39. Katarina

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Deux heures se sont écoulées, et je n'ai toujours pas la moindre nouvelle de Johan. À chacun de mes appels, je tombe sur sa messagerie, ce qui use mes nerfs.

Inquiète, je décide de m'en remettre à sa sœur. C'est la seule personne à pouvoir m'aider, en dehors de Grégoire. Et je refuse de parler à mon ex.

— Katarina, qu'est-ce que tu veux ? s'écrie ma colocataire en décrochant.

De la musique retentit puissamment derrière elle. Pétronille doit être en boîte.

— Je t'appelle à propos de Johan. Il a emprunté ma voiture pour avoir une conversation avec Grégoire, et il n'est pas revenu depuis. Ça fait plus de deux heures maintenant, je m'inquiète un peu.

— Quoi ? Et tu lui as prêté ta caisse ? hurle-t-elle.

— Je sais, je suis stupide...

— La reine des connes, oui !

Le sang quitte brutalement mon visage alors que la culpabilité m'assaille.

— Je ne peux pas conduire, je suis au-dessus de la limite ! s'énerve ma coloc. Je suis sortie avec les filles là, et on a prévu de rentrer en taxi, personne n'est en état de prendre le volant !

C'est bien rare que je succombe à la panique, mais soudain, je la sens me gagner.

— OK, je vais me débrouiller. Tu peux me donner l'adresse de Grégoire ?

— Je te l'envoie par SMS. Tiens-moi au courant.

— Ça marche. Tu veux que je passe te chercher ?

— Non, je... je verrai Greg plus tard, je reste avec mes copines cette nuit.

— OK.

Quand je raccroche, je ne peux m'empêcher de me dire qu'il y a quelque chose de louche du côté de Pétronille. À tous les coups, elle s'est disputée avec Grégoire, elle n'aurait jamais manqué une occasion de le voir, sinon. Peut-être qu'elle va finir par ouvrir les yeux...

Ne perdant pas une seconde, je commande un taxi puis vais l'attendre en bas de l'immeuble. Lorsqu'il surgit, je m'engouffre dans l'habitacle, dicte l'adresse que ma coloc m'a envoyée au chauffeur, puis la tête appuyée contre la vitre, je regarde défiler les rues de ma ville.

Ça fait si longtemps que je n'ai pas eu peur pour quelqu'un. Je me sens dans le même état d'angoisse que le jour où je me suis rendue chez Leslie après son message. Cette fois, j'espère ne pas arriver trop tard.

Le taxi s'immobilise le long d'un trottoir, me tirant de mes réflexions. Je paie le chauffeur, le remercie puis descends. Je jette un bref coup d'œil autour de moi, ma voiture n'est pas là. Peut-être Johan l'a-t-il garée plus loin, mais je préfère ne pas me retarder en vérifiant.

Arrivée en bas de l'immeuble, j'appuie sur le bouton numéro 3 du visiophone et patiente.

— Salut Katarina, m'accueille la voix grésillante de Grégoire.

Je me fige en me sentant observée, je n'avais pas remarqué la petite caméra au-dessus du clavier.

— Johan est avec toi ? lui demandé-je avec une assurance de façade.

— Monte.

Je n'ai pas le temps de discuter ; il a déjà raccroché.

Le bip de la porte retentit, accompagné d'une sorte de claquement signifiant qu'elle s'est déverrouillée. Je pose ma main sur la poignée pour l'empêcher de se refermer, mais j'hésite.

DERRIÈRE NOS MASQUES ( /Les voix des sirènes )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant