XVLIII

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Je savais que je ne devais pas rester là. Mais j'étais incapable de prendre la moindre décision, car je ne m'étais jamais retrouvée seule. Seule, je ne valais rien. Seule, je pouvais bien mourir. Pourquoi tout ceci était arrivé ? On m'avait réveillée et ordonnée de mener à la disparition de l'être qui devint ma raison de vivre. Avril n'avait jamais bien compris ce monde ... Il ne pouvait admettre que les humains pouvaient être si mauvais, alors qu'il avait su déceler chez eux le plus beau des dons ; leur capacité à aimer. Aimer des choses simples, aimer des choses plus compliquées, aimer des choses qui ne leur apportent que du mal ... Pourtant, ils continuaient à y croire. C'était ça, la magie d'exister. Il l'avait appris ... Ils l'avaient tous considéré comme un être artificiel, alors qu'il avait été plus authentique que n'importe lequel d'entre eux. Il ne m'avait jamais mentie. Jamais trahie. Jamais blessée. Il était resté fidèle et honnête jusqu'à la fin. Il ne s'était jamais caché derrière une façade pour se faire croire qu'il était quelqu'un d'autre. Il était au dessus de nous, et alors qu'il avait tout fait pour apprendre de moi, j'aurai du me préoccuper plus à apprendre de lui, car jamais personne d'autre n'aurait pu m'enseigner tant de sagesse. Comment un être conçu par notre main avait pu nous surpasser à ce point ? Sa sensibilité ... Comment avait-il été possible ? Je crois que nous n'allions jamais être capable de ressentir tout ce que cet être avait pu vivre. Comment avait-il pu tout faire pour moi, comme il l'avait fait ? Il avait été si perdu, face à mes sentiments, face aux siens, qui avaient pris de plus en plus de place dans sa vie, sa petite vie que tout le monde trouvait insignifiante. Pourtant, il était arrivé jusqu'ici, et se fichait du mal qu'on avait pu lui faire, il n'avait jamais eu une seule rancune, un seul regret, jamais un regard en arrière, Avril avait toujours avancé, croyant en sa chance de devenir meilleur. Après toutes ses souffrances, comment avait-il pu rester aussi pur ? Aussi confiant ? J'avais tant de fois vacillé, tant de fois douté, nous étions à nous deux les exemples complémentaires d'une quête qui n'aurait jamais dû avoir été supporté par nos frêles épaules. Pourtant, nous l'avions fait ... Il l'avait fait. Je ... Je l'avais fait. Je l'avais laissé faire, car je lui faisais confiance. Et il m'avait laissé faire, parcequ'il ... Parcequ'il m'avait fait confiance ...

Avril n'avait jamais appartenu a ce monde. Avril était un ange.

Et moi, je n'avais jamais été forte. Pas sans son amitié qui m'avait donnée l'impression de pouvoir déplacer les montagnes, ou bien ... De sauver le monde.

Je laissais mes larmes s'écraser contre son visage, sans pouvoir rien faire. Je tenais fébrilement son corps frêle entre mes bras, qui devenaient de plus en plus faibles.

Je ne savais pas quoi faire ...

Il avait l'air si paisible. Les yeux clos, les sourcils détendus, le bouche entre ouverte ... C'était donc à ça, qu'il ressemblait lorsqu'il dormait près de moi tout ce temps ? Je regrettais de ne pas l'avoir su plus tôt, j'aurai pu lui dire qu'il était vraiment mignon, je ne savais pas s'il aurait compris ce compliment, et je n'allais jamais savoir. Je le serrai un peu plus fort. Comment ... Comment avais-je pus laisser tout ça se finir ? Était-ce moi, qui avait souhaité la fin ? Avais-je déjà souhaité tout ça ? Je crois ... Que cela faisait un moment que mon rêve avait changé. Je ne faisais que le réaliser maintenant. Où alors ... Venait-il de changer brusquement ? J'étais épuisée, en temps normal, j'aurai voulu hurler, vraiment, mais plus rien ne m'habitait. Je peinais même à garder mes poings agrippés à lui. Mais c'était la seule chose que je voulais faire, alors c'est ce que je fis. Je ne savais pas combien de temps j'allais rester ainsi, et ce n'avait pas d'importance. Je venais de tout perdre. J'avais fini ma quête, je m'étais fâchée avec le monde entier, il allait leur falloir peu de temps avant qu'ils ne me trouvent et qu'ils ne me punissent, mais comme je venais de perdre ma réalité, ça n'avait pas vraiment d'importance. Peut-être allais-je simplement rester ainsi jusqu'à ce que je m'endorme. Je me perdais volontairement dans des pensées de plus en plus abstraites avant que je ne m'en rende réellement compte. Si je fixais les abysses, allaient-elles me fixer en retour ? 

Light OutOù les histoires vivent. Découvrez maintenant