Light Out

XXXIV.2

J'étais si heureuse. Je n'aurai jamais cru Charlie capable d'une telle folie, en me suivant à l'extérieur. C'était dingue ! Cette petite était vraiment incroyable. Elle nous avait complètement sauvé la vie. Grace à elle, j'étais pleine d'espoir et pleine de joie. C'était si agréable de parler ! Parler de tout et de rien, même parler de la base souterraine ne devenait plus un sujet douloureux, tant nous y avions partagé des souvenirs géniaux. J'avais l'impression qu'elle m'avait sortie d'une étrange torpeur, et que je vivais pour de vrai, tout éveillée, une aventure des plus folles. Nous avions de la nourriture, des vêtements, des armes ... Rien ne pouvait plus nous arrêter ! Nous allions éteindre le Système, ensemble. Mais dans un souci du bien être du moral d'Avril, je lui avais demandé de ne pas faire allusion au fait qu'il était lié à la Tour, et surtout, qu'il n'était pas la cible de nos anciens collègues. Elle avait accepté, comprenant que ce n'était pas spécialement utile de le mettre au courant, et que cela lui ferait plus de mal que de bien.

Cette soirée-là, j'avais vu Avril jouer aux Échecs avec Charlie. Ça avait été vraiment amusant ! Et Avril avait gagné ? Il me semblait que ce garçon avait beaucoup plus de ressource que ce qu'il n'y paraissait. J'avais beaucoup d'estime pour lui, et j'étais vraiment heureuse de voir ensemble mes deux amis. J'espérai que cela continue entre eux, et qu'Avril découvre en elle une autre amie, il avait été si seul tout ce temps ... J'étais sûre que cela lui plairait de vivre avec nous deux ! Et Charlie avait l'air motivée pour s'en faire un ami, elle le regardait toujours avec tant d'attention, c'était vraiment touchant. Je me rappelai qu'elle avait toujours porté beaucoup d'intérêt à Avril lorsque je lui contais mes aventure ... Maintenant que nous étions réunis, il fallait maintenir la bonne humeur, et j'étais persuadée que tout allait se passer pour le mieux. 

Avril s'enfouit dans une couverture, et se coucha sur le côté. Charlie et moi restâmes un moment, dans le calme, à contempler les flammes dansantes et face de nous. Mais le silence devenait de plus en plus pesant, comme s'il n'avait pas lieu d'être ... Charlie voulait-elle me parler de quelque chose ? 

Elle finit par soupirer lourdement. 

"Qu'est-ce qu'il y a, petite ? 

Elle ne me répondit pas tout de suite. Elle inspira profondément, et reprit :

-Ça me fait quand même bizarre, d'être là. 

Je comprenais. Moi même, j'avais l'impression de ne jamais vraiment m'y faire, à ce silence, et ces plaines vides, ces bâtiments en ruine ... A ce manque d'humanité ...

-Ça te rappelle de mauvais souvenir ...? Lui demandai-je.

-C'est là d'où je viens, après tout ... Elle ne répondit pas vraiment à ma question, mais cela me rappela qu'elle ne m'avait jamais vraiment raconté son passé. Elle m'avait déjà dit qu'elle venait d'une usine, et que Jeffrey l'en avait sortie, mais elle n'avait pas voulu continuer. 

-Est-ce que ... Est-ce que tu veux me raconter ? 

Elle tourna la tête vers moi, me regarda tristement un instant, puis replongea ses yeux dans les flammes ondulantes. 

-Je n'en ai jamais parlé à personne ...

-C'est comme tu veux, Charlie. Peut-être que ça te ferait justement du bien, de t'en débarrasser ?

Elle resta silencieuse un moment. J'avais moi-même très envie d'entendre son histoire, car la vie dans les usines avait été ... Le plus gros traumatisme de ma vie. Ce que j'avais fait là bas hantait encore mes nuits, et je me demandai si ce n'était pas aussi son cas. Il fallait ... Il fallait que j'apprenne plus sur ce que j'avais fait, sur les gens à qui j'avais fait ça. Il fallait que j'apprenne plus sur ce qui semblait être l'enfer sur terre.