J'ai rapidement trouvé le dossier de Johnson, l'agent double chargé de constater la mort de mes parents. D'après ce que j'ai lu des archives du SHIELD, Johnson est protégé par un programme d'HYDRA qui a probablement expiré maintenant que l'organisation n'existe plus. Si je veux le trouver je devrais mettre la main sur quelqu'un qui sait où il est ; cependant je n'ai aucune information quant aux opérations auxquelles il a pris part.
Je sais qu'ARIES a gardé tout ce qu'elle avait sur HYDRA, je dois donc être capable de trouver ce que je cherche. Je m'installe confortablement sur mon siège et ouvre le dossier.
Johnson a une seule mission à son actif. Perplexe, je jette un coup d'œil à la date, et je constate avec stupeur qu'elle s'étale de 1989 à 2015. Comment une mission peut-elle durer vingt-six ans ? Je sors du dossier la pochette cartonnée qui en contient le résumé, mais je ne glisse qu'une feuille au-dehors, une seule et unique page sur laquelle est tapé à la machine à écrire un mot : « Cerberus ».
Je referme le dossier et me lève de ma chaise pour chercher dans les grands casiers blancs qui renferment les secrets d'HYDRA. Des lettres noires sont collées sur la paroi brillante des tiroirs ; je me dirige vers le C. Je fouille un long moment dans les papiers, mais derrière une chemise orange marquée du mot « Centipede » je finis par en trouver une autre de couleur rouge, portant le nom Cerberus. Je la dégage des autres, et m'étonne de sa finesse. Pour un projet qui a duré plus de vingt ans, son résumé n'est pas très épais. Seulement, c'est en le lisant que je comprends vite que des données ont disparu. Quand j'ouvre la chemise, il n'y a que deux feuilles, collées des deux côtés du carton. À gauche, il y a la date du début du programme, soit 1989.
Déçue, je me rassieds, le dossier posé devant moi, et tourne mon attention sur la seconde page, sur laquelle je lis une courte liste de dates s'étalant entre 1989 et aujourd'hui. Je rentre la plus ancienne, en haut de la page, dans la barre de recherche. Ce jour-là une équipe de scientifiques et deux unités de sécurité ont été envoyées dans un avion privé en Irak. Il n'y a pas de noms, ni de ceux partis là-bas, ni de ceux qui en ont donné l'ordre. Les dates suivantes correspondent à des virements bancaires payés à une société écran d'HYDRA, contre des cargaisons de matériel scientifique et de nourriture. Un an plus tard, des frets de métaux et d'autres éléments dont je ne peux qu'essayer de deviner l'utilité commencent, et se poursuivent jusqu'en 2011. Ces gens en Irak construisaient quelque chose, mais quoi ?
Fatiguée mais néanmoins décidée à aller au bout de l'affaire, j'entre une nouvelle date dans la barre de recherche. Ce jour-ci est différent. Il n'y a qu'une ligne, pas de relevé bancaire, pas de commande de la part du groupe irakien. Je lis la phrase, et la mâchoire m'en tombe :
''WS envoyé, 25 août 1994, 6:00am. Élimination complète terminée. Data rapportée.''
WS. Winter Soldier. J'avoue que cette histoire commence à me faire mal à la tête.
Je me masse les tempes du bout des doigts pendant une longue minute avant de passer au reste des dates mais rien de particulier ne retient mon attention. Je repousse le dossier plus loin sur la table et me penche en avant en m'étirant. J'entends mes os craquer en émettant un son satisfaisant et mes muscles se délier un petit peu puis je croise les bras devant moi et enfouis mon visage à l'intérieur pour réfléchir.
Je ne sais même plus ce que je cherche. J'ai commencé par Johnson pour finir sur James Barnes. Quel est le rapport ? Pourquoi Johnson a-t-il été envoyé constater la mort de mes parents s'il faisait partie de la mission Cerberus ? D'ailleurs, à quoi correspond Cerberus ? Si c'est un projet, il a été enfoui par les plus hauts d'HYDRA. Si c'est un surnom, à qui fait-il référence ?
Tout est peut-être lié, mais je n'arrive pas encore à voir comment. Je sors le nez de mes bras et inspire une grande goulée d'air. Je savais en commençant mes recherches qu'elles seraient longues et fastidieuses alors autant me remettre au boulot tout de suite. Je referme le dossier Cerberus et le range à sa place, avant de chercher celui de Barnes. Je ne le trouve pas à la lettre B, mais plutôt au W de « Winter ». Il n'est rien d'autre qu'un sobriquet maintenant.
J'avais beau m'y attendre, je suis quand même un peu désappointée de ne trouver qu'une seule feuille dans le dossier. Là encore je ne lis que des dates parfois accompagnées d'un pays. La liste récapitule tous les endroits où le soldat a été envoyé en mission par HYDRA. Je descends mon doigt le long de la liste jusqu'à trouver la date dont j'ai besoin : 25 août 1994. Ils l'ont bel et bien décongelé mais rien d'autre n'est précisé.
Je manque de lancer le dossier de l'autre côté de la pièce mais à la place je grince des dents et serre le poing, avant de me frotter le visage en jurant. À chaque fois que je crois tenir un bout de réponse, de nouvelles questions surgissent : qu'est-ce qui a motivé HYDRA à envoyer leur meilleur assassin sur place ? Et bordel, le seul à le savoir c'est lui, c'est Barnes, et depuis que les « plus grands héros de la Terre » ont eu l'intelligente idée de régler leurs problèmes de conscience en se frappant les uns les autres, il est en cavale, disparu depuis trop longtemps pour que j'imagine avoir une chance de le retrouver !
Et puis merde, je ne suis même pas sûre que ça m'avancerait. HYDRA ne l'aurait pas laissé se souvenir de tout ce qu'il a fait. La tension quitte mes muscles et je remarque, consternée, que j'ai froissé la feuille dans ma main sans m'en rendre compte. Je soupire et la plaque contre la table avant de passer ma paume dessus pour l'aplatir à nouveau. Je recule un peu la tête pour voir le résultat, qui, je dois l'avouer, n'est pas vraiment concluant ; soupire à nouveau et m'apprête à ranger la feuille quand soudain mes yeux captent une date que je connais. Je la relis plusieurs fois, le doigt en dessous pour l'isoler des autres, sans vouloir y croire. États-Unis d'Amérique, 11 janvier 2013. Le jour où mes parents ont été tués.
Je dois me mordre l'intérieur des joues très fort pour contrôler la vague de sentiments qui menace de me submerger. Immédiatement j'ai fait le rapprochement, assommée par la révélation, et je n'arrive pas à y croire. C'est impossible, et pourtant... Il a suffit d'une balle par personne. Une seule balle, formidablement bien visée. Un tir parfait, comme on en voit rarement ; mais Barnes était connu en 1940 pour être déjà un excellent sniper. Mon dieu, je pourrais me frapper. Si j'avais compris plus tôt, j'aurais pu questionner Barnes. Ma couverture aurait été intacte, j'aurais probablement fui avec Steve et lui, mais maintenant impossible de savoir où ils sont !
« Loïs ? »
Je reconnais la douce voix de Beth, immobile à l'autre bout de la pièce. Elle n'ose ni s'approcher ni parler trop fort, de peur de déclencher quelque chose de terrifiant de ma part. Elle s'est juste appuyée contre les casiers fermés, ses vêtements bleus et noirs tranchant avec le blanc des tiroirs, les mains jointes et relevées au niveau de son ventre. Elle se tord les doigts, une manie qu'elle a quand elle est angoissée ou qu'elle se retient de faire quelque chose. Je pose mes mains à plat sur la table et m'appuie dessus, en inspirant profondément, avant de relâcher mes muscles en même temps que mon souffle. Je tourne la tête vers mon amie et tente un sourire rassurant.
« Depuis combien de temps es-tu là ? demandé-je.
- Je viens d'arriver. Tu as ce que tu voulais ?
- Pas vraiment, fais-je en m'asseyant sur ma chaise.
- Je peux t'aider ? »
En voyant que je me suis assise, Beth s'est rapprochée. Elle balaie la table du regard, et ses yeux se plissent imperceptiblement, mais juste assez pour que je puisse le repérer. Pendant un instant, je me félicite d'avoir rangé les premiers dossiers consultés. Elle s'attendait à voir quelque chose qui n'est pas là, à la place elle soulève le papier sur Barnes et le consulte du regard. L'expression s'efface aussi rapidement qu'elle s'est affichée sur son visage, et Beth me sourit en reposant le dossier. Je réalise qu'elle m'a posé une question et qu'elle attend une réponse.
« J'ai l'impression d'être arrivée au bout, dis-je en refermant la serviette cartonnée du sergent Barnes. Rien n'a de sens de toute façon, je n'y comprends rien. J'ai presque envie de laisser tomber.
- Je te connais trop bien pour te croire, se moque-t-elle. Allons, dis-moi ce qui ne va pas.
- Beth ? dis-je alors en ignorant sa question. Si j'avais besoin d'un avion, tu m'en prêterais un ?
- Pour quoi faire ? demande-t-elle d'un air suspicieux.
- Pour me remettre au boulot. »
Beth réfléchit pendant plusieurs longues secondes, ses yeux soupçonneux plissés comme pour deviner mes pensées, avant de me donner sa réponse :
« Je dois bien avoir un truc en réserve », accepte-t-elle.
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Cerberus
FanfictionD'abord je faisais partie du SHIELD. Et puis je suis partie. Ensuite j'ai travaillé pour les Ten Rings. Et cette fois on m'a forcée à m'en aller. Maintenant je vis à New York près des Avengers. Mais ce n'est qu'une question de temps avant que je ne...