7. Katarina

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Comme tous les mercredis soir, Pétronille n'est pas présente à l'appartement puisqu'elle retrouve ses amies dans leur bar préféré. Habituellement, j'en profite pour voir Frédéric.

Nous nous sommes rencontrés en soirée, il y a quelques mois, et depuis, nous passons du temps ensemble tout en ayant établi d'un commun accord qu'il n'y aurait rien de sérieux entre nous. J'ignore pourquoi je me suis « engagée » dans cette histoire. Peut-être pour tromper ma solitude. Il est le premier homme que j'ai laissé entrer dans ma vie après Grégoire. Pourtant, je ne parviens pas à m'attacher à lui.

— Je bouge ! me lance Johan en enfilant un sweat.

— Ça marche, bonne soirée.

— Merci, à toi aussi.

Quand le battant se referme dans son dos, je songe avec désespoir que je ne sais toujours pas comment je vais pouvoir me venger de son affront envers ma voiture. Le sticker était électrostatique, il n'a donc pas abîmé la peinture lorsque je l'ai retiré, mais l'outrage, lui, demeure bien réel. Heureusement, la patience est une de mes vertus. Tout vient à point à qui sait attendre.

En parlant d'attente, Frédéric a presque une demi-heure de retard. Ça ne lui ressemble pas, d'habitude, il est réglé comme Big Ben : à vingt et une heures précises, il sonne à l'interphone.

Je décide d'allumer la télévision pour tuer le temps, mais évidemment, impossible de trouver la télécommande. Je cherche dans les tiroirs de la table basse, fouille autour du canapé, au milieu du bordel des couvertures et finis par la repérer, logée entre deux coussins.

Une bonne heure plus tard, des coups résonnent contre la porte. Fred a dû se faufiler dans l'immeuble en même temps que l'un des voisins. En me levant pour aller ouvrir, je me prends le pied dans l'anse du sac de sport de Johan et renverse une partie de son contenu sur le tapis.

— Entre ! crié-je à Frédéric.

Je commence à ramasser le bazar que je viens de semer – un flacon du parfum Habit Rouge de Guerlain et plusieurs boîtes de médicaments, une vraie pharmacie ambulante ! –, tandis qu'il pénètre dans l'appart.

— Salut, Kat, ça va ?

— Ça va, et toi ? l'interrogé-je par simple politesse en levant le visage vers lui.

Il m'embrasse sur la joue et me lance un regard perplexe quand il avise le sac noir.

— J'héberge le petit frère de ma coloc, l'informé-je en réponse à sa question muette.

— Ah, OK.

Il semble soulagé. Étrange pour quelqu'un qui clame sans cesse, « nous deux, c'est juste du sexe ! »

— Bon, sinon... quoi de neuf ? Tu as eu un souci ?

— Ouais, c'est pour ça que je suis en retard, ma voiture m'a lâché !

— Mince.

— À mon avis, c'est la batterie. Ou peut-être les bougies. Mon meilleur pote est mécano, il va venir y jeter un coup d'œil. Les bagnoles sont des ruines-budget ! Je pense d'ailleurs changer la mienne. L'Audi TT, c'est dépassé. Sauf que je ne sais pas vraiment quoi acheter. Je me ferais bien plaisir avec une petite Porsche Boxter, mais elles ont la réputation d'être la voiture de luxe des pauvres.

Je hoche la tête en silence ; ses propos me laissent un peu perplexe. Comme il travaille dans l'agence immobilière de son père, Frédéric a pris l'habitude d'entretenir un certain standing. Et j'imagine que c'est parce qu'il a été trop gâté qu'il manque parfois de tact. Sans un mot, je récupère une grosse boîte de compléments alimentaires qui a roulé au milieu de la pièce et la dépose dans le sac de Johan.

DERRIÈRE NOS MASQUES ( /Les voix des sirènes )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant