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Elle a réussi à avaler quelque chose. Difficilement et surtout parce qu'Al s'est fâché.

Je ne sais pas quoi faire. J'aimerai être sûr que ce n'est pas encore une manipulation de cet homme. Il avait l'air d'être sincère.
Et pourtant, il a séquestré Lisbeth.

- Dylan ?

- Oui Bob ?

- Il faut y retourner. Je veux savoir à quoi m'attendre. Si ce qu'il dit est vrai, nous n'avons aucun droit à l'erreur.

- Je sais. Elle ne parle pas. Je ne sais pas quoi faire.

- Moi si, dit-elle d' une petite voix à peine audible.

- Mon cœur, tu ne parlais plus.

- Je réfléchissais Dylan. J'ai pris ma décision. Je dois l'écouter. Même si cela me fait de la peine. Il est différent de là-bas. Tu as mangé un truc ?

- Non, mon coeur. J' ai bu un café, avec un peu de pain. Je vais bien . J'aimerai que tu ailles bien, toi.

- Je te mentirai si je te disais que c'est le cas. Mais vu les circonstances, je vais le mieux possible.

- Est- ce que je peux avoir un câlin ? Cela me fera beaucoup plus de bien qu'un sandwich.

- Alors je ne peux pas refuser, c'est évident.

- Est-ce que je peux en réclamer un aussi ?

- Bien sûr Bob. Où est Al ?

- Je suis là, princesse. Et je veux bien un câlin aussi. Si on le faisait collectif ?

Aussitôt dit aussitôt fait. Nous entourons Lisbeth. Tous. Nils, Benjamin, Al, Bob et moi. Puis nous laissons Nils et Benjamin. Ils sont chargés de surveiller les extérieurs. Je prends la main de Lisbeth et nous avançons ensemble, Al et Bob nous précédant.

Sastus est assis à la même place. Je crois apercevoir un petit sourire quand il la voit arriver.

- Je te remercie d' être là, dit-il soulagé.

- Je veux entendre la suite.

- Ton père avait peur pour ta sécurité. J'avais déjà travaillé pour lui et il avait été satisfait de mes services.

- Tu faisais quoi ? Tuer ?

- Non. Rendre raisonnable. Voler. Intimider. Je ne suis pas un tueur.

- Jamais ?

- Jamais. Il m'a fait une proposition inhabituelle. T'enlever à ta mère et veiller sur toi. J'ai refusé. Pas dans mes attributions. Il est revenu à la charge. J'ai accepté.

- Pourquoi ?

- Des nouveaux arguments très convaincants. J'ai trouvé un lieu où te garder. Une identité. T'enlever à ta mère était très facile, elle s'occupait très peu de toi. Tu avais six ans.

- Tu t'occupais d'une gamine de six ans ? J'ai du mal à y croire, s'esclaffe Dylan.

- J'avais embauché une femme. Ça fonctionnait bien. Enfin, je le croyais. Elle profitait de l'argent pour se faire plaisir, ainsi qu'à son fils. J'ai dû y mettre fin.

- Jonathan, chuchote Lisbeth.

- Tu te souviens de ce morveux ? Tu étais petite. Il te prenait tout ce que sa mère te donnait.

- J'avais peur de lui. Il me pinçait, me tirait les cheveux. Tu lui as fais quoi ?

- Je l'ai puni. Tu avais des marques de coups. Il devait comprendre. J'ai donc décidé de m'occuper de toi. Tout seul. Ton père m'aurait massacré si il t'était arrivé un truc.

- J'ai le souvenir d' une maison très grande, sans fenêtre. Sans personne.

- Tu te souviens de cela aussi ? Je n'avais plus confiance. Je devais te dissimuler de l'extérieur. Mais il me fallait aussi sortir. Pour faire des courses. C' est pour cette raison que j' ai commencé à  t'enfermer.

- Je me rappelle. L'attente et la peur.

- Tu avais peur de moi. Déjà ?

- Non. J'avais peur que tu ne reviennes pas, murmure-t-elle, j'avais occulté tout cela, volontairement.

- Mon coeur, s' il te plaît.

- J'avais oublié, Dylan, dit-elle en pleurant. J'avais oublié.

- Je sais. Tu en avais besoin, pour être forte. Tu veux t' arrêter ?

- Non. Continuons.

Mon Dieu. Cette femme est incroyable. D'où tire-t-elle cette force ? Je suis émerveillé. Je sens l'émotion monter et mes yeux me piquent. Une main virile me touche l'épaule. Bob. J'ai une envie de m'effondrer dans ses bras, mais je sais que Lisbeth ne le supporterait pas.

- Tu étais une petite fille relativement facile à gérer, reprends Sastus. Curieuse, et intelligente. Tu as appris à lire et à écrire toute seule.

- Tu jouais avec moi. Je m'en rappelle. Tu riais aussi. Qu'est-ce qui s'est passé ?
Pourquoi tu es devenu méchant avec moi ? Qu'est-ce que j'ai fais ?

- Rien. Tu n'as rien fait. Ne penses pas un seul instant que c'est de ta faute !

- C'est mon père ? Il n'est jamais venu, ou alors je ne m'en rappelle pas.

- Il n'est jamais venu. Il t'aurait mis en danger. Il en crevait, je te le promets. Je lui donnais de tes nouvelles toutes les semaines. Si j'avais su.

- Il a découvert mon existence ? Mon frère ?

- Il a trouvé ta mère, l'a éliminée. Et après en toute discrétion, dans l'ombre, il a commencé à te chercher. Sans relâche.

- Tu ne le savais pas ?

- Oh non ! Sinon rien ne serai arrivé.

- Explique-moi.

- J'ai été coincé. Il a trouvé mon point faible. Le seul. Excuse-moi. Je t'ai sacrifiée. Il avait ma petite sœur, il m'a montré des photos.
Je ne pouvais pas le laisser faire. Alors je lui ai obéis.

- Tout ce que tu as fait, c'était lui qui l'exigeait ?

- C'est un peu facile Sastus, non ? C'est votre version. Ou la plus magnifique des manipulations ! rage Al.

- Je sais. Lisbeth, écoute-moi jusqu'au bout. S'il te plaît.

- Arrêtez Sastus, vous êtes très doué.

- Al, je veux l'écouter. Dylan, me supplie-t-elle.

- Continuez Sastus. Al, c'est Lisbeth qui décide.

LibreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant