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Le délai est passé. Je sais qu'il va accepter.

— Il est l'heure de prendre ta décision. Je t'écoute.

— Quel gâchis ! Tu es intelligent, et à ce que j'entends, tu as pris de l'assurance ! Arrête tes bêtises et discutons Dylan. Nous pouvons trouver une solution pour travailler ensemble.

— Je ne veux pas travailler avec toi, père. Ne perds pas de temps, à essayer de me convaincre. Tu m'aides ou je te détruis ?

— Es-tu sûr de pouvoir me détruire ?

— Veux-tu prendre le risque de le découvrir trop tard ?, demandé-je, sarcastique.

— As-tu conscience de ce que tu détruirai ?

— Soyons clair. Je ne peux pas faire autrement. Ton aide m'est indispensable, et je n'ai pas confiance en toi pour me la donner sans contrepartie. Donc je fais ce que tu m'as appris. J'attaque. Ta réponse ?

— Dis-moi qui tu veux et ce que tu veux.

— Un homme nommé Sastus. Je veux savoir où il est. Je ne veux pas qu'il aille en prison. Je veux le détruire.

— Il t'a fait quoi pour que tu veuilles le détruire lui aussi, dit-il, ironique.

— Cela ne te regarde pas ! Je t'envoie ce que j'ai.

— Pas la peine. Je connais cet homme. Il se vend au plus offrant. Il peut tout avoir du moment que tu payes.

— Tu as déjà eu affaire avec lui ?

— Ne pose pas des questions pour lesquelles tu n'as pas envie d'entendre les réponses, Dylan, répond mon père, agressivement.

— Je veux savoir. Plus rien ne me choque de ta part. Tu m'as montré, en quelques années, que ton imagination était plus que fertile.

— Bien sûr qu'il a travaillé pour moi. On a besoin de ce genre d'homme, fils !

— De la marchandise, du renseignement, des filles. Qu'est-ce que tu voulais ?

— Je n'achète pas des filles, elles viennent sans débourser un centime. Je voulais des renseignements.

— Et on fait comment pour le joindre ?

— Ça c'est mon affaire. Je vais faire ce que j'ai dis Dylan. Mais après ?

— Tu me le livres où je veux.

— A Corfou ?, dit-il avec cynisme.

— Tu penses me faire peur ? De Stanford ?

— Ton copain Nils est efficace, félicitations !

— Ne joue pas avec moi. Tu ne connais pas mes cartes. Ne me sous-estime pas.

— Je te joins comment ?

— Je t'envoie ça sur ton téléphone.

(Dylan)

Il a fait appel à lui. Comment puis-je accepter cela ! Mon père a payé cet homme pour obtenir quelque chose. Je peux me mentir en me disant que je me moque éperdument de ce qu' il voulait. Oui, je peux faire cela. Cela ne résoudra pas mon problème le plus important. Comment je fais pour vivre avec l'idée que mon père a été en contact avec l'homme qui a fait tant de mal à Lisbeth. Comment je fais pour la regarder en le sachant. Je voulais le laisser libre. Sous prétexte qu'il ne nous avait pas fait si mal que cela. Suis-je si idiot que cela ? Il nous a fait mal. Et plus le temps passe, plus je réalise que je ne connais qu'une toute petite facette de mon père.
Je dois parler avec Bob et après avec Benjamin.

— Il a accepté.

— Il n'avait pas grand choix , si ? Quel est la vraie raison de ton appel, Dylan ?, me demande Bob.

— Il le connaît. Et apparemment bien. Très bien. Tu le savais ? Oui, bien sûr que tu le savais. Je suis très naïf.

— Je travaille avec ton père depuis plus de vingt ans. C'est mon job de faire toutes ces basses besognes.

— Tu arrives à dormir la nuit ?

— Beaucoup mieux depuis que je rassemble les preuves pour le stopper. Quel est ton problème ? Moi ? Lui ? Ta conscience ?

— Tout cela. Mais surtout ma conscience. Il y a quelques jours, j'ai dit à Lisbeth, que son bourreau n'avait rien à voir avec le mien. Je n'en suis plus si sûr ! Je ne voulais pas le détruire, juste le forcer à nous laisser Ben et moi. Maintenant, je me pose la question.

— Je n'ai pas ta réponse, petit. Ton père, comme beaucoup d'autres, a fait des trucs malsains. Au début, à la limite de la loi, puis de plus en plus illégaux.

— Je ne veux pas laisser ces choses impunies ! Je ne peux pas ! Mais je ne suis pas seul. Je ne ferais rien sans en discuter avec Benjamin.

— Appelle demain. Là, il dort. Son corps s'est remis très vite. Son esprit moins, il doit récupérer. Je suppose que ton père sait que vous êtes à Corfou. Revenez. Nils dispose d'endroits où vous serez en sécurité. Benjamin a besoin de te voir.

J'allais vers la chambre, j'enfilais mon maillot de bain. J'avais besoin d'expulser toute cette rage, toute cette colère.
Depuis l'arrivée de Lisbeth auprès de moi, je n'avais pas craqué. Pas de course à ne plus sentir mes jambes. Pas de bagarres où ma rage se retournait sur le premier con qui me cherchait.
Je m'étais focalisé sur elle, uniquement sur elle. Je ne le regrettais pas.
Mais dans la partie que je venais de lancer, il y avait son avenir à elle. Mais aussi mon frère et mon père. Et je devais lâcher du lest pour pouvoir continuer de façon efficace. Faire des longueurs dans la piscine jusqu'à tomber d'épuisement me semblait être une bonne idée.

Nils me regarda faire sans rien dire.
L' homme sans nom se permit un rictus.
Lisbeth fit comme si elle ne remarquait rien. Elle se leva et disparue un long moment. Quand à bout de fatigue, je m'arrêtais, elle se leva de son transat, descendit dans l'eau.
Je la regardais faire, ébahi par son geste. Elle nagea jusqu'à moi, accrocha ses bras à mon cou, enlaça ma taille avec ses jambes, sa tête contre mon torse.
Sa seule présence, tout contre moi, me fit du bien.
Au bout d'un moment, elle leva la tête, me planta son regard dans les yeux et elle me chuchota :

— N'oublie jamais que je suis là.

LibreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant