19. Lyssage intensif.

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Cette histoire me trottait tellement dans la tête depuis la veille que je décidais de me renseigner un peu plus sur ces monstres. Je n'avais rien contre ce qui n'était pas entièrement Humain, et j'aurais été mal placé pour l'être, seulement voilà, il ne s'agissait pas de n'importe quelle créature et celle-ci était particulièrement vorace dans mes souvenirs. Jusqu'à présent, j'avais presque oublié leur existence du fait de leur rareté et devais me documenter pour en apprendre un peu plus. Qu'avaient-ils à offrir de si précieux qui pourrait pousser le roi des enfers à pactiser avec eux? Où vivaient-ils, se nourrissaient-ils toujours de chair humaine et surtout combien en restaient-ils? Tant de questions pour lesquelles j'aurais du mal à trouver les réponses!

Un nombre incalculable de livres dont nous disposions ici n'existaient pas à la surface. Ils regorgeaient d'informations que nos propres explorateurs avaient récoltés au fil des siècles et, parfois, certaines âmes avaient vu des choses de leur vivant qu'elles nous rapportaient et qui, après vérification, avaient été ajouté au fur et à mesure.

La bibliothèque était tellement grande qu'il m'avait fallu pas moins d'une heure pour trouver un livre complet qui traitait des manticores et ce malgré l'ordre alphabétique dans lequel ils étaient rangés. Les rayons se trouvaient sur plusieurs étages, tous accessibles par des escaliers et sécurisés d'un garde fou en fer forgé. Les étagères, faites de bois de chêne massif, n'avaient pas subi les dégâts du temps. Le plafond était une remarquable reproduction de la chapelle Sixtine et avait été peint sur ma demande. Michelange avait été plus que ravie de s'affairer à cette tâche et j'avais eu l'impression que ses doigts se souvenaient parfaitement de chaque coup de pinceau tant les détails et les traits étaient identiques à son oeuvre originale. L'odeur du vieux papier embaumé l'espace et j'adorais ça. Il fut un temps où je pouvais rester enfermée des semaines entières ici à lire et écrire. L'endroit était paisible, calme et surtout désert.

Je descendais du troisième niveau, le plus gros livre que j'avais trouvé à leur sujet à la main et m'installais sur la banquette, les jambes repliées. La couverture était rouge, à l'image de leur pelage et le titre ainsi que les dorures fantaisistes aux quatre coins n'étaient pas réguliers. On voyait qu'ils avaient été faits à la main mais ça n'enlevait rien à son charme. Si les pages ne traitaient pas d'une créature sanguinaire, je l'aurais même trouvé beau!

A entendre la première page craquer, je compris que ça faisait bien longtemps qu'il n'avait pas été ouvert. Il était marqué ici, en grecque ancien, qu'un certain Zénon Lazaridis avait vécu près d'eux pendant, à priori, plus de deux ans pour étudier leurs coutumes et mode de vie et que sa fin fût malheureuse. Le livre commençait avec le voyage de Zénon pour les rejoindre et les différents peuples qu'il avait pu rencontrer. Je tournais les pages sans les lire. Sans doute était-ce très intéressant, mais ce n'était pas ce que je cherchais.

Nous arrivions à la première rencontre avec un membre de leur espèce. D'après ses dires, ils vivaient dans une forêt retranchée en Asie, dans des grottes sombres et profondes. La bête était en train de dévorer un paysan et le voyageur en avait l'estomac retournait mais il n'en montra rien. Il ne décrivait pas comment il avait pu l'approcher sans se faire dévorer, en revanche il nous faisait partager ses peurs, ses doutes et par dessus tout son excitation. Il expliquait à quel point nous pouvions être fascinés par une chose qui nous terrifiait plus que tout. L'illustration de ce pauvre homme servant de repas à cette créature était plus que réussi et je fis la moue en la voyant. Tous les détails étaient là. Les intestins, la chair déchiquetée et surtout, le regard profond de la victime. A la place de Zénon, je n'aurais certainement pas supporté cette vision!

PERSEPHONEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant