61. Katarina

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Deux mois plus tard.

— Ce soir, on sort ! annonce Maxime alors que je nous prépare un plat de cannellonis.

— La flemme...

— Ne fais pas ta rabat-joie, Kat ! commente Camille. En plus, t'es en repos demain, toi !

— Ça serait sympa, approuve Soline.

Bon sang, ce qu'ils peuvent me taper sur les nerfs quand ils se liguent tous contre moi.

— Je vous préviens, celui ou celle qui s'avise de me refourguer le premier boulet qu'il croise en espérant me distraire aura droit à une poupée vaudou à son effigie. La menace est sérieuse, on ne plaisante pas avec la sorcellerie.

— Ce n'est carrément pas mon genre ! se défend Camille en levant les mains, paumes tendues devant elle.

— Moi non plus ! renchérit Soline qui commence à se sentir visée.

— Fabrique toutes les poupées vaudou que tu veux, ce soir, je te trouve un mec ! clame Maxime, un grand sourire aux lèvres.

Camille lui colle une claque sur l'arrière du crâne pour le faire taire ; il lui adresse un clin d'œil taquin en retour.

— Le jour où j'aurai envie de ravoir quelqu'un dans ma vie, je saurai me débrouiller toute seule, ne t'inquiète pas pour moi.

— Et dans dix ans, elle sera célibataire avec quatre chiens et quinze chats.

Je lui présente mon majeur en guise de réponse et retourne à ma cuisine.

— Toujours pas de nouvelles ? me demande Soline.

— Que dalle, il fait le mort.

— T'as regardé les avis de décès au cas où ? s'enquiert Maxime.

Qu'est-ce qu'il peut être lourd quand il s'y met celui-là !

— Ton humour craint, Max, le rabroue Camille.

Pour seule réaction, il hausse plusieurs fois les sourcils d'un air stupide, ce qui fait rire tout le monde.

Tout en programmant le minuteur, je lance à la volée :

— Coupez le four quand ça sonne, je vais prendre ma douche.

— Ça marche ! accepte Cam, tandis que je quitte la cuisine.

Arrivée dans ma chambre, je m'enferme et m'appuie contre la porte. J'expire profondément, espérant me délester du poids qui pèse sur ma poitrine.

Je refusais de me morfondre pour qui que ce soit. Je voulais être forte, relever la tête... sauf que mon cerveau ne l'entend pas ainsi.

Alors devant les autres, je prétends aller bien. Mais certains jours, le masque est lourd à porter, et parfois, quand je rentre seule chez moi le soir, il m'arrive de craquer.

Je ne comprends pas le silence de Johan. Au début, je lui envoyais des messages ; puis, en l'absence de réponse, j'ai fini par arrêter. J'ai pourtant fait une entorse à cette résolution hier soir en lui écrivant qu'il me manquait. Mes sentiments pour lui sont inchangés, cependant j'ai aussi de la colère dans le cœur ; elle me ronge comme de l'acide.

J'aimerais pouvoir lui dire que je lui en veux de s'être tiré comme un voleur, que c'était trop facile de décider à ma place et de laisser tomber. J'aurais voulu qu'on se batte en dépit des difficultés, parce qu'on le méritait. Parce que cette histoire aurait dû exister. Mais à quoi bon s'acharner derrière l'écran d'un téléphone ? Je ne suis même pas sûre qu'il lise mes textos.

DERRIÈRE NOS MASQUES ( /Les voix des sirènes )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant