tu ça ?

— Tu es sec, Nils, et surtout tu as un regard fuyant. S'agit-il de Ben ?

— Je ne sais pas où il est.

— Quoi ? Tu n'arrives pas à le localiser ?

— Pour l'instant. Ton père non plus. J'attends des infos.

(Benjamin)

Je dois rester calme. Ce silence est oppressant. Mais, du fait de ma situation, mon ouïe me semble plus aiguisée ! Je ne sais pas depuis combien de temps, je suis là. J'ai soif, très soif. Et je ne sens plus mes bras. Le sang ne circule pas comme il faut. Si je ne peux pas marcher un peu, mes jambes vont bientôt être dans le même état.
Un bruit de porte. Quelqu'un me saisit par le bras. Je me contracte, car personne ne me parle.

— Laisse-toi faire. Je vais te détacher les bras et les pieds. Fais des mouvements pour activer la circulation sanguine. Tu as une demi-heure. N'enlève pas ton bandeau. Toi, tu ne vois rien, nous, on voit tout.

                      ***

— Il est comment ?

— Plutôt pas mal, Monsieur. Il est plus calme que Dylan.

— Il est plus malléable. Il a déjà bu ? Demandé à aller aux toilettes ?

— Non.

— Alors, il va craquer. L'humiliation, il ne supportera pas. Il est juste bon à décrocher des contrats. Il ne fera jamais un dirigeant. Je dois trouver un moyen pour récupérer Dylan.

— Oui, Monsieur. Je détache Benjamin, donc.

— Non. Voyons ce qu'il va faire. Il m'amuse.

Je dois marcher, remuer mes bras. J'ai toujours soif, et faim.

— Tourne- toi, les mains derrière le dos. Assis- toi. Les pieds. Parfait. Ouvre la bouche et bois. Une question ?

— J'ai envie de pisser.

— Tu as le droit.

LibreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant