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Al me fit signe de le rejoindre dehors. Je savais déjà de quoi il voulait me parler.

- On s'organise comment ?

- Sastus n'est pas né de la dernière pluie. Si on met quelqu'un il le saura de suite. Un micro ?

- Bob ! Tu sais très bien que Lisbeth ne voudra pas.

- Alors, tu vas laisser la possibilité à Sastus d'être près d'elle ? Sans t'inquiéter ?

- Non. Ni garde du corps, ni micro. Et pas de réunion secrète.

- Dylan ? Il n'est pas question de prendre ce risque. Je n'ai pas confiance. Il cache des trucs.

- Vous croyez que je lui fais confiance ? Même Lisbeth ne lui donne pas complètement la sienne. Non, nous allons être direct. Ou elle a toujours l'un de nous à ses côtés ou on se passe de lui. Non négociable.

- Cela fait plaisir de voir que nous sommes du même avis. Qu'est-ce qu'on fait pour ton père ?

- Je ne sais pas trop. Je suis persuadé qu'il doit savoir que Sastus est ici. Il sait tout nous concernant Benjamin et moi. Depuis le début.

- Tu ne veux pas essayer de te servir de cet avantage ?

- Je ne suis pas sûre que ça en soit un. Trop d'incertitudes. Mon père est un génie de la manipulation, tu le sais trop bien. Plus Sastus. Non décidément, je ne veux pas prendre ce risque. J'ai trop à y perdre.

- Comment va-t-elle ?

- Tout dépend. Elle a appris à dissimuler ce qu'elle ressent. Quand elle accepte de s'ouvrir un peu, elle voit que nous sommes là.

- Et là, elle s'ouvre ?

- Pour le moment, elle doit reprendre des forces donc elle est centrée sur elle. Je la laisse faire.

- Et toi, comment vas-tu, Dylan ?

- Je suis fatigué. Mais je n'arrive pas à dormir. J'ai l'habitude de ça ! Tu te rappelles que tu n'avais pas réussi à me faire flancher ?

Je surprends un regard interrogatif d' Al. Je n'aurai peut-être pas dû.

- Dylan fait référence à certains de ses nombreux passages dans la montagne. J' y faisais office de bourreau.

- Je ne t'ai jamais ressenti comme un bourreau.

- Si tu veux. Celui qui exécutait les volontés de ton père, la phrase te convient mieux.

- Tu n'as jamais fait ce qu'il aurait voulu faire. M'humilier.

- A ce moment de ma vie, je ne me posais pas de questions. Tu représentais tout ce que je détestais. Arrogant. Impertinent. Avec mon éducation militaire, basée sur le respect et l'obéissance, tu étais celui que je devais remettre dans le droit chemin. L' humiliation est inutile dans ce cas là.

- Heureusement pour moi, apparemment ! Je n'ai pas eu encore l'occasion de te poser la question.

- Je l'attendais !

- Qu'est ce qui t'a décidé d'aider Nils ?

- Je travaillais pour lui, à cause de Benjamin.

- Explique.

- Quand tu es parti, j'ai vu ton frère s'effondrer. Ton père n'en avait rien à faire. Il ne le voyait même pas. Tout naturellement, il est venu vers moi. Il était l'opposé de toi. Poli, serviable, curieux.

- Je sais, Ben ne se retrouvait jamais en conflit avec nôtre père.

- Tu y veillais ! Je l'ai compris plus tard.

- J'avais pris l'habitude des punitions, des remarques. Je me devais de le protéger de Papa.

- Tu as réussi pendant très longtemps. Ton départ a changé la donne. Les premiers mois, ton père était sûr que tu allais revenir. Vaincu. Quand il a compris que ce ne serai pas le cas, il a découvert l'existence de ton frère.

- Il pensait que Ben allait me contacter. Sauf que lui aussi, s'est mis dans la tête de me protéger. Comment ?

- Il était à l'écart, mais il était vigilant. Il a vite compris ce qu'était ton père ! Il a compris ce que tu avais vécu et ce que tu lui avais épargné.

- Et il a fait en sorte que notre père ne se préoccupe plus de moi. Et moi, je refusais ses appels. Parce que ça me faisait chier.

- Il a commencé à lui répondre. Ton père ne pouvait pas laisser faire. Alors j'ai contacté la seule personne capable de m'aider.

- T'aider ?

- A arrêter ton père. De l'intérieur.

- Tu prenais des sacrés risques !

- Pas temps que cela. Ton père me faisait confiance. Je n'ai jamais rechigner à lui obéir. Il devait donc penser que c'était éternel. Comme un gentil chien chien.

- A cause de Ben ? Je n'y crois pas.

- Il a été l'élément déclencheur. Il voulait le combattre, lui tenir tête. Il n'en avait pas les capacités. Je déteste les combats inégaux.

- Tu as dû en voir d'autres ?

- Là, ton père jouait avec lui. Il ne visait pas l'obéissance. Avec Benjamin, il visait la destruction. Il voulait le briser purement et simplement. Et pas qu'à la montagne.

- Vous auriez dû, toi et Nils, me contacter. Me dire de revenir. Il a tant subit !

- Tu n'as pas compris encore ? Ton père s'est attaqué à ton frère pour cette seule et unique raison ? Te faire plier. Benjamin n'était que l'outil.

- Justement. J'avais gagné une fois, j'aurai pu réussir de nouveau.

- Crois-moi, Dylan. Il ne t'aurai pas laissé gagner. Pas cette fois ! On a pris la bonne décision. Il ne peut plus vous atteindre. Il a compris que j'avais changé de camp. Je peux le détruire quand je le décide. Il ne s'y risquera pas. Je n'ai pas de point faible. Nils non plus.

- Benjamin est un dommage collatéral ?

- Non. Il a été touché mais cela la rendu plus fort. Mon seul regret est de ne pas avoir pu le rassurer sur mes intentions.

- D'accord ! Quand ce sera le moment, mon père devra répondre de tout cela. Une bonne fois pour toute. Explique moi pourquoi tu n'aimes pas Sastus ?

- Parce que je connais ce genre d'homme. Je suis ce genre. Al est ce genre. Rester prudent ne nous engage à rien. Ne pas l'être serait une grave erreur.

LibreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant