XIV.2

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Je me sentais énormément reposée aujourd'hui. En même temps, j'avais dû dormir près de sept heures ; ça faisait un moment que je n'avais pas dormi autant. Je devais avoir été poussée à bout, pour m'être endormie ainsi après une telle nuit ... Toutefois, aujourd'hui, je me décidai à accepter ce monde. J'avais trop souffert pour renoncer. Il fallait que je m'y fasse, il fallait que je vive. Je devais accepter Avril, et je devais accepter le fait de vivre comme ça. Il fallait que je me reprenne ; pour commencer, je mettais un peu d'ordre dans mes cheveux. J'essayai tant bien que mal de les coiffer à l'aide de mes doigts ; c'était assez laborieux, mais ça allait faire l'affaire. 

La voix d'Avril m'avait semblé un peu fébrile : il avait l'air fatigué. Peut-être qu'il avait mal dormi ... En fait, c'était même plutôt logique qu'il dorme mal après ce qu'il avait vu. Moi, j'avais été certainement trop épuisée. Peut-être même que mon sommeil s'était plus apparenté à un évanouissement. Avril avait eu peur, cette nuit. Je l'avais vu. J'avais un moment cru qu'il ne ressentait rien ... Mais c'était certainement dû à son masque, et à sa voix monotone. Qui était-il  ...? C'était compliqué à dire. Il semblait avoir des sentiments, mais ne les exprimait pas. Il avait survécu tout ce temps, malgré l'absence de compétences défensives. Les machines l'ignoraient, son empreinte déverrouillait les portes ... Je tournai la tête vers lui ; il regardait le ciel. Il portait le même masque que les esclaves des machines. Était-ce un des leurs ? Ça expliquerait pourquoi il peut rentrer dans le bâtiment. Toutefois ... Il agissait clairement de sa propre volonté. Comment en serait-il arrivé là ? Décidément, ce garçon était un mystère. Sûrement qu'il fallait que je lui pose la question, à un moment. 

Le ciel se couvrit petit à petit de nuage, et nous nous décidâmes de bouger afin de trouver un endroit où nous serions plus abrités en cas d'averse, ce qui allait certainement être le cas. 

C'était dingue de marcher dans une forêt, le peu que j'avais vu du monde extérieur était de grand désert de terre, sans végétaux. Il semblerait qu'à certains endroits la verdure avait survécu. Ou bien ... Muté. Car ces arbres-là étaient tout de même énormes ! Il semblait que la forêt s'étendait dans la périphérie du complexe. C'était étrange ... Il devait y avoir un lien. Afin d'être en sécurité, nous décidâmes de marcher uniquement à l'orée : nous nous considérions ainsi assez éloignés d'un potentiel danger. Nous avions la vue sur les plaines vides à notre gauche : la terre était sèche, il y avait quelques rochers, mais tout était plat. Et mort. C'était triste, à voir. J'étais plutôt contente de pouvoir marcher dans une foret. Toutefois, il n'y avait aucun bruit : pas d'oiseaux, pas d'écureuil ... Je me demandai si eux non plus n'avaient pas survécus ... Tout semblait être mort, sur cette terre. Et tout ce qui ne l'était pas était sous l'emprise des machines. Un monde où la vie n'avait plus sa place ...? C'était horrible à imaginer. Pouvais-je m'estimer heureuse d'être encore libre ? Oui, oui je pense que je devais m'en satisfaire. Et puis, je n'étais pas seule. Certes, Avril n'était pas très bavard, mais il était une présence très importante pour moi. L'important, c'est d'avoir quelqu'un. Je m'en rendais compte, maintenant.

L'atmosphère s'assombrissait doucement, jusqu'à ce qu'une fine pluie se mette à glisser entre les nuages. Avril et moi trouvâmes un creux sous un rocher où nous étions à l'abri. Nous nous assîmes, côté à côté, fasse à l'extérieur pluvieux. Nous n'avions pas été trop trempés ; nous allions vite sécher. Nous n'avions pas beaucoup parlé, et en fait, je ne savais pas trop quoi lui dire. Pourtant, nous étions pris tous les deux ici, je me sentais mal à l'aise à l'idée de rester dans le silence. Soudain, je le vis chercher quelque chose dans son sac. Il ressortit un petit objet ... Mon Ipod ?? Je pensais me l'être fait pris lorsque les ouvriers avaient changer mes vêtements. Il me le tendit.

"Tu l'as fait tombé, la dernière fois. Je l'ai récupéré ...

-Merci, Avril ! C'est super. Je l'allumai, et me dis que je méritais bien une petite séance musicale. Après un court instant, je me décidai à tendre un écouteur à Avril.

Tu veux écouter avec moi ?" Avril ne répondit rien, il se rapprocha de moi et saisit l'écouteur. Il le plaça correctement dans son oreille, puis se mit à regarder l'extérieur. Je lançai la playlist en aléatoire, comme à mon habitude. 

Ce que ça faisait du bien, la musique !Je posai mon dos contre la paroi rocheuse, et Avril fit de même. Je fermai les yeux un instant, me laissant aller à quelques rêves. 

Un moment, je sentis un poids contre mon épaule. J'ouvris les yeux : Avril ...? Il avait posé sa tête contre elle. Est-ce qu'il s'était endormi ? Oui, c'était probable ... Il avait eu l'air fatigué, aujourd'hui. Je me dis que je n'allais pas le dérangé ; je le laissai se reposer contre moi.

C'était le moment de faire un point dans ma tête. Qu'est-ce que je savais de ce monde ? Plusieurs choses, premièrement, il avait sombré après 2100, et le contrôle était tombé entre les mains de la technologie. Les végétaux semblaient avoir disparus, sauf autour des usines. Il fallait vérifier que ce soit une généralité. Ainsi, l'humanité était divisée en deux : Ceux manipulés dans le monde virtuel qui se trouvaient dans les grandes villes, et la deuxième partie ; outils des machines dans des usines. Après ... Était-ce le cas partout ? Je ne savais pas. Il fallait que je le demande à Avril, peut-être qu'il en avait une idée.  On ne pouvait pas enlever le casque des personnes dans la ville, c'était ce qu'il m'avait dit. Certainement que ça risquait de les tuer. Pouvions nous enlever la prise dans la nuque des ouvriers ? Ça semblait aussi peu probable, c'était certainement le même principe. Je me demandai qu'est-ce que je pouvais bien faire ... 

Je pensais à ma vie dans l'autre monde. Comment tout avait été aussi bien organisé ? Et surtout ... Quel était le but des machines de nous enfermer dans une fausse utopie ? Je pensais à tout ce que j'avais perdu. Mon chez moi, mon quotidien ... Soudain, je pensais à mes parents. C'est vrai ... On m'avait toujours dit qu'ils s'étaient mal comportés, et qu'on les avait envoyés en centre de redressement. Et c'était le cas de beaucoup d'autre gens. A tel point ... Qu'à l'intérieur, nous avions tous appris à se satisfaire que par soi-même, n'osant trop se lier avec les autres, car nous savions qu'il était possible qu'ils disparaissent. Seulement, il n'y avait pas de centre de redressement. Où étaient-ils tous envoyés ...? J'espérai qu'ils ne se soient pas ... Fais tuer ... Toutefois, si leur avenir était de finir comme ouvrier zombie, il aurait peut-être mieux valu qu'ils soient morts. Quand je pensais à mes parents ... Je les avais tellement peu connus. Ils m'ont peut-être quittée vers mes trois ans, tout au plus ... A une période, je les avait haïe pour m'avoir abandonnée. Je m'étais réconfortée en me disant qu'ils avaient mérité de partir. Mais là, maintenant, je me rendais compte ... Qu'il était sûr qu'ils avaient juste été victimes d'une horrible société. Il devait y avoir un but à tout ça. D'où venaient les personnes que j'avais trouvées dans l'usine ? Qu'étaient-ils ? Est-ce que les grandes villes étaient une source de main d'œuvre aux machines ? Ça devait être le cas. Mais ... Pourquoi se prendre la tête à faire toute cette organisation ? Quelque chose devait m'échapper. Bien sûr, j'avais trop à apprendre sur ce monde pour pouvoir encore formuler une hypothèse. 

Ma tête prit du recule, et je me mis à observer mon buste. Ou plutôt ... Ce dans quoi il était envelopper. Le haut qu'Avril m'avait fait était vraiment ... Étrange ; il y avait de grandes ouvertures sous les bras, les manches n'étaient pas reliées au buste mais uniquement au col, il y avait des espèces d'ouvertures sur les hanches ... C'était ... Curieux. Mais bon ... Ça partait d'une bonne intention, et puis ... Il était d'une très jolie couleur. Du rouge, un rouge simple, vermillon, mais très agréable à regarder. J'espérais que l'acuité visuelle des machines ne soit pas basée sur l'intensité des couleurs ...

Je baissai la tête vers Avril. Il dormait ... Je voyais sa poitrine se remplir d'air, puis l'expirer, lentement. Comme il était près, certaines de ses mèches de cheveux virent me chatouiller la joue. C'était étrange ... Ils avaient une odeur de ... Glace. De neige, de rivière ... Du moins, c'était ce que ça m'évoquait. Quel étrange personnage ... Il avait l'air si innocent, ensommeillé ainsi contre mon épaule. Il était ... Si étrange. C'était dur de le cerner, d'autant plus qu'il ne parlait que très peu. Mais j'étais prête à l'accepter. Je levai les yeux vers le ciel gris.

En fait ... J'étais prête à affronter ce monde. A ses cotés.

Light OutOù les histoires vivent. Découvrez maintenant