Cerberus

Chapitre 30

À peine rentrée à l'intérieur, je croise Steve de retour de l'hôpital. Ses vêtements sont chiffonnés et ses yeux hagards. Il me regarde et son front se plisse au-dessus de son air de chien battu. J'en déduis que Barnes ne s'est pas encore réveillé.

Portée par un élan de compassion, je tends la main vers lui. Steve interprète mal mon geste et, alors que je lui presse gentiment l'épaule, il referme ses bras sur moi. Surprise, je me fige, plaquée contre lui, les bras ballants.

Après un instant d'hésitation je joins mes mains dans son dos et pose ma joue sur son torse, dans lequel j'entends son cœur battre. Nos respirations s'accordent le temps du contact, son souffle chaud rebondit sur mon épaule et remonte le long de mon cou. L'espace d'un instant, il n'y a plus que lui et moi, tous les deux priant en silence pour que Barnes ouvre à nouveau les yeux.

Puis ses bras retombent avec lassitude et je l'imite avec une seconde de retard. Steve m'adresse un pauvre sourire et s'éloigne seul vers sa chambre. Je le regarde passer la porte le dos légèrement voûté.

« Loïs ? »

Je me retourne vivement au son de cette voix. Sam Wilson, l'un des Avengers ayant refusé de signer les Accords, entre dans la pièce en marchant lentement. Il désigne la porte de Steve qui se referme et demande :

« Comment va-t-il ?

- Il a seulement besoin de se reposer. »

Sam croise les bras et s'appuie contre le mur, les sourcils froncés dans une expression trahie.

« Où étais-tu ? »

Je m'humecte les lèvres en captant la pointe acerbe d'une accusation informulée.

« Nous avions besoin de toi, insiste Sam. Wanda avait besoin de toi.

- J'ai dû m'éloigner un moment.

- T'éloigner ? répète-t-il avec sarcasme.

- Qu'est-ce que tu veux, Wilson ? dis-je pour couper court à une dispute. Me blâmer pour ce qui est arrivé ?

- Pas pour ce qui est arrivé, mais pour la manière dont ça s'est terminé. Nous nous sommes tous retrouvés en prison.

- Vous avez enfreint la loi », fais-je remarquer avec calme.

Sam laisse échapper un rire ironique avant de se décoller du mur.

« Alors tu es du côté de Stark ?

- Je n'ai pas signé les Accords, mais j'y serai obligée si je veux continuer de travailler pour le SHIELD. Contrairement à vous, je n'ai pas la chance de pouvoir m'enfuir quand je ne suis pas d'accord avec les règles. »

Je retiens de justesse un sourire sarcastique. M'enfuir quand je ne suis pas d'accord avec les règles, c'est ce que je fais tous les jours. Mais il n'a pas besoin de le savoir.

Un silence inconfortable s'installe entre nous deux jusqu'à ce que Sam reprenne la parole :

« J'ai besoin de croire que je peux avoir confiance en toi. Steve prétend qu'il va bien mais il faut que quelqu'un veille sur lui au cas où et je ne peux pas être cette personne. Je m'en vais, annonce-t-il à ma grande surprise. Je vais retrouver ma famille pour quelques temps. »

Je ne dis rien, digérant l'information. J'ai toujours cru que Sam suivrait Steve jusqu'au bout du monde s'il lui demandait ; j'en ai fini par oublier qu'il avait une famille. Parce que tant d'Avengers en sont dépourvus, la solitude est une valeur constante.

« Quand pars-tu ? » le questionné-je.

Secrètement soulagée, je ne peux que hocher lentement la tête en l'entendant répondre « Ce soir ».