XV.1

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Une lumière sembla chatouiller mes yeux clos. Je sentais mon visage chauffer doucement. Je les ouvris, difficilement, afin de découvrir la cause de mon éveil. Le ... Soleil ? Oui, il était juste devant nous. Il se levait. Il devait être ... Six heure. Étourdie, j'avais dû mal à comprendre ce qui était entrain de m'arriver. Oui ... Je m'étais endormie sans trop m'en rendre compte, hier. C'était dingue ... Entre hier et aujourd'hui, j'avais dormi presque quinze heures ! Je bougeai un peu, et me rendis compte qu'Avril n'avait pas changé depuis la veille : il était toujours appuyé contre mon épaule. Il dormait encore. Il dormait toujours trop, ce petit. 

Je me sentais pleine d'énergie. Je me réveillai doucement avec le soleil, pris une grande bouffée d'air frais, ce qui m'en ouvrit une soif considérable. Je saisis délicatement la tête d'Avril, et je me retirai lentement afin de ne pas le réveiller. J'enlevai mon écouteur, et le lui mis dans l'autre oreille. J'avançai accroupie hors du creux rocheux dans lequel nous avions dû passer la nuit, et me redressai vivement une fois sortie. Je tendis mes bras, puis les levai jusqu'à ce qu'ils touchent le ciel. Je sentais cet air frais, l'air frais du matin et humide de la forêt encore ensommeillée. Je me mis à trottiner sur place. Oui ... J'avais une envie de courir ...! Je plaçai mes coudes bien parallèles à mon corps, et commençai une petite foulée. Oui, il fallait que je coure. Il fallait que je me réhabitue à cette activité qui me liait avec la terre. J'enlevai mes chaussures -seul accessoire que les ouvriers m'avaient laissé- et les posai près d'Avril, comme pour lui dire "Ne t'inquiète pas, je reviens vite.". Et aussi ... Parce-que je voulais sentir le sol sous mes pieds. Je me dis que je n'allais pas aller très loin. Non, je n'allais pas m'éloigner cette fois, peut-être que j'allais uniquement faire le tour de notre abri, mais il fallait que je cours. Mon appétit d'exercice était de plus en plus creusé, autant que le sol sous mes pieds trop hâtifs. Soudain, je m'élançai. Je sentis mes chevilles se déplier, mes jambes rouler, et j'étais partie. Le soleil toujours devant moi m'éblouissait, mais il était si doux, si sucré. L'air pétillant avait le goût de la forêt. Je laissai la petite brise caresser mes flancs, tandis que mes bras et mes jambes glissaient à travers. Je sautai par dessus les quelques obstacles qui se présentaient à moi, mais le parcours était bien plus simple que dans la ville. Plus simple, mais pas moins épuisant. Non, en fait, c'était beaucoup plus éprouvant en vrai. Mais ce que c'était bon ... 

 Voilà quinze minutes que je courrais, et j'avais du mal à respirer. Mes poumons affolés réclamaient de l'oxygène que mon cœur ne pouvait leur apporter. Mais qu'importe, je les sentais. Je sentais mes organes en moi, vivants, exigeaient de vivre. J'allais vivre, j'allais tout faire pour survivre. Et en réalité, j'avais déjà bien commencé. Je m'arrêtai tout de même lorsque ma tête se mit à tourner. Oui ... Il ne fallait pas que je me pousse à bout non plus ; je devais faire attention. Je courbai le dos, plaçai mes mains sur mes genoux, et tentai de reprendre mon souffle. Une fois mon pouls quelque peu apaisé, je me redressai, et admirai la vue. J'étais arrivée du côté de l'orée où le soleil se levait. Il se réveillait sur les plaines désertiques et sèches de notre Terre agonisante. C'était tristement beau. Il avait la plus belle couleur du monde, cet orange, le plus chaud de la gamme chromatique. Je le sentais frapper contre mon cœur, et les deux se répondaient avec un jeu d'échos. Je me surpris entrain de sourire ; c'était bon signe, que j'arrive encore à trouver du beau dans cette univers. Après, j'avais toujours été optimiste, peut-être un peu trop, mais peu m'importait, si c'était ce dont j'avais besoin pour vivre, alors laissez-moi vivre heureuse. Je m'assis un moment, et je laissai le soleil levant chauffer doucement mon visage. Quelques perles de sueurs glissèrent sur mon front et rafraîchirent mes idées. Mes jambes étaient en tailleur et j'avais joint mes mains. Je fermai les yeux un instant. Ce qui était impressionnant, c'était ce silence. Pas de voiture, pas de fenêtre qui s'ouvraient, pas de papotage matinale ; ni d'animaux, ni de personne d'autres. Il n'y avait que le bruissement des feuillus autour de moi. Il ne m'effrayait pas, ce silence. En fait, il m'apaisait. Jamais les humains d'auparavant n'auraient pu sentir une telle sérénité qu'à ce moment précis. J'avais l'impression d'être hors du temps, hors du monde, hors de tout. J'ouvris les yeux, et sentis une détermination dans mon esprit revigorée par l'astre du jour. Je ne possédai rien, mais si je pouvais me battre pour le voir ce lever une nouvelle fois, alors, je me battrai pour lui. Juste pour le lendemain. Car l'humain est un être d'avenir. 

Cette idée me fit revenir à la réalité. J'en connaissais un qui n'était pas un être d'avenir ... Je n'étais même pas sûre que depuis tout ce temps il ait eu un but, ou ne serait-ce qu'une raison d'avancer ... Du moins, c'était certainement une force. Pour autant, il fallait que j'aille retrouver Avril. Il fallait que nous nous trouvions une destination, un point à atteindre. Je me levai vivement, sautillai un peu afin de me remettre d'aplomb. Je fis un tour sur moi même, laissant ainsi mes cheveux danser un instant dans l'air. Je les vis ... De magnifiques reflets rouges. Je n'avais plus l'air si terne qu'auparavant. Peut-être que c'était mon état d'esprit qui les incitait à briller. J'étais heureuse. Je crois ... Je crois que c'était le mot. J'étais pleine de vie, et je voulais l'affronter comme il se devait. Je partis en sprint en direction d'Avril. Il fallait que nous nous trouvions un but !


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